Le vélo est devenu le moyen de transport par excellence dans le Centre du Mozambique, comme dans le port de Quelimane où il supplante désormais les minibus-taxis courants en Afrique australe.
Pedro Antonio, 25 ans, prend des passagers sur son porte-bagage depuis cinq ans. "Je transporte 20 clients par jour, 25 si je suis chanceux", dit-il, alors que l'un d'eux descend de son vélo vert.
Les passagers paient cinq meticals (0,12 euros) par trajet, à peu près le même prix que les minibus, mais pour un voyage qui leur évite d'être entassés avec vingt autres personnes dans un espace prévu pour la moitié de passagers.
Les bicyclettes sont un signe de la reprise économique au Mozambique, sorti il y a moins de vingt ans d'une guerre civile dévastatrice (1977-1992). Avec 6,5% de croissance en 2010, le pays a été l'un des meilleurs élèves d'Afrique en la matière. Mais il revient de loin.
Le président mozambicain Armando Guebuza a même évoqué la floraison de bicyclettes comme preuve de la performance de son gouvernement, dans son discours sur l'état de la Nation l'année dernière. "À la fin de la guerre, beaucoup de réfugiés ont rapporté des vélos du Malawi", raconte Paulo Maleia, 19 ans, qui pédale tous les jours pour aller travailler à la sucrerie de Sena, à 18 km de chez lui. La tendance s'est accélérée lorsque l'entreprise, située à 200 km de Quelimane, a ouvert en 2001. Avec 7.000 ouvriers, la sucrerie est devenue le plus grand employeur privé du pays. "Les gens utilisent leur vélo pour se rendre aux champs", dit Paolo Maleia.
Sur les rives du Zambèze, des centaines de cyclistes vont et viennent, pour planter et couper la canne à sucre.
Ses deux heures de vélo quotidiennes sont beaucoup plus rapides qu'un trajet à pied, et elles lui évitent de payer un taxi collectif.
La bicyclette lui a coûté 2.200 meticals (75 dollars, 52 euros) il y a trois ans. Comme pour de nombreux propriétaires de vélos, c'est son bien le plus précieux, dans un pays où 80% de la population survit grâce à l'agriculture de subsistance.
La multiplication des vélos ne reflète pas pour autant un enrichissement de la population, puisque les niveaux de pauvreté sont restés obstinément stables au cours de la dernière décennie : 54% des Mozambicains vivent en-dessous du seuil de pauvreté, selon l'ONU. "Vous pouvez désormais acheter un vélo pour 30 dollars. Vous n'avez pas à vendre beaucoup de sacs de maïs pour l'obtenir!", souligne Joseph Hanlon, un professeur à l'Open University britannique qui a étudié la question. "Est-ce une juste mesure du développement? La réponse est non".
Et si le vélo est de plus en plus populaire au Centre et au Nord du Mozambique, il l'est beaucoup moins au Sud, dans la région plus développée de la capitale Maputo, où l'on rêve davantage de voitures.
AFP/VNA/CVN