Pays émergents : les BRICS veulent créer une banque de développement

Les dirigeants des pays émergents des BRICS, réunis à Durban en Afrique du Sud, se sont mis d’accord le 26 mars pour créer une banque de développement commune destinée à financer des infrastructures, qui devrait leur permettre de se passer de la Banque mondiale.

De gauche à droite : les ministre des Finances indien, chinois, sud-africain, brésilien et russe, le 26 mars à Durban. Photo : AFP/VNA/CVN  

"C’est fait", a déclaré le ministre sud-africain des Finances, Pravin Gordhan, quand l’AFP lui demandait si les cinq pays - Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud - étaient parvenus à un accord sur la création de cette banque, lors des discussions ministérielles précédant leur 5e Sommet annuel.

Les détails devraient être annoncés le 27 mars par les chefs d’État et de gouvernement des cinq pays, selon M. Gordhan. Mais il devrait ne s’agir que d’un accord de principe, le règlement des questions techniques étant remis à plus tard. "Il y a encore beaucoup de détails à discuter (...) et il va y avoir un processus pour le reste de ces détails", a indiqué le ministre du Commerce et de l’Industrie sud-africain, Rob Davies.

La nouvelle banque devrait, selon les conclusions de la commission de travail qui a précédé le sommet, être dotée d’un capital de départ de 50 milliards de dollars, soit 10 milliards par pays.

Quand bien même elle devrait avoir du mal à réunir une telle somme qui correspond à 2,5% de son produit intérieur brut (PIB), l’Afrique du Sud en a fait une priorité. Elle espère trouver ainsi un moyen de financer son ambitieux programme d’infrastructures et aussi les projets des pays voisins.

"Je pense que les montants disponibles pour financer le développement ne sont clairement pas suffisants pour satisfaire (...) les besoins en infrastructures sur le continent africain. Ainsi, un nouvel acteur sera le bienvenu, pour ajouter sa contribution et, espérons-le, secouer quelques-unes des autres institutions grâce à une saine concurrence", a relevé le ministre du Commerce et de l’Industrie sud-africain Rob Davies.

Le pays hôte a d’ailleurs donné pour thème à la rencontre de Durban "Les BRICS et l’Afrique : un partenariat pour le développement, l’intégration et l’industrialisation". Derrière le discours politique unificateur, qui consiste à dire que les BRICS doivent constituer une force économique et politique pour s’affranchir des puissances occidentales, se dissimulent cependant des appréhensions africaines.

L’implantation massive en Afrique de la Chine - le géant des BRICS - pose question, certains estimant que la Chine n’est plus un pays émergent, et que ses relations économiques avec le continent s’apparentent désormais à une nouvelle forme de colonialisme.

La journée a justement démarré le 26 mars pour le président sud-africain Jacob Zuma par la réception de son homologue chinois Xi Jinping dans le cadre d’une visite d’État à Pretoria. "Nous voyons les succès de la Chine comme une source d’espoir et d’inspiration. L’émergence de la Chine porte des leçons pour nous, car nous essayons de suivre son exemple", a déclaré M. Zuma. Et les deux pays de signer quelques contrats, notamment dans les domaines des hydrocarbures et du développement d’infrastructures de transport.

Un contre-poids à l’Occident

Les deux hommes se sont ensuite rendus à Durban, où M. Zuma s’est entretenu en tête-à-tête avec le président russe Vladimir Poutine. Soucieux de leur indépendance, le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, qui rassemblent 43% de la population mondiale et produisent le quart du PIB de la planète, veulent se doter d’institutions et mécanismes communs leur permettant de contourner un système mondial actuellement dominé par l’Occident, du Fonds monétaire international (FMI) à la Banque mondiale (BM) en passant par les agences de notation.

La BM a "salué" le 26 mars le lancement de cette nouvelle banque, rejetant implicitement toute idée de compétition entre les deux insitutions. "Nous sommes prêts à travailler étroitement avec cette nouvelle banque pour mettre un terme à la pauvreté", a précisé l’institution de Washington dans un communiqué.

Outre la création d’une banque de développement, les BRICS pourraient aussi mettre en réserve une partie de leurs fabuleuses réserves de change - 4.400 milliards de dollars, selon Pretoria, aux trois quarts détenus par Pékin - pour s’entraider en cas de choc conjoncturel.

Ce pot commun, qui leur permettrait d’éviter un recours au FMI, devrait être doté d’une centaine de milliards de dollars, selon le gouverneur de la Banque centrale du Brésil, Alexandre Tombini. Le Brésil et la Chine ont parallèlement signé un accord d’échange de 30 milliards de dollars entre leurs banques centrales destiné à stimuler leur commerce bilatéral.

Les cinq pays ont aussi dans leurs cartons une agence de notation, un mécanisme de réassurance, un conseil d’entrepreneurs, une classification maison des universités... On évoque également un câble sous marin permettant de transmettre des données à haut débit du Brésil à la Russie via l’Afrique du Sud, l’Inde et la Chine, un projet à 1,2 milliard de dollars.

AFP/VNA/CVN

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