 |
| Lê Huu Tuân en compagniede sa femme et de ses filles. |
Lê Huu Tuân est né en 1983 dans la commune de Dông Thinh du district de Dông Son (province de Thanh Hoa, Centre). À l’instar d’autres enfants, son enfance est marquée par les jeux populaires pratiqués dans le village.
Mais, en avril 1991, quand le petit Tuân entre à l’école primaire, il se plaint des jambes, qui le font atrocement souffrir. Inquiète, sa famille l’emmène alors voir le médecin du coin qui lui diagnostique une myélite (une inflammation de la moëlle épinière), qui le rend progressivement paraplégique. Loin d’être résignés, ses parents consultent un grand nombre de médecins réputés de la province et d’autres localités, jusqu’à Hanoi.
Dix années plus tard, Tuân n’a d’autre choix que d’accepter son sort. Une situation difficile à supporter et qu’il vit, au début, comme une injustice, surtout lorsqu’il voit gambader ses camarades de classe. «J’ai beaucoup réfléchi sur ma situation. Mes parents, mes amis m’ont été d’une aide inestimable. Cela m’a aidé à surmonter la douleur de la maladie, à ne pas m’appesantir sur moi-même et à continuer d’apprendre», confie-t-il.
La maladie a été un coup d’arrêt dans l’apprentissage de Lê Huu Tuân. Mais même contraint à rester chez lui, il continue d’apprendre, seul, et assimile les connaissances du programme scolaire des 3e, 4e, 5e classes (équivalent CE2, CM1, CM2 en France, ndlr). Et de quelle manière ! Lorsque l’École primaire de Dông Thinh le convie à participer au concours de sélection des meilleurs élèves au niveau provincial, il remporte le 1er prix. Puis, il réussit le concours de fin d’études du primaire. À la maison, il continue d’apprendre le programme de toutes les matières du collège. Et les efforts paient. Tuân, qui a bien grandi, parvient à entrer au lycée Dông Son 1. Baccalauréat en poche, il finit avec le meilleur total de points du concours d’entrée au Département des technologies de l’information de l’Université Hông Duc (province de Thanh Hoa).
Interrogé sur le «secret» de cette réussite, le jeune homme répond : «Pour bien apprendre, il ne faut jamais relâcher sa concentration».
Enseignant sans titre officiel
Après sa dernière année d’études à l’Université Hông Duc, le petit garçon devenu grand est envoyé par l’établissement à Hanoi afin de poursuivre des études au sein de la prestigieuse Université nationale de Hanoi. C’est là qu’il rencontre Nguyên Thi Linh, originaire du district de Tam Nông (province de Phu Tho, Nord). Admirant le courage dont il fait preuve face à son handicap, la jeune Linh tombe sous le charme et accepte de devenir son épouse. Le couple a aujourd’hui trois adorables petites filles.
Lê Huu Tuân se voit décerner en 2004 une des bourses Odon Vallet. Ces dernières sont remises chaque année par le professeur qui leur a donné leur nom via l’Association «Rencontres du Vietnam» à des élèves et étudiants pauvres mais brillants.
Il reçoit par la suite le satisfecit du ministre du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales pour ses excellents résultats d’études pour la période 2007-2009.
 |
| Le quotidien plein d’allant de M. Tuân. |
Titulaire d’un diplôme avec mention «Très bien» dans les technologies de l’information, Lê Huu Tuân rêve de devenir technicien ou enseignant dans la ville. Mais, son état l’en empêche. Il décide, avec sa femme, de regagner la terre qui l’a vu naître pour gagner sa vie. En 2005, il ouvre une classe de cours de soutien en mathématiques à l’attention de 20 lycéens qui préparent le Bac et le concours d’entrée universitaire, très exigeant. Là encore, la magie opère et ce n’est pas moins de treize de ses «disciples» qui sont admis à l’université.
Bénéficiant d’une réputation grandissante, de nombreuses élèves de la ville de Thanh Hoa, mais aussi d’autres districts voisins (Thiêu Hoa, Triêu Son) demandent à «Maître» Tuân de leur enseigner son savoir. En plus de neuf ans, cet enseignant sans titre officiel a ainsi aidé près d’un millier d’élèves à améliorer leurs connaissances et compétences en mathématiques et réussir le fameux concours à l’université. De plus, il s’occupe actuellement de plus de 500 petits, et les parents des élèves en difficulté n’ont à payer aucun frais d’étude.
En janvier 2014, le président de la République, Truong Tân Sang, a envoyé une lettre à Lê Huu Tuân pour doublement le féliciter d’apporter ses connaissances aux enfants et de faire preuve d’une telle force mentale pour surmonter son handicap. Dans cette lettre, le chef de l’État a écrit: «Votre esprit pour surmonter les difficultés, vivre de façon responsable avec la communauté est un exemple pour tous les jeunes Vietnamiens, notamment ceux dans les mêmes conditions que vous». Des mots qui ne peuvent faire que l’unanimité.
Quê Anh/CVN