La stratégie de l'Otan en Afghanistan est menacée, selon les experts

Si les responsables de la coalition s'en défendent, la décision de l'Otan de limiter ses opérations avec les forces afghanes face à la recrudescence des attaques venues de leurs rangs menace la stratégie internationale en Afghanistan, estiment des experts.

Face aux risques de ressentiment provoqué par la diffusion d'un film américain à petit budget dénigrant le prophète Mahomet et au meurtre de 51 des siens par des soldats ou des policiers afghans depuis le début de l'année, l'Otan s'est résolue le 18 septembre à limiter "temporairement" ses opérations conjointes avec les forces afghanes.
Cette décision pose une "difficulté importante pour la stratégie" de l'Isaf, la force internationale en Afghanistan, juge Stephen Biddle, professeur à l'Université Georgetown à Washington spécialiste de l'Afghanistan.

Des policiers afghans à Kaboul, le 18 septembre.


L'objectif de la communauté internationale est de former 350.000 soldats et policiers afghans aptes à sécuriser seuls le pays après 2014 quand les 70.000 soldats américains et 40.000 des autres pays de l'Otan et associés l'auront quitté.
La limitation des opérations conjointes constitue un retour à la stratégie en cours avant 2009, quand les contacts entre militaires afghans et occidentaux n'étaient pas aussi étroits. Elle avait été abandonnée précisément parce que les progrès étaient jugés "trop lents et superficiels", pointe M. Biddle.
"Ce n'est qu'un revers mineur à ce stade" mais son ampleur dépendra du caractère temporaire de la décision de l'Otan, observe de son côté Jeffrey Dressler de l'Institute for the Study of War (ISW), un centre de réflexion de Washington : "Si cela dure pendant des mois, cela aura certainement un impact".
Infiltrations ou incompatibilité culturelle ?
D'influents sénateurs américains, dont le républicain John McCain, en ont profité le 19 septembre pour critiquer la stratégie de l'administration Obama et "la précipitation pour mettre sur pieds une armée et une police afghanes afin que les forces américaines puissent commencer à se retirer suivant le calendrier établi par l'administration".
De son côté, l'Isaf l'assure, la coalition internationale "maintient le cap" pour atteindre ses objectifs. "Changer la façon dont on travaille au quotidien est normal chez les militaires et de bon sens", assure le général australien Roger Noble, chef d'état-major adjoint de l'Isaf chargé des opérations.
Mais l'officier reconnaît pourtant que l'effet psychologique dans la population des pays occidentaux est dévastateur : "Le problème avec les +attaques de l'intérieur+, c'est qu'elles frappent en plein coeur votre résolution. C'est une chose d'être tué au combat par des insurgés, c'en est une autre d'être tué par derrière d'une balle dans la tête la nuit par vos amis".

"C'est un risque au niveau stratégique"
, admet-il. Seuls un quart des "attaques de l'intérieur" sont considérées par la coalition comme le résultat d'infiltrations de talibans. Elles pourraient ne constituer que la "partie visible d'un iceberg" encore plus préoccupant, à savoir l'incapacité pour les forces afghanes et les armées occidentales à travailler ensemble en raison de divergences culturelles irréconciliables, craint Stephen Biddle.
Et "il est beaucoup plus simple de résoudre un problème d'infiltrations qu'une incompatibilité culturelle", explique-t-il à l'AFP.
Ancienne conseillère du chef d'état-major interarmées américain, Sarah Chayes est plus catégorique : "On sait déjà que cette stratégie dans l'ensemble ne fonctionne pas". L'armée afghane "n'est jamais que le bras d'un gouvernement" dont la viabilité pose question, explique Mme Chayes, désormais experte au Centre de réflexion Carnegie.
"Si on ne s'attaque ni au problème de la gouvernance et de la corruption au sein du gouvernement afghan ni au rôle du Pakistan, je ne vois pas vraiment de solution qui tienne la route", assène-t-elle.

AFP/VNA/CVN

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