"Le gouvernement allemand juge quasiment inévitable une sortie (de la Grèce) de la zone euro, si le chef de l'opposition Alexis Tsipras (Gauche radicale Syriza) dirige le gouvernement après les élections (législatives du 25 janvier), abandonne la ligne de rigueur budgétaire et ne rembourse plus les dettes du pays", écrivait samedi 3 janvier sur son site Internet l'hebdomadaire Der Spiegel, s'appuyant sur "des sources proches du gouvernement allemand".
La chancelière allemande Angela Merkel |
Pour les médias allemands, la chancelière et son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, (tous deux conservateurs CDU) tentent de faire pression sur les électeurs grecs ou sur M. Tsipras lui-même. Toutefois, la démarche est controversée, y compris au sein de sa coalition gouvernementale, des sociaux-démocrates mais aussi des conservateurs ayant exprimé publiquement leur réprobation.
La chancellerie et le ministère allemand des Finances n'ont souhaité ni confirmer, ni démentir, les informations du Spiegel. "La Grèce a rempli ses obligations dans le passé. Le gouvernement allemand part du principe que la Grèce va continuer à l'avenir de remplir ses obligations envers la troïka" de ses créanciers (Union européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international), a simplement déclaré un porte-parole du gouvernement.
"Il n'y a pas de changement de cap", a-t-il ensuite insisté.
Un haut responsable de la CDU, Christian Bäumler, a adressé une mise en garde dimanche 4 janvier : "En cas de sortie de l'euro, les dettes (de la Grèce) ne pourraient pas être remboursées, et l'Allemagne porterait une part significative du fardeau".
"Avec ce scénario de menace (...), le gouvernement se mêle indirectement de la campagne (électorale) grecque. C'est extrêmement risqué et c'est une erreur", commentait dimanche 4 janvier le quotidien Die Welt, proche des conservateurs.
"Cette menace est susceptible d'encore renforcer le mécontentement en Grèce vis-à-vis des Allemands et d'aider ainsi Alexis Tsipras dans sa campagne. (...) Cela pourrait aussi nourrir l'instabilité en Grèce et même conduire" à un mouvement de panique s'accompagnant d'une ruée vers les guichets des banques pour des retraits de dépôts, poursuivait Die Welt.
"Coup de bluff"
En théorie, aucun mécanisme ne prévoit la sortie d'un pays de la zone euro. Mais à Berlin, on imagine que si la Grèce ne remplissait plus ses engagements, la BCE pourrait restreindre les possibilités de refinancement des banques grecques au point de contraindre Athènes à réintroduire la drachme.
Les sociaux-démocrates (SPD), membres de la "grande coalition" au pouvoir à Berlin, ont publiquement contesté la démarche attribuée à Mme Merkel.
Ainsi, le vice-président du groupe SPD au Bundestag (la chambre basse du parlement), chargé de l'euro, a estimé que les conservateurs avaient, seuls, été à l'origine de cette "fuite". "Un changement de ligne du gouvernement ? Plutôt une grave erreur de la CDU", a-t-il commenté sur son compte twitter.
Dès samedi 3 janvier, le secrétaire d'État social-démocrate aux Affaires européennes, Michael Roth, avait pris ses distances. "La Grèce est membre de la zone euro. Et doit le rester", avait-il affirmé via son compte Twitter.
AFP/VNA/CVN