Quels effets des mesures de soutien de la consommation et de l'investissement pour l'économie, d'après vous ?
Si pour l'heure, l'une des préoccupations majeures du gouvernement est de minimiser les conséquences de la crise mondiale dans le but de limiter la baisse du budget de l'État, de maintenir la croissance, d'assurer un revenu suffisant à la population, une politique interventionniste pour soutenir l'économie ne sera pas sans conséquences diverses sur le plan macroéconomique. Selon moi, il faut soigneusement étudier dans quelle conjoncture et quelle situation économique cette assistance gouvernementale intervient, en tenant compte tout particulièrement des facteurs importants à commencer par l'inflation, le déficit de la balance commerciale, la balance des paiements, le déficit du budget national... Et ce en ayant nécessairement une vision au long terme : dans une ou 2 années, quelle sera alors l'incidence de ces mesures de soutien de la consommation et de l'investissement sur notre économie ?
Lors du récent Forum mondial de l'économie de Davos (Suisse), les discussions ont non seulement porté sur la crise mais sur l'après-crise... pour la simple et bonne raison que, du point de vue de leur nature, la plupart de ces mesures ont été adoptées par les grandes économies, comme États-Unis et Europe, afin de "sauver" le marché financier. Mais ce "sauvetage" pourrait être en contradiction avec la volonté de réforme pour un développement à moyen et à long terme.
Des contradictions ? Dans quelle mesure selon vous ?
Dans la conjoncture d'une profonde crise aux conséquences potentiellement très graves, des mesures de soutien de la consommation et de l'investissement sont inévitables. Mais elles sont contradictoires aux orientations données à notre économie... Ainsi c'est l'État qui injecte des capitaux dans le circuit économique, mais qui contrôle la portée de son intervention ? Quel impact sur les données macroéconomiques telles que l'inflation, les capacités de paiements internationaux, les risques pour le système bancaire ? On soutient l'investissement pour "sauver" les entreprises, tandis que leur réforme entraînera une disparition de nombre d'entre elles du fait d'une concurrence plus libre donc plus vive... En un mot comme en cent, comment concilier soutien de l'économie et réforme de l'économie ?
Que pensez-vous du montant (un milliard de dollars) de ce plan vietnamien par rapport à d'autres pays ?
De facto, l'enveloppe fixée par le gouvernement du Vietnam est bien inférieure à celles prévues par les autres gouvernements dans le monde, mais elle est adaptée aux capacités économiques comme financières de notre économie. En réalité, peu importe le montant, seuls comptent les effets de ces mesures qui, encore une fois, participent du plus pur interventionnisme. Trop de capitaux injectés au regard des caractéristiques de l'économie d'un pays, et ce serait inflation et risques pour son système bancaire...
À votre avis, quand ces mesures commenceront-elles à produire leurs effets ?
Pour les politiques qui ont été récemment décidées par le gouvernement, on a pu constater un délai en moyenne de 3 mois. Donc, selon les optimistes prévoyant une reprise pour le 3e trimestre ou à la fin de celui-ci, les mesures du gouvernement devraient produire leur plein effet concomitamment à la relance de l'économie mondiale. Pour les pessimistes, la relance mondiale serait pour la mi-2010... Compte tenu de ces incertitudes, on ne peut d'après moi prévoir de manière relativement précise la situation économique que pour le 1er semestre de cette année, après, c'est le flou. Néanmoins, je crois que notre pays surmonterait les difficultés car, de petits commerçants jusqu'aux intellectuels, tous font preuve d'un réel dynamisme dans leurs activités. Et, d'un autre côté, sur le plan du long terme, la réforme demeure l'action essentielle du Vietnam pour son économie. Le pays a poursuivi et poursuit encore réforme comme intégration, ce que l'ensemble des citoyens soutient.
Bùi Kiên Thành, économiste
Nous devons accorder une attention soutenue aux secteurs de la production d'articles de consommation car la demande en la matière demeure importante pour correspondre à de réels besoins. Il faut en outre développer activement les secteurs financier et bancaire car ils sont les poumons de notre économie : une entreprise qui a de bons produits et de bons débouchés ne pourra en tout état de cause parvenir à rien si elle ne dispose pas de capitaux pour se financer à court terme. Autre problème pour notre économie, le développement de la grande distribution. Si l'on ne fait pas attention, les groupes étrangers pourraient dominer ce marché grâce à leur puissance financière comme leur expérience. Enfin, la priorité est accordée au développement des petites en moyennes entreprises (PME). Elles sont une part essentielle de l'économie du Vietnam et emploient le plus de travailleurs. Le but est de créer plus de 2 millions d'emplois chaque année. Quant aux entreprises, leur tache est se renforcer par elles-mêmes, mais aussi de s'associer avec les diverses composantes de notre économie. Entreprises, associations de producteurs de différents secteurs et organes gouvernementaux devront collaborer pour partager les difficultés, se comprendre mutuellement et prévenir les risques. Il s'agit d'un objectif commun.
Linh Thao/CVN