L’année sabbatique pour les étudiants, entre rêve et réalité

De plus en plus d’étudiants prennent une année sabbatique pour voyager, travailler ou simplement faire une pause. Au Vietnam, la «gap year» fait des émules, malgré la réticence, voire la résistance de nombreux parents. Alors, année essentielle ou perte de temps ?

Nguyên Anh Tuân (aux lunettes) lors d’une activité philanthropique de Beyond Love.
Photo : CTV/CVN


La fameuse «gap year» est une année (ou plus) de césure entre le lycée et l’université, ou après l’université, qui permet aux jeunes d’accomplir un voyage, une mission humanitaire, un projet personnel ou la découverte d’un emploi. Son but ? Laisser aux étudiants le temps de se décider et de construire des trajectoires moins précoces et plus personnelles, avant de revenir avec plus de recul et d’autonomie.
Au Vietnam, pays où l’on a le culte des études et du travail, l’année sabbatique est encore une conception assez bizarre, voir mal vue. Cependant, le nombre de jeunes Vietnamiens qui choisissent de prendre une voire deux années de pause ne cesse de croître.
Cependant, ceux qui optent pour cette voie se heurtent à pas mal d’obstacles, le premier d’entre eux, et non des moindres, étant les... parents.
Un petit sondage réalisé auprès de parents ayant des enfants en 3e classe a montré que presque tous ne savent pas ce que signifie «année sabbatique». Lorsque l’on explique, une bonne moitié des parents rejette carrément cette initiative, l’autre partie est réticente. D’ici à ce que leurs enfants aient 18 ans, il y le temps de voir ! Tous les parents considèrent que perdre une ou deux années d’étude est du gaspillage.
«Arrêter un an, c’est trop. Quand on reprend les études, on se retrouve avec des camarades un an plus jeune. Sans parler de trouver un emploi. Dans la situation économique actuelle difficile, il y a le risque de passer à côté d’opportunités intéressantes», a estimé Mme Minh Hà de Hanoi.
«Je n’aime pas voir mon fils jouer trop souvent avec ses amis, je le pousse à étudier sans relâche. Alors, vous imaginez, je lui dis maintenant: +Bon, pendant un an, tu fais ce que tu veux : t’amuser, étudier, voyager+. C’est impensable !», a confié M.Trân Nam.

Des jeunes conquièrent le mont Fansipan, le «toit» de l’Indochine.


Partir, pour mieux revenir
Nguyên Anh Tuân, 19 ans, se souvient d’une fin d’année lunaire glaciale, comme le Nord en réserve souvent, où il a vu aux alentours du pont Chuong Duong un vieil homme vêtu de vêtements légers. «Là je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose d’utile pour la société. Et j’ai créé peu de temps après l’Association des écoliers volontaires». Une fois diplômé, Tuân a réservé une année complète à l’organisation caritative Beyond Love. Un jour, il est allé avec l’association au Centre de soutien social n°3 où il a rencontré une vieille dame passionnée de lecture. Avant de partir, il lui a promis de revenir avec beaucoup de romans. Trois mois plus tard, Tuân est revenu comme promis, malheureusement, la vieille dame était morte. Il se sent encore coupable de ne pas avoir tenu sa promesse plus tôt. Il en a tiré cette conclusion : «Faites le plus vite possible ce qui vous tient à cœur, car le temps passe très vite».
Pham Anh Thu, 21 ans, est en train de suivre un cursus universitaire en psychologie dans le Massachusetts. Lui aussi a pris un an de congé sabbatique non par pour des activités humanitaires, mais «pour découvrir le monde, et aussi me découvrir».
Selon ces étudiants, cette période leur a permis de voir le monde au-delà du tableau noir. Actuellement, Nguyên Anh Tuân est étudiant en gestion économique à la British Univesity Vietnam. Il considère que cette année sabbatique lui a apporté plus de maturité. Pour beaucoup d’étudiants, cette «gap year» est la première expérience loin de leur famille et à l’étranger pour une longue période.
Faire une pause dans la course aux diplômes est formateur. Cette coupure temporelle ne se traduira pas un «trou» dans le CV. Au contraire, elle apporte des expériences, parfois la maîtrise d’une langue étrangère (l’anglais est privilégié par les jeunes) et une motivation exacerbée. Plus de curiosité, de maturité, de responsabilité aussi, autant d’atouts que les responsables de cursus apprécient et, plus tard évidemment, les recruteurs.
Dans les pays occidentaux, Grande-Bretagne ou États-Unis, comme dans les pays scandinaves, ces années de latence sont fortement encouragées. Dans ces pays, on a dans l’idée de former des citoyens, des adultes, pas seulement des étudiants. Il s’agit plus de se découvrir que de se placer en société.

Phong Delon/CVN

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