Un comptage aérien effectué en 2011 a dénombré 2.667 carcasses dans la réserve de Niassa, à la frontière tanzanienne dans l’extrême Nord du pays. Des animaux tués dans les deux années précédentes. Les braconniers en tuent environ 1.000 par an, selon les estimations. «Il y a davantage d’éléphants tués que de naissances», se désole Carlos Lopes Pereira, consultant pour l’ONG Wildlife Conservation Society (WCS). «Si on continue à ce rythme, il se pourrait que nous n’ayons plus d’éléphants dans huit ans», estime cet expert.
Des éléphants dans la réserve d’Amboseli, au Sud de Nairobi, en décembre 2012. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le Mozambique, dévasté par une guerre civile qui a pris fin en 1992, reste l’un des pays les plus pauvres d’Afrique malgré la découverte récente d’énormes réserves de gaz et de charbon. Le budget de l’État ne suffit pas pour répondre aux besoins de base de la population, et la protection de la nature n’est en rien une priorité.
Les rangers dans les parcs sont peu nombreux et armés de fusils à réarmement manuel datant de la Seconde Guerre mondiale, face à des braconniers équipés d’armes puissantes et récentes et de véhicules qui permettent des chasses à grande échelle.
«Ils sont capables de tuer plusieurs animaux en même temps», constate M. Lopes Pereira. Les braconniers, qui connaissent les mœurs des éléphants, tuent d’abord la matriarche de la horde. Privés de leur guide, les autres animaux s’affolent et tournent sur place, permettant aux chasseurs d’en abattre jusqu’à cinq ou six au même endroit. Et les conservateurs des parcs voient la mortalité augmenter parmi les jeunes éléphants orphelins, victimes notamment d’attaques de lions.
Les autorités mozambicaines affirment que les tueurs viennent de la corne de l’Afrique, suivant en cela une tradition très ancienne : «Historiquement, les braconniers descendent de Somalie, en passant par le Kenya», explique Francisco Pariela, directeur national de la protection de la nature. Ils recrutent et paient des Mozambicains pour les informer des mouvements des troupeaux.
Des défenses d’éléphants saisies par les rangers au Mozambique. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
La Convention sur le commerce international des espèces menacées d’extinction (CITES) a relevé dans un rapport publié au début de l’année que «le continent africain n’a jamais connu autant de braconnage d’éléphants». Elle estime que près de 25.000 pachydermes ont été tués pour leurs défenses pendant la seule année 2011.
Tirer la sonnette d’alarme sur le trafic de l’ivoire
Le trafic de l’ivoire a doublé depuis 2007 et a plus que triplé au cours des quinze dernières années. Et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et des groupes de défense de l’environnement constatent que les pachydermes du Sud et de l’Est du continent, qui était jusqu’à présent relativement épargnés, sont maintenant menacés.
Le Mozambique est particulièrement vulnérable. Le braconnage y est considéré comme un simple délit. «Nous pouvons seulement donner des amendes aux gens, et pas les mettre en prison», regrette M. Pariela. «Nous en avons arrêté beaucoup, mais les braconniers ne craignent rien. Ils paient une amende et s’en vont libres. Le gouvernement ne prend pas au sérieux ce problème du braconnage», accuse Carlos Serra, le directeur du lobby Centro Vivo Terro.
Maintenant, les braconniers descendant vers le Sud après avoir quasiment vidé de ses éléphants l’Afrique centrale et occidentale. Lopes Pereira craint que les braconniers ne se tournent ensuite vers le célèbre parc national Kruger, en Afrique du Sud. Cette vaste réserve frontalière du Mozambique -où ce sont actuellement les rhinocéros qui sont massacrés, pour leurs cornes- abrite quelque 12.000 éléphants.
«Le commerce de l’ivoire est complètement hors de contrôle. Le braconnage pour l’ivoire s’aggrave de jour en jour et aura une incidence sur l’Afrique du Sud, s’il n’est pas arrêté au Mozambique», avertit-il.
AFP/VNA/CVN