Euphorie des marchés malgré de sombres perspectives

Portés par l'espoir que les tractations en cours entre Paris et Berlin aboutiront à des solutions efficaces, les marchés se sont envolés le 28 novembre, faisant fi des sombres perspectives de l'OCDE qui a mis en garde contre une aggravation de la crise aux conséquences "dévastatrices".

Soudain euphoriques après de longues journées de dégringolade, les principales places de la zone euro ont bondi de plus de 4,5%, la Bourse de Paris gagnant même 5,46% à la clôture.

À Londres, l'indice Footsie-100 a progressé de 2,87% et à Wall Street, le Dow Jones a bondi de 2,59% et le Nasdaq de 3,52%.

L'euro s'appréciait aussi, valant 1,3318 dollar le 28 novembre vers 22h00 GMT contre 1,3240 dollar vendredi vers 22h00 GMT.

Les investisseurs ne se sont pas laissés décourager par les mauvaises nouvelles et les avertissements.

Pourtant, l'agence de notation Moody's a prévenu qu'une aggravation rapide de la crise menacerait les notes de tous les pays européens, même les plus solides. Et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié des prévisions drastiquement révisées à la baisse. La zone euro est, selon elle, déjà entrée dans une "légère récession", qui concerne particulièrement ses trois premières économies (Allemagne, France et Italie), et sa croissance devrait quasiment stagner l'an prochain.

Surtout, a-t-elle ajouté, une dégradation, probable, de la situation aurait des résultats "très dévastateurs", plongeant aussi dans la récession États-Unis et Japon.

L'OCDE s'est aussi invitée dans le débat européen en appelant la Banque centrale européenne (BCE) à "agir maintenant" pour endiguer la propagation de la crise - alors que Berlin refuse une telle solution, au grand dam de Paris.

Les investisseurs ont plutôt voulu croire que, face à la gravité de la situation, les gouvernements seraient bien obligés d'apporter des réponses qui tardent pourtant à se concrétiser.

Ils tablaient ainsi, malgré les démentis officiels, sur un assouplissement de la position allemande sur le rôle de la BCE, sur la création d'euro-obligations "d'élite" émises par les pays notés "AAA" pour financer l'aide aux États en difficulté, mais aussi sur une aide internationale imminente à l'Italie.

Rome a encore vu s'envoler le 28 novembre à des niveaux difficilement soutenables les taux d'intérêt qu'elle doit verser pour emprunter.

Selon la presse italienne, le nouveau gouvernement de Mario Monti négocierait une aide de 400 à 600 milliards d'euros avec le Fonds monétaire international (FMI), avec une participation éventuelle de la BCE. Cela devrait lui laisser 12 à 18 mois pour mettre en œuvre sa cure d'austérité sans subir la pression des marchés. Mais l'institution de Washington a catégoriquement démenti ces informations.

En Italie comme en Belgique, des appels aux citoyens pour qu'ils achètent de la dette locale ont rencontré un franc succès.

Propositions pour réformer les traités de l'UE

Alors que la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy doivent présenter avant le sommet européen des 8 et 9 décembre des propositions pour réformer les traités de l'Union européenne, les médias bruissent aussi de rumeurs sur leurs projets.

Le journal allemand Welt am Sonntag évoquait dimanche un nouveau pacte de stabilité réservé à quelques pays de la zone euro.

Paris et Berlin n'ont pas clairement précisé leurs intentions. L'Allemagne parle de sa volonté de "transformer la zone euro en une union de la stabilité", selon l'expression de son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble.

Côté français, le gouvernement a confirmé qu'un "pacte" était à l'étude, mais avec les 17 États de la zone euro, "pour une nouvelle gouvernance" avec de "vraies sanctions".

La clé serait un durcissement de la discipline budgétaire. La Commission européenne pourrait être dotée de "moyens plus intrusifs" pour "surveiller les mauvais élèves", a-t-on ajouté à Paris.

Officiellement, la révision "limitée" des traités proposée par le couple franco-allemand, éventuellement élargi à l'Italie, doit concerner l'ensemble de l'UE. "S'il y a des pays parmi les 27 qui font des difficultés", comme par exemple le Royaume-Uni souvent réticent à une intégration accrue, "on passe alors aux seuls 17 États de la zone euro", a expliqué un diplomate européen. Mais là aussi, "si un ou deux pays de l'Union monétaire ne veulent pas participer, on ne se laissera pas retenir par eux", a-t-il prévenu.

Selon une source européenne, "il faut savoir si c'est purement tactique afin de mettre la pression sur tous les pays de l'UE".

"Le but c'est de préserver l'unité de la zone euro", a toutefois mis en garde le 28 novembre la Commission européenne, rejetant toute option qui aboutirait à "fragmenter" l'Union monétaire.

AFP/VNA/CVN

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