Cô Têt : le raffinement de l’art culinaire de Hanoï

Le Têt traditionnel, ou Nouvel An lunaire, est une célébration majeure des Vietnamiens placée sous le signe de l’arrivée du printemps. C’est aussi le temps de mettre un plateau des plats, considéré comme l’âme du Têt, sur l’autel pour le culte des ancêtres.

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Les plats du "cô Têt" traditionnel.

Pour les Vietnamiens, le Têt est considéré comme le symbole du renouveau. Il s’agit du moment de transition entre l’ancienne et la nouvelle année. Où qu’ils soient, tous les membres de la famille se retrouvent pour "manger le Têt" et espérer ensemble la perspective d’une nouvelle année favorable et prospère. À cette occasion, on prépare souvent des plats savoureux pour la famille mais également pour les ancêtres, placés sur l’autel.

Cô Têt est le terme qui désigne le plateau des mets qu’on confectionne et pose sur l’autel des ancêtres pour leur rendre le culte. Plus la famille est aisée plus le cô Têt est rempli de mets en tout genre. Cependant, quel que soit la situation financière des familles, le cô Têt ne serait rien sans le bánh chung (gâteau de riz gluant farci de viande de porc et d’haricot poivrés de forme carrée), la gio lua (mortadelle vietnamienne) et le nem ran (rouleau impérial à la friture) et le xôi gâc (riz gluant au fruit gâc dont le nom scientifique est Momordica cochinchinensis). Ils’agit des plats traditionnels indispensables en cette période de l’année.

Pour les Hanoïens, le plateau des mets est la cristallisation d’une culture traditionnelle millénaire de la capitale. Le raffinement de l’art gastronomique de Hanoï est représenté dans chaque plateau des repas que les grand-mères et les mères confectionnent méticuleusement.

En particulier, un plateau de mets traditionnels du Têt devait inclure le fameux bánh chung, l’excellente gio lua, et l’indémodable xôi gâc.

Une partie de la culture millénaire

Le "bánh chung" est indispensable sur le plateau du "cô Têt".

La vue d’un tel festin peut être comparée à un tableau haut en couleurs illustrant les quatre saisons avec la couleur verte des feuilles de dong (phrynium) du bánh chung, la couleur rouge du xôi gâc ou encore la couleur dorée des nems à la friture… Tous les plats constituent une harmonie de parfum et de saveur.

Les Hanoïens confectionnent les mets avec afféterie et minutie. Leur élégance et leur raffinement se manifestent clairement dans la méthode de préparation des mets. Les plats symbolisent les quatre saisons, les quatre directions et constituent l’équilibre entre le ying et le yang, la chaleur et le froid. Ainsi, un plateau doit traditionnellement comporter quatre bols de potage et six assiettes.

Les quatre potages étant le canh mang (potage de pied de porc aux pousses de bambou), le canh bong (potage de légumes, crevettes et peau de porc soufflé), le canh nâm moc (potage mixte de champignons parfumés, œufs de caille et viande de porc en boulettes) et le canh miên (potage de vermicelles, abats de poulet et champignons noirs). Les six assiettes comprennent banhchung, gio lua, nem ran, xôi gâc, poulet bouilli et salade de la papaye vert (ou salade de légumes).

Pour les familles aisées, elles préfèrent ajouter au plateau du Têt une assiette de thịt đông (gelée de viande de porc), dưa hành (petits oignons blancs vinaigrés), ca kho (poisson mijoté à la vietnamienne) et chè kho (une sorte de marmelade pour le dessert faite à base de haricot mungo avec du sucre et des graines de sésame grillées) …

Une fois les phases de procuration de produits et d’ingrédients et de préparation achevées, les plats sont ensuite placés dans des bols spéciaux dédiés aux cultes et des petites assiettes de porcelaine d’un diamètre d’environ 12-15cm.

Le plateau de ces mets est généralement mis au milieu de l’autel, aux côtés du plateau à cinq fruits et des vases de chrysanthèmes ou de fleurs de pêchers. Tous ces objets, symboliques et incontournables du Têt, "offrent toujours à chacun une sensation agréable et familière", a confié Diêu Thuy, une jeune fille de Hanoï.

Préservation d’une belle tradition culinaire

On croit que la couleur rouge du "xôi gâc" apportera la chance pour le Nouvel An.

Pour les Hanoïens, la variété des mets représente la sincérité à l’égard des ancêtres. Il est donc important que les plats doivent être colorés et riches en ingrédients. Le choix des ingrédientset la préparation commencent environ un mois avant le Nouvel An. "À l’occasion du Têt, ma mère ainsi que mes grand-mères s’attèlent depuis un mois à la confection des mets pour le culte des ancêtres. Cette coutume est importante pendant le Nouvel An lunaire", a fait savoir Diêu Thuy.

Les légumes doivent être les plus frais possibles, les poulets doivent être nourris en plein air et le riz gluant pour faire le xôi gâc doit être de première qualité…

"Dans ma mémoire, le Têt traditionnel est une bonne occasion pour les femmes de la famille de présenter de nombreux plats savoureux. La préparation du +côTêt+ est un souvenir précieux que j’affectionne tout particulièrement. J’efforce de maintenir ces belles mœurs pour que les générations futures puissent mieux comprendre la culture du pays", a partagé Hà Linh, femme Hanoïenne vivant à l’étranger depuis plusieurs années.

Aujourd’hui, dans un monde qui va toujours de plus en plus vite, où chacun semble constamment pressé, la préparation des plats s’est vue énormément simplifiée. Presque tous les plats peuvent être trouvés dans les supermarchés, prêts à l’emploi. Sur le plateau des mets des familles modernes, on ne voit désormais plus que les "classiques" à savoir les nem ran, gio lua, canh mang, xôi gâc... Y figurent également des spécialités régionale sou encore des plats étrangers.

"Bien que le Têt d’aujourd’hui a notablement changé, il est nécessaire que nous conservions la beauté et l’âme du plateau des repas du Têt en transmettant les recettes de préparation à nos enfants. Cela nous permet ainsi de perpétuer les us etcoutumes du pays ainsi que de préserver la cuisine traditionnelle de nos ancêtres", a conclu Hà Linh.

Texte et photos : Thu Hà Ngô/CVN

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