La bataille stratégique des distributeurs de films

La distribution de films au Vietnam a dépassé la barre des 2.300 milliards de dôngs en 2015, devenant un secteur des plus convoités du moment. La concurrence féroce pousse les groupes à se réinventer, à coups d’exclusivités et de modèles d’affaires novateurs.

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La CGV est déjà propriétaire de 32 salles obscures au Vietnam, soit 40% du marché.

Le clap de fin est loin d’arriver pour le cinéma au Vietnam. Depuis cinq ans, la croissance annuelle du secteur varie entre 35% et 40%. Le chiffre d’affaires des salles obscures est passé de 1.850 milliards de dôngs (83 millions de dollars) en 2014 à 2.310 milliards de dôngs (105 millions de dollars) l’année suivante. Et selon les prévisions pour 2016, la croissance, même si elle connaît un certain ralentissement, atteindrait les 30%.

Avec de tels chiffres, l’industrie toute entière déroule le tapis rouge aux investisseurs, même étrangers, attisant un peu plus la concurrence. Deux groupes sud-coréens ont pris quasiment le contrôle du réseau d’exploitation cinématographique au Vietnam : la CGV est déjà propriétaire de 32 établissements, soit 40% du marché, et Lotte Cinema possède 25 salles obscures. Les cinémas BHD, Galaxy, Platinium Cineplex se partagent le reste. Bénéficiant d’un soutien financier bien plus important, les grands groupes peuvent acheter les droits pour les nouveaux films à gros budgets, leur permettant dès lors d’engranger un plus grand chiffre d’affaires.

Distribuer et diffuser, tendance deux en un

Si sur le marché mondial les distributeurs sont indépendants des entreprises exploitant les salles, au Vietnam il est tout à fait possible de jouer sur les deux tableaux, comme c’est le cas pour la CGV. En projetant les gros succès du box-office, le groupe s’assure d’attirer le plus grand nombre de spectateurs. Sur le plan stratégique, la CGV a établi des relations avec cinq des plus influents studios mondiaux, et est devenue le partenaire exclusif au Vietnam pour deux des plus grandes sociétés de distribution d’Hollywood, United International Pictures et Walt Disney Studios Motion Pictures International (ex Buena Vista International), ce dernier étant derrière les «blockbusters» Marvel, la nouvelle franchise Star Wars et les dessins animés Pixar. Environ 90% des films d’Hollywood sont passés entre les mains de la CGV, creusant encore un peu plus l’écart avec ses concurrents. Mais ces derniers n’ont pas dit leur dernier mot.

La plupart des salles obscures, notamment dans les grandes villes, n’ont rien à envier à celles des autres pays.

Récemment, huit producteurs et distributeurs des films domestiques (BHD, Galaxy, Skyline, Golden Media, Saigon Media, MVP, Early Risers et VAA) ont envoyé une pétition à l’Association vietnamienne de cinématographie, dénonçant les pratiques jugées déloyales de la CGV concernant la répartition du chiffre d’affaires. D’après leurs analyses, si un film vietnamien est distribué via la CGV mais projeté dans une salle de cinéma partenaire, la compagnie sud-coréenne s’adjuge 55% des recettes, et la salle de cinéma 45%. Mais si un film vietnamien est amené à être distribué par une autre compagnie, mais projeté dans un cinéma CGV, le taux s’inverse. Une situation qui va à l’encontre des pratiques internationales selon les pétitionnaires.

Arrivée salvatrice de nouveaux acteurs

Malgré la domination de CGV notamment sur les films étrangers, les distributeurs de longue date comme Phuong Nam Phim, Nghiêp Thang Media continuent d’élargir leurs activités et restent fidèles aux œuvres vietnamiennes. Depuis la mi-2015, de nouveaux noms ont même fait leur apparition, tels que Golden Screen Distribution et Green Media. Ce dernier, après six mois d’activité, a déjà distribué une quinzaine de films, au rythme donc de deux ou trois longs métrages par mois.

N’ayant pas le droit de distribuer les plus gros succès du box-office mondial, elles doivent miser sur d’autres sociétés de production et lorgner d’autres pays moins représentés sur la scène cinématographique internationale. «Si on arrive à bien défricher et exploiter ces nouveaux marchés, on trouvera des films commercialisables», affirme Dang Thu Hiên, directrice de Green Media.

D’après Huê Chi, représentante de la société BDH, la présence des nouveaux distributeurs depuis 2015 permet de changer la physionomie du marché et élever le niveau de compétition. «BHD est à la fois producteur et distributeur. Outre les oeuvres coréennes et japonaises, nous privilégions les films vietnamiens. Dans les temps à venir, BHD ouvrira de nouvelles salles à Hô Chi Minh-Ville et dans plusieurs autres villes et provinces, ce qui nous permettra de faciliter notre activité», annonce-t-elle.

Un optimisme qui semble être partagé par l’ensemble de l’industrie. «La participation dynamique des nouveaux distributeurs contribuera activement au développement du marché du cinéma vietnamien», conclut Nguyên Van Nhiêm, président de l’Association des distributions des films au Vietnam.


Linh Thao/CVN

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