Mille ans après, les gravures xylographiques de sutras se souviennent

La pagode millénaire Vinh Nghiêm (Nord) abrite 3.050 gravures sur bois utilisées pour imprimer les sutras de l'école de pensée de bouddhiste de Truc Lâm Zen. Un dossier sera soumis à l'UNESCO pour l'inscription de ce trésor au patrimoine documentaire.

La pagode Vinh Nghiêm, dans le district de Yên Dung (province de Bac Giang, Nord), a été construite au début de la dynastie des Ly (1010-1225). En plus d'être un lieu de culte, la pagode Vinh Nghiêm a aussi été un lieu de formation de nombreuses générations de moines bouddhistes talentueux. La pagode abrite plus de 100 statues, de nombreux panneaux, sentences parallèles, statues de bouddha, objets de culte et notamment plus de 3.000 gravures xylographiques de sutras réalisées à différentes périodes par les moines de l'école Zen Truc Lâm. Ces gravures sur bois étaient utilisées comme planches d'impression des livres saints.

Vers la fin du XIIIe siècle, le fondateur de l'école Zen Truc Lâm, (école de pensée de bouddhiste typiquement vietnamien), Trân Nhân Tông, a fait de la pagode Vinh Nghiêm un institut de formation des moines. L'emplacement de l'édifice religieux est au point de convergence des montagnes de Yên Tu (berceau de l'école Zen Truc Lâm) et de la région deltaïque du fleuve Rouge. Raison pour laquelle le bonze supérieur Trân Nhân Tông a décidé de choisir cette pagode comme lieu de formation des moines.

Selon l'histoire de l'école Zen Truc Lâm, le second fondateur a fait confectionner au début du XIVe siècle des gravures xylographiques destinées à imprimer les sutras bouddhistes. Cette affaire visait à servir la formation des moines et à généraliser le dharma. Malheureusement, ces premières tablettes de bois ont ensuite été détruites vers le début du XVe siècle, à l'époque de la domination chinoise des Ming qui imposèrent la politique de destruction des ouvrages vietnamiens. À la fin du XVIe siècle, les bonzes gérants de la pagode Vinh Nghiêm ont continué l'œuvre de leurs prédécesseurs en faisant graver d'autres tablettes xylographiques. La plupart d'entre elles ont été perdues à cause des intempéries. Du milieu du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, les gravures xylographiques ont été réalisées en grande quantité, et sont depuis conservées avec le plus grand soin.

Ces planches de bois ont été sculptées par des artisans des provinces septentrionales de Bac Giang, Bac Ninh et de Hai Duong, à partir de bois de plaqueminier prélevé dans le jardin de la pagode. Ce bois est doux, lisse, imputrescible et facile à travailler. Il comporte rarement de nœuds ou de fissures. Les planches de bois ont été sculptées en chinois ou en nôm (écriture démotique sino-vietnamienne). Leur qualité exceptionnelle montre que les artisans, en plus d'être d'excellents sculpteurs, maîtrisaient le chinois et le nôm.

Leur dimension varie selon les types de sutras. La plus grande fait plus d’un mètre de long pour 40-50cm de large. La plus petite, seulement 15 x 20cm. Leurs surfaces sont couvertes d'une couleur noire brillante qui est l'encre d'impression, laquelle confère au bois une résistance aux insectes xylophages et à l'humidité.

Des études approfondies sur le patrimoine

Dès 1936, lors de la rédaction de la monographie de Bac Giang, Trinh Nhu Tâu, grand homme de lettres du territoire, a mené de premières études sur ce trésor de la pagode Vinh Nghiêm. En 1964, l'édifice a été reconnue "monument historique national" et sa collection de 3.050 gravures xylographiques de sutras a fasciné les chercheurs et autres historiens... Trente ans après, le musée provincial de Bac Giang a effectué le recensement et mené de nouvelles études sur ce trésor. C'était en 1994. Après, de nombreux articles et publications de chercheurs ont été publiés dans les journaux et magazines nationaux comme provinciaux. Il y a deux ans, avec le concours du ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme, la province de Bac Giang a procédé encore une fois à un inventaire complet de ce patrimoine. À cette occasion, les planches de bois ont fait l'objet d'une série d'opérations (nettoyage, classement, codification). Les gravures ont été ensuite utilisées pour imprimer les textes en papier do (rhamnoneuron) qui ont été rassemblés en volumes. Tous ces travaux ont été photographiés et filmés. Ce qui facilitera le travail de gestion, de conservation et l'usage de ces gravures sur bois.

À travers différentes études, ce gigantesque volume de planches de bois a permis aux chercheurs de lever le voile sur certains mystères du passé, comme l'histoire du bouddhisme vietnamien, les sciences et les techniques, la philosophie, la sociologie et la linguistique. Les linguistes ont pu aussi mieux comprendre le processus de développement de l'écriture du peuple vietnamien, en particulier la transition du chinois au nôm.

Fin juin dernier, Pham Gia Khiêm alors vice-Premier ministre, a confié au ministère des Affaires étrangères la responsabilité de coopérer avec le Comité populaire de la province de Bac Giang pour perfectionner le dossier sur la collection des gravures sur bois de sutras de l'école Zen Truc Lâm conservée à la pagode Vinh Nghiêm. Ce dossier sera déposé à l'UNESCO pour la reconnaissance de ces gravures xylographiques en tant que "Patrimoine documentaire" relevant au Programme "Mémoire du monde" de la région Asie-Pacifique. À relever qu'en mai dernier, ce patrimoine a été l'un des candidats au titre "Patrimoine documentaire" du Registre Mémoire du monde. Mais ce titre prestigieux lui a été refusé.

Ces derniers jours, la pagode Vinh Nghiêm a accueilli le Premier ministre Nguyên Tân Dung et le chef du Comité de coordination du Programme "Mémoire du monde" de la région Asie-Pacifique, Ray Edmonson, et de nombreux chercheurs, touristes vietnamiens et étrangers.

Xuân Lôc/CVN

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