Des archives secrètes sur la guerre en Afghanistan divulguées après une fuite

Un site internet a diffusé des milliers d'archives secrètes jetant une lumière crue sur la guerre en Afghanistan, avec des révélations sur les victimes civiles et les liens supposés entre le Pakistan et les insurgés, provoquant la colère de Washington et de ses alliés.

Au total, environ 92.000 documents remontant à 2004 ont été divulgués le 25 juillet après avoir été transmis au New York Times, au quotidien britannique The Guardian et à l'hebdomadaire allemand Der Spiegel. Pour le Guardian, ces documents brossent "un portrait dévastateur d'une guerre en train

d'échouer".

La publication de ces archives militaires par le site Wikileaks a provoqué la colère de la Maison Blanche. Mais le fondateur de ce site spécialisé dans le renseignement, Julian Assange, s'est justifié en affirmant que "le bon journalisme est controversé par nature".

Emanant notamment de l'ambassade des États-Unis à Kaboul, ces "rapports" font état par exemple d'une influence grandissante de l'Iran en Afghanistan, d'un soutien de Téhéran aux insurgés islamistes et d'une corruption à grande échelle qui contrarie la lutte contre la rébellion.

Le New York Times a souligné que ces archives illustrent "avec un luxe de détails les raisons pour lesquelles, après que les États-Unis ont dépensé presque 300 milliards de dollars dans cette guerre, les talibans sont plus forts qu'à tout autre moment depuis 2001".

Selon le Guardian, au moins 195 morts civils sont recensés dans ces archives, un chiffre "probablement sous-estimé" par rapport à la réalité.

La plupart de ces décès sont provoqués par des tirs de soldats nerveux à des postes de contrôle. Mais d'autres cas sont révélés comme celui d'un homme sourd-muet, abattu alors qu'il tentait de fuir une équipe de la CIA arrivée dans son village et qui lui avait demandé de s'arrêter.

Les allégations les plus sensibles visent le Pakistan, allié stratégique de Washington, accusé d'autoriser des membres de ses services de renseignement à traiter directement avec les talibans.

De son côté, le Pakistan a qualifié de "déplacée, fausse et contraire aux faits constatés sur place" la rumeur basée sur des fuites de 90.000 archives militaires selon laquelle les services de renseignement pakistanais entretiennent des liens directs avec les talibans en Afghanistan, ont rapporté le 27 juillet les médias locaux.

À Washington, le président de la commission de la Défense de la Chambre des représentants, Ike Skelton, a jugé les documents portant sur ce point comme "périmés".

Interrogé sur la collusion entre des éléments du renseignement pakistanais et les talibans mise en avant dans les documents, le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a préféré évoquer les progrès selon lui enregistrés avec Islamabad sur le dossier de la lutte contre l'extrémisme. Les pressions américaines ont "amélioré cette relation", même si "personne ne va dire que la mission est accomplie", a-t-il dit.

Les documents révèlent aussi que les talibans ont probablement utilisé un missile sol-air à guidage infra-rouge pour abattre un hélicoptère américain en Afghanistan en 2007, faisant 7 morts.

"Notre priorité c'est de regarder s'il y a des choses là-dedans qui peuvent mettre nos forces en danger", a réagi lundi le porte-parole du Pentagone Geoff Morrell. "Mais, clairement, nous voulons savoir qui a fait ça et s'assurer qu'il n'y a pas d'autres choses qui vont fuiter", a-t-il ajouté.

Le département d'État américain a du reste indiqué qu'une enquête avait été ouverte pour retrouver la source à l'origine de la diffusion des ces documents et estimer son impact sur la sécurité nationale.

Le porte-parole du ministère pakistanais des Affaires étrangères, Abdul Basit, a quant à lui affirmé que "ces informations sont biaisées, tirées par les cheveux, et n'ont évidemment rien à voir avec la réalité".

L'Allemagne a demandé lundi que ces révélations soient "examinées" tandis que Londres espère qu'elles ne vont pas "empoisonner" l'atmosphère en Afghanistan. Le Canada s'est dit "préoccupé" par la possibilité que les fuites "mettent en danger" la vie de ses militaires en Afghanistan.

AFP-XINHUA/VNA/CVN

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