On ne peut nier les grands succès acquis par le Vietnam dans sa réforme économique. Mais après plus d'une vingtaine d'années de fort développement, 2009 risque certainement d'être l'année des difficultés pour le Vietnam. L'EIU prévoit que la croissance de son PIB serait seulement de 0,3%. Une baisse sensible pour le pays mais qui demeure réduite en regard de celle que les autres pays de la région vont connaître.
Le Vietnam figure dans la liste des pays asiatiques dont la croissance économique serait positive cette année avec d'autres pays tels que l'Indonésie, l'Inde et la Chine. D'autres économies asiatiques connaîtront une croissance négative, notamment Singapour, la Corée du Sud, le Japon, la Thaïlande, la Malaisie et les Philippines.
En revanche, toujours selon l'EIU, les investissements étrangers au Vietnam baisseraient dramatiquement par rapport à 2008, de l'ordre de 70%... Le décaissement ne serait que d'environ 2,2 milliards de dollars contre les 7,6 milliards de dollars de 2008. Les entrepreneurs étrangers devraient donc être plus prudents dans leurs projets au Vietnam afin d'éviter de trop grands risques. Quant au pays, il devrait davantage s'attacher à l'amélioration de ses infrastructures comme de son système juridique, et plus particulièrement de sa fiscalité, ainsi que, de même, accentuer la lutte contre la corruption.
Autre effet de la récession, la baisse des exportations. En janvier, la plupart des pays asiatiques ont connu une chute de 31% de ce secteur. Les exportations vers plusieurs marchés essentiels du Vietnam, tels que les États-Unis, l'Union européenne ou le Japon, pourraient baisser de 60%. 2009 serait aussi une année à problèmes pour le crédit car, bien sûr, plus l'économie est mauvaise, plus les banques rechignent à accorder des prêts. Le taux de chômage devrait atteindre 8% après une année 2008 à près de 5%.
Le montant de devises transférées au pays par les Vietnamiens d'outre-mer chuterait avec moins de 8 milliards de dollars.
Bien plus, la chute du cours du pétrole brut dans le monde aura des conséquences sur les finances publiques du Vietnam. Toutefois, le déficit du budget devrait être compensé grâce aux 5 milliards de dollars d'aides publiques au développement.
Auparavant, les organisations internationales ont prévu une croissance annuelle du PIB de 2,2% à 5% pour le Vietnam. Le gouvernement vietnamien a prévu 6%. À mon avis, l'économie mondiale devrait repartir au 2e semestre 2010 et, s'agissant du Vietnam, la croissance de son PIB devrait atteindre les 2% en 2010.
Malgré tous ces problèmes, je pense qu'il demeure nombre d'entrepreneurs étrangers qui retiennent le Vietnam pour mener leurs affaires. La baisse des investissements étrangers résulte des difficultés que rencontrent les importateurs, et non pas d'une perte de confiance. Je pense que les entreprises, lorsqu'elles comptent investir dans ce pays, devraient envisager le long terme, dans les 10 à 20 années à venir, sans se focaliser sur cette seule année difficile.
Avis d'autres experts
* Thomas Tobin, directeur général de la banque HSBC Vietnam
Je confirme que le Vietnam demeure une destination attrayante dans la région. La crise mondiale touche la plupart des pays du monde, le Vietnam n'est donc pas un cas atypique. Il conserve aussi son attrait dans la mesure où, confronté aux défis que présentent ses exportations, son inflation et son chômage, le gouvernement vietnamien a pris des politiques adéquates et énergiques que nous-mêmes apprécions fortement. Je pense que l'inflation au Vietnam serait d'environ 4% en milieu d'année avant de s'établir à un pour cent dans l'avenir plus loin.
* Docteur Vo Tri Thanh, de l'Institut central de recherche et de gestion économique
Les experts vietnamiens et étrangers ont donné diverses prévisions sur la croissance économique du Vietnam en 2009. Parmi la dizaine publiée, je pense que le taux de 0,3% prévu par EIU est peu réel.
* Docteur Vu Thành Tu Anh, expert du programme Fulbright Vietnam
L’EIU a modifié à 2 reprises ses prévisions de croissance économique pour le Vietnam avec 4,2% initialement, puis 3% et enfin 0,3%, tel que Justin Wood en fait état. Je pense que ces révisions sont parfaitement compréhensibles car une économie dépendant des investissements directs étrangers et des exportations, telle celle du Vietnam, subit directement les contrecoups d'une récession mondiale.
Phuong Mai/CVN