* Pour plusieurs spécialistes, cette décision motivée par une meilleure maitrise des importations paraît moins convaincante. Qu'en pensez-vous ?
Cette décision destinée à rééquilibrer l'offre et demande en devises est selon moi purement conjoncturelle. Nos réserves en devises ne sont pas suffisantes pour intervenir sur le marché où les écarts entre offre et demande augmentaient ces derniers temps en raison d'exportations moins optimistes que prévues et un déficit de la balance du commerce s'en trouvant donc accru, les importations demeurant toujours importantes.
Au cours des 7 premiers mois de l'année, l'importation excédentaire du pays s'est élevée à 7,4 milliards de dollars et pourrait atteindre plus de 14 milliards de dollars pour toute l'année. Bien que le déficit du commerce soit sous la barre fixée par l'Assemblée nationale (20% par rapport à la valeur des exportations), il menace la balance de l'offre et de la demande en devises et diminue la valeur du dông. Ainsi, ce relèvement du taux de change dông-dollar permet d'abord de rééquilibrer l'offre et la demande, ensuite de garantir la réserve nationale de devises.
* Et quels seraient les éventuels effets négatifs ?
Après ce 2e ajustement depuis le début de l'année, le taux de change demeure dans des limites acceptables, le dollar américain ayant pris 5,46% sur le dông alors que le seuil de sécurité permet d'aller jusqu'à 6%. Bien qu'une telle mesure soit de fait justifiée, elle entraînera bien sûr des difficultés. Tout d'abord, le contrôle de l'indice des prix à la consommation (IPC) serait plus délicat, quoique cette année l'IPC soit maîtrisé à moins de 10% je pense. Ensuite, la confiance dans le dông pourrait diminuer quelque peu, et la dette étrangère serait plus lourde en terme de règlement.
* À votre avis, quelles sont les mesures nécessaires pour réévaluer le dông ?
Nous devons avoir une stratégie de longue haleine pour équilibrer la balance commerciale et atteindre les exportations excédentaires. Le principal pour cette stratégie est de rentabiliser les activités de production des entreprises nationales. Pour parvenir cet objectif, les organismes concernés comme la BEV, les ministères des Finances, de l'Industrie et du Commerce, du Plan et de l'Investissement, doivent avoir un consensus. Les entreprises doivent être épaulées davantage en termes d'ateliers, de procédures administratives, d'impôts et de promotion commerciale. La baisse de leurs coûts de production via la diminution des taux d'intérêt des prêts est une mesure importante qui rehaussera la compétitivité des produits nationaux face aux importations. En même temps, il faut sensibiliser largement le mouvement "Le Vietnamien consomme vietnamien" à toutes les couches sociales et augmenter les sources de fonds versés dans les activités de production.
Le gouvernement doit bien maîtriser le déficit commercial et proposer des politiques d'importation adaptées au contexte national et conformes aux engagements internationaux du pays. Une autre mesure importante est d'améliorer l'efficacité et la qualité des dépenses publi-ques et des ouvrages financés par le budget de l'État, et de ramener au plus tôt le déficit public à moins de 5% du PIB.
* Après ce rajustement du taux de change entre le dông vietnamien et le dollar américain par la BEV depuis avant-hier, les banques commerciales ont annoncé son nouveau tarif. Le taux de change varie entre 19.230 et 19.295 dôngs le dollar (achat) et 19.310 dôngs le dollar (vente). Sur le marché libre, le taux de change a augmenté visiblement. Avant-hier, le taux de change affichait 19.400 dôngs le dollar (achat) et 19.500 dôngs le dollar (vente) au lieu de 19.330 dôngs et de 19.350 dôngs du jour précédent. Le premier rajustement de la BEV cette année, en date de 11 février, avait permis de stabiliser considérablement le marché des devises pendant un temps. C'est pour cette raison que cette 2e décision est très attendue pour améliorer la situation où l'offre et la demande en devises sont actuellement déséquilibrées.
* Selon Dào Minh Anh, directrice adjointe de la Maritime Bank, l'offre et la demande en devises dans le système bancaire ces derniers temps sont tendues par rapport aux mois précédents. Mais pour la Maritime Bank, elle ne rencontre pas trop de difficultés en la matière. "Nous ne sommes pas trop surpris de cette décision de la BEV. Bien saisissant le marché, l'établissement a bien préparé une source de fonds assez abondante avant cet ajustement", dit-elle. Et d'ajouter que ce rajustement aidera les banques commerciales à trouver leur aisé dans les activités d'achat et de vente des devises.
Linh Thao/CVN