L’ambassadeur Pham Sanh Châu (centre) lors d’une réunion en Éthiopie en décembre 2016, lorsque le dossier "Les pratiques liées à la croyance Viêt en les Déesses-Mères des Trois mondes" a été approuvé par les membres de l’UNESCO.
En tant que diplomate, il semble que la promotion de la culture soit devenue l’un des chevaux de bataille de l'ambassadeur Pham Sanh Châu, assistant du ministre des Affaires étrangères, envoyé spécial du Premier ministre sur les affaires de l'UNESCO. Ce n’est en effet pas seulement lors d’une réunion en Éthiopie en décembre 2016, lorsque le dossier "Les pratiques liées à la croyance Viêt en les Déesses-Mères des Trois mondes" a été approuvé par les membres de l'UNESCO, que l'ambassadeur Pham Sanh Châu est apparu en ao dài - avec un turban autour du crâne, soit la panoplie complète ! - mais aussi lors de nombreux événements diplomatiques importants. Il est toujours très fier de porter ce costume qui véhicule l’identité de son pays.
Un ambassadeur qui ne passe pas inaperçu
"J'essaie toujours de promouvoir l'image du Vietnam, pas pour moi mais pour mon pays. Parce que cette différence a un impact en termes de communication. Ainsi, je me rappelle que lorsque j’étais ambassadeur du Vietnam en Belgique, j'étais toujours en Une des journaux parce que je portais l’+ao dài+. Lors d’une réception, le roi de Belgique est même venu me serrer la main et m’a parlé longuement, bien plus qu’avec les autres ambassadeurs", a partagé Pham Sanh Châu. Il souhaite porter l’ao dài pour montrer aux amis internationaux que les hommes vietnamiens ont aussi une tenue traditionnelle. "Je voudrais également promouvoir la soie vietnamienne avec l’espoir qu'un jour, l'+ao dài+ en soie et sa fabrication puissent être reconnus patrimoine mondial", a-t-il confié.
L’ambassadeur, qui œuvre depuis près de 20 ans dans la diplomatie culturelle, a révélé posséder une quinzaine d’ao dài, de styles et de couleurs différents. Tous ont été conçus par la société de soieries Thai Tuân.
Chaque pays a son vêtement traditionnel : la République de Corée a son hanbok, le Japon son kimono et la Chine son hanfu. Pour beaucoup de touristes étrangers visitant le Vietnam, la beauté délicate de l’ao dài restera l’une des images les plus fortes gravées dans la mémoire.
Dans le passé, l’ao dài était porté aussi bien par les femmes que par les hommes. Mais lorsque les Occidentaux ont débarqué, notamment les Français, ils ont importé de nouveaux modes vestimentaires. Le costume traditionnel des hommes a laissé la place, du moins en ville, aux pantalons, chemises, vestons et chaussures en cuir.
Depuis une vingtaine d’années, le vêtement national est une question très débattue. Bien qu'il n'y ait pas de réglementation spécifique, chez les femmes, c’est l’ao dài qui a droit à ce titre. Chez les hommes, le choix entre vêtements européens ou ao dài est encore controversé. Peu d'hommes vietnamiens osent porter aujourd’hui l’ao dài, et ce même pour les occasions spéciales - sauf peut-être lors des fiançailles, pour donner un côté "rétro" à la cérémonie.
L’ambassadeur Pham Sanh Châu lors d’une réception donnée par le roi de Belgique à Bruxelles. |
Photo : PSC/CVN |
"La génération de mon grand-père et de mon père portait l’+ao dài+ avec un turban lors des cérémonies, a raconté le photographe Nguyên Huu Bao qui, âgé de plus de 70 ans, a vécu toute sa vie dans le Vieux quartier de Hanoï. Les Français ont apporté leur culture qui a changé la vie quotidienne des Vietnamiens. L’+ao dài+ masculin s’est trouvé relégué au rang des vêtement désuets, d’un autre temps".
Au cours de la dernière décennie, des dizaines de séminaires ont abordé le thème des costumes nationaux. Le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme a même lancé un concours de design sur ce thème. Les stylistes ont proposé de nombreux modèles... mais aucun n’a véritablement émergé. "Bien d'autres pays ont des costumes traditionnels pour hommes. Je pense qu'il est temps de discuter entre nous pour trouver celui des hommes vietnamiens. D’après moi, l’+ao dài+ masculin est le meilleur choix", a suggéré l’ambassadeur Pham Sanh Châu.
L’ao dài masculin pour les grandes cérémonies
Le groupe Dinh Làng Viêt regroupe des jeunes particulièrement sensibles à la préservation des patrimoines. Il a été créé en mai 2014 à l’initiative de Nguyên Duc Binh, chercheur en beaux-arts anciens. Ce groupe a fait des recherches sur les caractéristiques de l’ao dài d’antan. Lors du Têt traditionnel 2017, il a cherché à promouvoir l’ao dài masculin. Ainsi, tous les participants à la fête "Têt Viêt" tenue dans la maison commune du village de So, en banlieue de Hanoï, dont des ambassadeurs et représentants de délégations diplomatiques au Vietnam, ont porté l’ao dài. "Soyons fiers de notre si beau costume masculin traditionnel. Considérons-le comme un patrimoine à conserver et à valoriser !", a affirmé Nguyên Duc Binh.
D’après plusieurs peintres et spécialistes en culture traditionnelle, il faut que l’État reconnaisse l’ao dài masculin traditionnel comme la tenue nationale des hommes vietnamiens. "Les fêtes, le Têt, les mariages… sont des bonnes occasions pour le porter. C’est aussi une manière de promouvoir l’habitude de s’habiller de façon traditionnelle. Lors de la cérémonie de commémoration des rois fondateurs du pays, les dirigeants du Parti et de l’État devraient montrer l’exemple en portant l’+ao dài+", a suggéré le photographe Nguyên Huu Bao.
Quant à l'ambassadeur Pham Sanh Châu, il a exprimé le souhait qu'un jour, les vêtements traditionnels des hommes deviennent officiellement des costumes nationaux pour créer une identité vietnamienne visible et reconnaissable interna-tionalement. Avec l’espoir de rejoindre la liste déjà longue des patrimoines mondiaux reconnus par l’UNESCO.