G20 : derrière l’unité de façade, divisions sur la croissance et le FMI

Rien ne devait ternir la photo de famille du G20 réuni à Washington. Mais derrière l’unité de façade, les principales puissances économiques mondiales ont laissé entrevoir leurs divisions sur les stratégies de croissance et la réforme du FMI.

"Croissance" : c'était sans surprise le mot vedette du communiqué des ministres des Finances du G20 publié vendredi 11 avril. Quoi de plus consensuel que la volonté de doper l'activité économique et de créer des emplois.

Dans leur déclaration finale, les grands argentiers du globe ont réaffirmé l'objectif fixé fin février à Sydney de doper le produit intérieur brut (PIB) mondial de 2% sur les cinq prochaines années.

Photo de famille du G20

Mais les moyens d'y parvenir restent flous et les divisions sont apparues au grand jour vendredi 11 avril avec la charge du ministre des Finances australien Joe Hockey, dont le pays assure la présidence tournante du G20.

"Certains pays ont avancé des propositions réchauffées" et "inadéquates", a-t-il tonné lors d'une conférence de presse. Selon lui, des réformes structurelles "impopulaires" seront nécessaires, notamment en termes de concurrence et de "dérégulation".

À Washington, chaque pays a en réalité défendu son modèle et cherché à convaincre ses partenaires de s'en inspirer, au risque de freiner l'effort collectif. "On est très loin du compte", confirme une source diplomatique.

L'Australie, le Royaume-Uni mais aussi l'Allemagne penchent ainsi pour une politique de l'offre assumée.

Le patron de la très orthodoxe Bundesbank, Jens Weidmann, s'est félicité du fait que lors des réunions "l'accent a été mis sur les réformes structurelles, bien plus que cela n'était le cas auparavant". "Le besoin de réformes structurelles est commun à toutes les économies", a plaidé le Britannique George Osborne, sommant les pays émergents de "fortifier leurs fondamentaux".

Ces derniers n'entendent pas se laisser dicter la voie à suivre.

Le Brésil a estimé qu'il fallait aussi se préoccuper de la demande. Son ministre des Finances, Guido Mantega, a proposé de taxer davantage les hauts revenus et estimé qu'une classe moyenne plus aisée permettrait "de rééquilibrer la demande mondiale".

Les pays émergents, encore meurtris par de récentes turbulences financières, ont par ailleurs continué à mettre en garde contre "les risques" du retour à la normale monétaire aux États-Unis. Mais leur préoccupation n'a pas trouvé sa place dans le communiqué du G20.

Plan B

Les États-Unis ont ainsi échappé à une mise en cause implicite du changement de cap progressif de leur banque centrale. Mais ils n'ont pas été épargnés par un autre sujet de contentieux au sein du G20 : le retard de la réforme du Fonds monétaire international (FMI). Depuis plus de deux ans, le doublement des ressources du FMI et son rééquilibrage au profit des économies émergentes sont suspendus à une ratification du Congrès américain qui bute sur l'opposition des élus républicains.

Le retard passe d'autant plus mal que les États-Unis ont poussé le FMI à jouer un rôle moteur dans le plan d'aide à l'Ukraine.

Les pays émergents ne se sont pas dès lors pas privés de critiquer le statu quo imposé par les Américains.

«Le FMI ne peut pas rester paralysé et reporter ses engagements à se réformer», a souligné le ministre brésilien, assurant qu'il en allait de la crédibilité de l'institution. «Comment le FMI peut préconiser des réformes structurelles à ses Etats-membres s'il est lui même incapable de mettre en oeuvre ses propres réformes?», s'est-il interrogé.

«Profondément» déçus par ce nouveau retard, les ministres du G20 ont mis la pression sur les Etats-Unis, en assurant qu'un plan B devrait être envisagé si Washington ne franchissait pas l'obstacle d'ici à la fin de l'année.

Objet de tractations de dernière minute, ce nouveau délai doit permettre d'attendre le résultat des élections de mi-mandat en novembre aux Éats-Unis et de songer ensuite à ce «qui doit être décidé», a précisé le ministre des Finances japonais Taro Aso.

Les contours d'un plan B restent toutefois flous. La principale piste de travail consisterait à séparer le volet gouvernance de celui consacré aux ressources qui, lui, ne requiert pas le feu vert des États-Unis. Mais le FMI n'est pas encore convaincu par ce découplage.

«Notre institution ne doit pas passer au plan B avant d'avoir la certitude absolue que le plan A est définitivement enterré», a estimé sa patronne Christine Lagarde.

AFP/VNA/CVN 

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