Coronavirus
France : un budget de crise et un bilan humain toujours très lourd

Le gouvernement français a fait voter dans la nuit du 17 au 18 avril un budget de crise, déjà critiqué, pour tenter d'affronter la tempête économique et sociale causée par l'épidémie de COVID-19, dont le bilan augmente toujours à un rythme soutenu en dépit de signes encourageants dans les hôpitaux.

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Le pont d'envol du porte-avions français Charles de Gaulle, le 10 février 2020, au large des côtes chypriotes.

Face à l'épidémie qui a fait 18.681 morts dont plus de 7.000 dans les Ehpad et autres établissements médico-sociaux, le Premier ministre Édouard Philippe et le ministre de la Santé, Olivier Véran, donneront une nouvelle conférence de presse dimanche après-midi 19 avril. Ce lourd bilan, avec 761 morts de plus recensés depuis jeudi 16 avril, s'accompagne toutefois de signes d'espoir : pour le troisième jour consécutif, le nombre de personnes hospitalisées a baissé. Le nombre de personnes en réanimation est aussi en recul depuis neuf jours, à 6.027.

Dans le Grand Est, où une baisse des cas s'était déjà amorcée fin mars-début avril, les autorités ont fait état durant la semaine du 6 au 12 avril, et "pour la première fois depuis le début de l'épidémie", d'"une diminution du nombre des nouvelles hospitalisations, des admissions en réanimation et soins intensifs et des décès enregistrés en établissements de santé". Pour autant, la France, qui disposait de 5.000 lits en réanimation avant le début de la crise, reste "à un niveau exceptionnel des besoins" sur ce plan, a souligné le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, dont les bulletins quotidiens rythment l'évolution de l'épidémie.

Et les chiffres se font de plus en plus alarmants sur le porte-avions Charles de Gaulle : selon un dernier bilan encore provisoire, 1.081 des marins du navire et de son escorte, près de la moitié de l'équipage, ont été testés positifs. 24 sont hospitalisés, dont l'un en réanimation, et l'origine de la contamination reste inconnue.

"Responsabilité"

Avec les mesures de confinement, "nous avons fortement cassé cette épidémie", a toutefois assuré le Pr Salomon. Et "après le déconfinement", qui pourrait débuter le 11 mai, "les Français auront aussi cette responsabilité de freiner tout risque de diffusion virale", a-t-il insisté. La levée progressive de cette mesure inédite, qui aura duré huit semaines si elle s'achève effectivement à cette date, suscite toujours interrogations et une certaine défiance.

Pour couper court aux inquiétudes de millions de seniors, l'Élysée a assuré vendredi soir 17 avril qu'Emmanuel Macron "ne souhaite pas de discrimination" envers les personnes âgées et "en appellera à la responsabilité individuelle" de chacun à cette date. Mercredi 15 avril, le président du comité scientifique qui conseille les autorités, le Pr Jean-François Delfraissy, avait indiqué que les personnes "au-dessus de 65 ou de 70 ans" devraient rester confinées.

Autre sujet de crispations, l'annonce de la réouverture des crèches et établissements scolaires, à l'exception de l'enseignement supérieur, alors même que les grands rassemblements resteront interdits et les bars et restaurants fermés. Plusieurs élus locaux se refusent ainsi à rouvrir les écoles à cette date. La maire de Lille, Martine Aubry, a ainsi déclaré qu'elle ne "voyait pas" comment les écoles pourraient rouvrir.

Emmanuel Macron lors d'une vidéo conférence avec le Comité Analyse Recherche et Expertise (CARE) à l'Élysée, à Paris, le 16 avril.
Photo : AFP/VNA/CVN

Vendredi soir 17 avril, dans une décision attendue par de nombreux élus, le Conseil d'État a toutefois limité le pouvoir des maires dans la lutte contre l'épidémie. Selon la plus haute juridiction administrative, qui confirmait l'annulation d'un arrêté rendant le port du masque obligatoire à Sceaux, les maires ne peuvent prendre d'autres mesures que celles décidées par l’État dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, sauf "raisons impérieuses".

Loyers allégés

Si le pays est à l'arrêt, le gouvernement s'active pour qu'il ne soit pas mis à genoux par une récession que le ministre de l'Économie annonce comme la pire depuis la seconde guerre mondiale, avec une activité économique en chute libre. Après une demande de Bruno Le Maire en ce sens, les principales organisations de bailleurs ont appelé leurs adhérents à annuler trois mois de loyers pour les très petites entreprises qui ont dû fermer au début du confinement.

Et les députés ont voté un budget aux dépenses considérablement alourdies pour affronter la tempête économique et sociale provoquée par la pandémie. Ce second projet de loi de finances rectificative (PLFR), qui sera débattu mardi au Sénat, prend en compte l'enveloppe globale de 110 milliards d'euros annoncée par le gouvernement face à "l'urgence économique". Il prévoit un recul de 8% du Produit intérieur brut (PIB) en 2020, un déficit public d'environ 9,1% du PIB et une dette à 115%.

Il porte notamment à 24 milliards d'euros les crédits destinés à financer le chômage partiel, qui concerne désormais 9 millions de salariés, plus d'un sur trois. Mais ici aussi, les critiques commencent à se faire entendre. Côté politiques, c'est la question du "qui va payer" qui infuse. Côté société civile, plusieurs ONG de défense de l'environnement ont dénoncé "un chèque aux grands pollueurs sans conditions", avec des aides publiques qui pourraient bénéficier à des entreprises "qui contribuent fortement au dérèglement climatique".

"Ce ne sera pas un chèque en blanc", a rétorqué le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, dans l'hémicycle, conditionnant les montées au capital ou éventuelles nationalisations temporaires à "un effort de redressement et de compétitivité" ainsi qu'à "une politique environnementale ambitieuse". Un amendement LREM a été voté dans la nuit pour que ces entreprises soient "exemplaires" en termes de responsabilité sociale et environnementale, "en particulier en matière de lutte contre le changement climatique".

AFP/VNA/CVN

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