France
Les derniers services de Bernard Pacaud, "le dernier des Mohicans" de la gastronomie

C'est une page de l'histoire de la gastronomie qui se tourne. Après plus de 40 ans aux commandes de L'Ambroisie, le plus ancien restaurant trois étoiles de Paris, Bernard Pacaud s'apprête à raccrocher son tablier.

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Le chef Bernard Pacaud dans son restaurant L'Ambroisie, le 3 juillet à Paris. 
Photo : AFP/VNA/CVN

Considéré comme l'un des derniers maîtres de la cuisine française classique, le chef de 77 ans va céder sa place à Shintaro Awa, 39 ans, formé notamment aux côtés du chef trois étoiles Éric Frechon au restaurant Épicure du Bristol Paris.

Ce départ, c'est une "décision extrêmement difficile", confie sa fille Alexia Pacaud, cheffe pâtissière de l'établissement. "C'est quelque chose qu'il a construit pendant toute sa vie. C'était beaucoup d'angoisse".

"Il était malade à l'idée de partir. Mais, maintenant que Shintaro est là, ça va mieux. Il est serein", poursuit son épouse Danièle Pacaud, qui gère la salle. La transition, qui doit durer tout l'été, voire plus si besoin, se passe "très bien", confirme Bernard Pacaud.

Le chef Bernard Pacaud (gauche ) et son successeur, le chef japonais Shintaro Awa, dans les cuisines du restaurant L'Ambroisie, le 3 juillet à Paris.
Photo : AFP/VNA/CVN

Le chef, que ses pairs surnomment "le dernier des Mohicans", est connu pour sa discrétion. Pas question de participer à "Top Chef" ou de s'épancher dans les médias pour celui qui se décrit comme un "taiseux".

"C'est un cuisinier, il reste dans sa cuisine", résume Jérôme Banctel, chef triplement étoilé du Gabriel, qui a travaillé dix ans auprès de lui. Sa cuisine est à son image : sans fioriture mais extrêmement exigeante, fruit d'une rigueur constante et quotidienne.

Feuillantine de langoustines au curry, bar au caviar, sans oublier sa fameuse tarte au chocolat... "Une cuisine jamais à la mode mais jamais démodée et toujours respectée", souligne Jérôme Banctel.

Se reconstruire par le travail

Cette exigence ne doit rien au hasard. Né en Bretagne d'un père inconnu et d'une mère célibataire après la guerre, Bernard Pacaud est d'abord élevé par ses grands-parents.

Le chef Bernard Pacaud, trois étoiles au guide Michelin, termine la préparation d'une pâte feuilletée aux graines de sésame dans la cuisine de son restaurant "l'Ambroisie", place des Vosges à Paris. 
Photo d’archives : AFP/VNA/CVN

À 6 ans, il quitte sa région natale pour Lyon afin de rejoindre sa mère remariée à un homme violent. Placé en foyer avec ses demi-frères, il trouve un refuge à 12 ans auprès d'Eugénie Brazier, dite la "Mère Brazier", première femme triplement étoilée qui le prend sous son aile.

C'est elle qui lui transmet sa maxime de vie : "Lorsqu'on a tout perdu, c'est par le travail qu'on se reconstruit".

Venu à Paris après son service militaire, Bernard Pacaud officie d'abord à La Méditerranée puis à La Coquille, avant d'intégrer Le Vivarois, le restaurant trois étoiles de Claude Peyrot, où il rencontre sa femme Danièle.

Ensemble, ils ouvrent en 1981 L'Ambroisie, quai de Tournelle. "On avait dit : on fait un restaurant pour copains. Bernard disait : +Les étoiles, ça va, j'ai donné+", se souvient son épouse.

L'histoire leur donne tort : dix mois plus tard, ils obtiennent une première étoile et, l'année suivante, une deuxième. En 1986, ils s'installent place des Vosges et décrochent un troisième macaron en 1988, qui ne leur sera jamais retiré - un record de longévité à Paris.

Invités de marque

L'Ambroisie s'est imposé au fil des décennies comme une institution. En 1997, le président Jacques Chirac y invite son homologue américain Bill Clinton. En 2015, François Hollande choisit l'adresse pour recevoir Barack et Michelle Obama.

Un cuisinier prépare un bar dans la cuisine du restaurant L'Ambroisie du chef Bernard Pacaud, le 3 juillet à Paris.
Photo : AFP/VNA/CVN

Pas de quoi impressionner Shintaro Awa. "Je n'ai vraiment aucune pression d'avoir deux ou trois étoiles. Moi, je fais le nécessaire pour faire de la gastronomie", assure le chef originaire du Japon.

De son côté, Bernard Pacaud va devoir apprendre à lever le pied, lui qui est présent à chaque service, midi et soir, affirme sa femme. Rien n'est moins sûr toutefois. "Je le récupère avec moi dans mon projet" de salon de thé, affirme sa fille Alexia.

"Le but ce n'est pas de l'avoir avec moi en cuisine", assure-t-elle, mais de lui laisser l'opportunité de le faire s'il le souhaite. "Qu'il continue à pouvoir faire ce qu'il aime, sans la pression des étoiles."

AFP/VNA/CVN





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