Au défi d’une filière pharmaceutique nationale

Les médicaments traditionnels de mauvaise qualité pénètrent le territoire vietnamien sans déclaration douanière pour la plupart, malgré les mesures restrictives de l’État. Pour mettre fin cette situation, il est nécessaire d’utiliser les ressources du pays pour les fabriquer.

>>Matières premières médicinales : la qualité doit primer sur les affaires
Le pays possède de nombreuses régions ayant du potentiel pour cultiver les plantes médicinales. En réalité, certaines provinces s’y sont déjà mises et s’en servent pour fabriquer des médicaments traditionnels. Mais pour les distribuer à une échelle nationale pour la consommation courante, des politiques doivent être mises en place, en premier lieu pour inciter les exploitants agricoles et les entreprises à cultiver et à transformer ces plantes selon les normes requises.

Nguyên Công Phuc dans son jardin des plantes médicinales qui compte une centaine d’espèces, à Hô Chi Minh-Ville.


Selon le Docteur Trân Thi Hông Phuong, responsable adjointe du Département de gestion de la médecine traditionnelle, certains médicaments importés ont dans leur composition des plantes cultivées au Vietnam : les commerçants se procurent ces dernières pour les vendre à l’étranger. Et une fois les médicaments fabriqués, ils sont exportés au Vietnam à un prix bien sûr bien plus élevé que s’ils avaient été achetés directement sur le territoire.
Ce qui montre en tout état de cause que les plantes médicinales du Vietnam sont de qualité et peuvent concurrencer celles d’autres pays. La problématique est donc simple : Va-t-on continuer à importer des produits pharmaceutiques que l’on pourrait fabriquer au sein même du pays ? Avec les potentiels que possède le territoire, il faudrait remplacer progressivement les matières importées par celles plantées dans le pays.
Pour cela, il est nécessaire d’aménager des zones spécifiques pour que ces productions s’inscrivent dans la durée, comme par exemple dans les régions baignées par un climat tropical certes, mais plus fraîches en raison de l’altitude. Dans la ville de Dà Lat (province de Lâm Dông, hauts plateaux du Centre), on peut cultiver des plantes comme bach bô (stemona tuberosa lour), binh vôi (stéphana glabra), dang sâm (campanumoea javanica blume), hà thu ô (fallopia multiflora)... Dans les provinces de Long An, Tiên Giang, Dông Thap, An Giang (Sud), le climat est plus propice pour hoài son (rhizoma dioscoreae persimilis) ou cam thao (radix glycyrrhizae)...
Selon Lê Thi Dung, directrice de l’Hôpital de médecine traditionnelle Bên Tre, si l’on veut mettre en place ces grandes zones dédiées à la culture de plantes médicinales, il faut aussi s’intéresser aux débouchés pour éviter que l’offre ne dépasse la demande. Par exemple, la province de Bên Tre a une ferme de 20 ha, dont 5 ha sont réservés à la plantation de hoài son (rhizoma dioscoreae persimilis) que l’on n’arrive pas à vendre sur le marché. Il faut donc élaborer des politiques appropriées pour aider les agriculteurs et les entreprises spécialisées dans la culture de plantes médicinales, à travers divers moyens comme financement, infrastructures, diminution des taxes, soutien dans l’achat des variétés et des techniques...


Installer une filière complète
La priorité est donnée également à la construction d’usines de transformation des matières premières médicinales de qualité, avant de les vendre aux industries pharmaceutiques. Ainsi, on peut créer une chaîne de production bien fermée depuis la plantation au traitement. Trân Thi Hông Phuong estime qu’à l’heure actuelle, le processus de traitement préliminaire et de transformation effectué par certains établissements ne suit pas encore les normes du ministère de la Santé. La plupart des usines sont de petite taille avec des équipements rudimentaires et des conditions d’hygiène qui laissent encore à désirer.
Dans ce contexte, la compagnie pharmaceutique Mediplantex se pose en exemple. D’après Trân Binh Duyên, pharmacien et président du conseil d’administration, l’entreprise assure le traitement, la production et l’emballage de plus de 200 produits de qualité à partir de plantes médicinales. «Nous les vendons ensuite à des établissements sanitaires dans l’ensemble du pays. Aujourd’hui, comme nos confrères, notre préoccupation réside dans l’amélioration des chaînes de production. Nous avons donc besoin du soutien de l’État, pour construire de nouveaux ateliers de traitement», souligne-t-elle.
Par ailleurs, la mise en place d’un réseau stable et efficace au Vietnam permettrait le développement d’autres branches telles que la santé, la pharmacie, la nutrition, les denrées alimentaires, les biotechnologies, l’industrie de production d’épices, la parfumerie, ou encore les produits cosmétiques...

Texte et photos : Quang Châu/CVN


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