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Le titre VW s'est repris depuis sa dégringolade en septembre mais vaut toujours 23% de moins qu'avant le scandale. |
Quelque 3.000 actionnaires, dont beaucoup de têtes grises, étaient réunis au centre des expositions de Hanovre (Nord) pour la première assemblée générale du groupe allemand depuis l'éclatement de l'affaire des moteurs truqués neuf mois plus tôt.
De nombreux petits porteurs ont pris la direction à parti, mais dans une atmosphère policée. Pas de manifestations d'hostilité ou de débordements, comme ils peuvent ponctuer parfois ces grands rendez-vous.
Le patron du groupe aux douze marques (Volkswagen, Audi, Seat, etc.), Matthias Müller, avait tenté de désamorcer les tensions dès le début des débats en demandant, au nom du groupe, "pardon aux actionnaires d'avoir trahi leur confiance".
Le titre VW s'est repris depuis sa dégringolade en septembre dernier mais vaut toujours 23% de moins qu'avant le scandale. Le dividende proposé pour 2015, réduit à une peau de chagrin (0,17 euro par action de préférence) faute de bénéfices, a été jugé "ridicule" par Hansgeorg Martius, du groupement d'actionnaires SdK.
"S'occuper du passé"
Comme escompté, les petits actionnaires ont profité de l'occasion pour demander des comptes à la direction.
Un employé nettoie le sol autour d'une Porsche 911 lors de l'assemblée générale des actionnaires à Hanovre, le 22 juin |
M. Martius a exhorté Volkswagen à "s'occuper du passé" avant de se tourner vers l'avenir. M. Müller avait jugé qualifié un peu auparavant le scandale de "salutaire" pour le groupe, qui s'est récemment doté d'une stratégie à horizon 2025 mettant l'accent sur l'électrique et les services à la mobilité.
Jürgen Lindemann, habitué des assemblées générales de Volkswagen, n'attendait pas d'y voir plus clair d'ici la fin de la journée. "Le directoire va encore nous mentir", a-t-il déclaré, amer.
Le groupe a admis en septembre avoir trafiqué un logiciel installé sur 11 millions de véhicules dans le monde, afin de faire apparaître ces derniers moins polluants qu'ils ne sont vraiment.
Le scandale a déclenché une avalanche de poursuites judiciaires et demandes de dédommagement des autorités, des clients et des investisseurs.
Dernière en date, un cabinet d'avocats a déposé le 20 juin aux États-Unis une première plainte contre le constructeur émanant d'un détenteur de ses obligations. Elle pourrait ouvrir la voie à d'autres procédures du même genre en Europe, a prévenu le 22 juin une organisation néerlandaise qui veut négocier avec Volkswagen au nom de ses investisseurs à travers le monde.
"Faute collective"
Volkswagen a jusqu'à présent imputé la tricherie à un petit groupe de personnes. Dix salariés soupçonnés de manipulation ont été suspendus ou ont quitté l'entreprise.
Le PDG du groupe Volkswagen, Matthias Müller, lors de l'assemblée générale des actionnaires du groupe le 22 juin à Hanovre. |
Mais la justice allemande enquête depuis des mois sur l'affaire et vient d'étendre ses investigations à l'ancien patron Martin Winterkorn et à l'actuel directeur de la marque Volkswagen Herbert Diess, soupçonnés de manipulation de cours. Plusieurs organisations d'actionnaires, comme DSW et SdK, reprochent au mastodonte automobile d'avoir tardé non seulement à comprendre l'ampleur du problème, mais également à en informer les investisseurs.
Hans Dieter Pötsch, ancien directeur financier passé président du conseil de surveillance et qui présidait l'assemblée générale, était violemment attaqué par des actionnaires au micro, qui l'accusaient d'avoir "fermé les yeux" sur la manipulation des moteurs truqués.
Ulrich Hocker, président de la fédération DSW, s'est lui emporté contre ce qu'il considère comme "une faute collective" du groupe. Il demande, comme d'autres, une enquête spéciale sur les responsabilités. Il estime que celle du cabinet américain Jones Day, commanditée par la direction de Volkswagen et dont les conclusions n'ont pas encore été publiées, n'est pas assez indépendante.
Plusieurs petits porteurs comptent par ailleurs désavouer le directoire et le conseil de surveillance en refusant de donner quitus, c'est-à-dire d'approuver la gestion sur l'année passée.
Une défiance seulement symbolique, puisque les grands actionnaires se rangeront derrière les organes dirigeants. Les petits actionnaires ne détiennent que 11% environ des droits de vote, le reste appartenant aux familles héritières Porsche-Piëch (52% environ), à l'État régional de Basse-Saxe (20%) et à l'Émirat du Qatar via le fonds Qatar Holding (17%).