Près de 300 représentants d'administrations et d'organismes, d'entreprises, de l'Association de la pêche du Vietnam (Vinafish), et notamment du Fonds mondial pour la nature (WWF), ont participé le 27 juin à Hô Chi Minh-Ville à un séminaire consacré aux référentiels de l'aquaculture durable. Cette manifestation était placée sous le patronage de la VASEP, en collaboration avec le Département général des produits aquatiques du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, le WWF et Vinafish.
Ce colloque a eu lieu un jour avant l'inauguration de la foire-exposition Vietfish 2011, événement important du secteur de l'aquaculture du Vietnam, qui s'est tenue du 28 au 30 juin au Centre des foires et des expositions de Sài Gòn (SECC), dans cette même localité.
Selon un rapport du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, les exportations de produits aquatiques dégagent un chiffre d'affaires annuel de plus de cinq milliards de dollars, le poisson tra (pangasius) y participant à hauteur d'environ 1,4 milliard. Il est évident que cette espèce de poisson reste toujours dominante dans les exportations nationales de ce secteur car elle est très appréciée sur le marché mondial. Cependant, du fait d'une concurrence de plus en plus féroce, le poisson tra fait l'objet d'un ensemble de normes imposées par les importateurs, ce qui pose des problèmes aux entreprises vietnamiennes. "La VASEP espère trouver une position commune en terme de développement durable du pangasius", a affirmé lors de ce séminaire Duong Ngoc Minh, président du Comité des poissons d'eau douce de la VASEP.
Une Cendrillon qui se vêtit de nouveaux habits...
"Il y a 20 ans, le poisson tra était considéré comme +une fille au visage barbouillé+ qui était servi aux repas quotidiens des pauvres dans le delta du Mékong. Mais depuis, il est devenu +une belle princesse+ de l'aquaculture du Vietnam, avec une production de quelque 1,5 million de tonnes et des exportations de près de 1,5 milliard de dollars chaque année", a indiqué le prof.-Docteur Nguyên Huu Dung, vice-président de la VASEP.
En dix ans, de 2001 à 2010, le poisson tra a fait peau neuve. Il est actuellement élevé dans des étangs en eau profonde qui sont quotidiennement nettoyés, au lieu de cages flottantes sur des trains de bois comme auparavant. Les surfaces aquacoles ont été multipliées par cinq pour atteindre 6.000 ha, et le volume des exportations s'est accru de plus de 40 fois, passant de 17.000 à plus de 660.000 tonnes pour un chiffre d'affaires majoré de 35 fois, soit 1,4 milliard de dollars, contre 40 millions. Aujourd'hui, le pangasius vietnamien est présent dans 140 pays et territoires du monde.
Grâce à la pisciculture, bon nombre d'éleveurs ont fait fortune. Néanmoins, ce secteur a rencontré ces dernières années des barrières techniques en matière de qualité, d'hygiène alimentaire et d'environnement, et reçu parfois des informations erronées de divers organismes de certification... Il s'agit ici de divers critères de production qui doivent être respectés en fonction du marché considéré, sinon de chaque importateur, avec des normes aussi nombreuses que Global GAP, ASC, HACCP, GMP, SSOP, SQF-1000, ou BAP... Le premier problème qui en résulte pour les éleveurs comme les exportateurs vietnamiens est de savoir quelles normes suivre, d'autant que les différences entre chaque groupe de normes de certification ne sont pas toujours évidentes.
... Pour franchir les barrières techniques
En 1996, le Vietnam a organisé un premier colloque national sur les responsabilités du secteur de l'aquaculture dans la province d'An Giang (delta du Mékong) afin d'informer les éleveurs. De 2000 à 2005, de nombreuses formations en ce domaine ont également été dispensées par la VASEP, MOFI et le DANIDA.
De 2003 à 2005, la VASEP et SGS ont établi et suivi la norme SQF 1000 pour les poissons tra et basa issus des provinces deltaïques du Mékong.
D'après Jose Villalon, représentant du WWF des États-Unis, chaque marché a des exigences différentes pour le poisson tra. Selon des statistiques préliminaires, il existe à ce jour 23 systèmes de normes pour le seul élevage de ce poisson, et aucune norme commune n'est admise par les importateurs... Devant une situation aussi complexe, Jose Villalon a suggéré au Vietnam de suivre d'abord les normes de ses grands marchés comme les États-Unis et l'Union européenne (UE), c'est-à-dire le Global GAP (Good Agricultural Practice - Bonne Pratique Agricole) et l'ASC (Aquaculture Stewardship Council- normes destinées à la minimisation des principaux impacts environnementaux et sociaux associés à l'aquaculture).
Entre 2009 et 2010, bon nombre de fermes d'élevage de poissons tra et basa ont été certifiées Global GAP. Et le Vietnam compte actuellement 45 zones d'élevage de pangasius bénéficiant de cette certification.
En décembre 2010, la VASEP a signé un accord de coopération avec le WWF pour un développement durable de l'élevage de cette espèce de poissons suivant les normes ASC.
Aujourd'hui, le Vietnam recense 49 entreprises de transformation de tra et de basa en conformité au Global GAP ainsi qu'à d'autres critères de développement durable, ce qui représente 45% de ces entreprises au niveau national. Une centaine d'élevages et plus de 2.800 ha de bassins d'aquaculture - soit environ 40% de la superficie nationale pour le tra - sont également certifiés. "La plupart des entreprises et des élevages ont tendance à appliquer ces normes", a affirmé le Docteur Nguyên Huu Dung.
À cette occasion, Peter Hamaker, directeur de la compagnie Mayona B.V des Pays-Bas, qui est spécialisée dans l'importation de tra, a discuté avec exportateurs vietnamiens de la position des acheteurs et des consommateurs des marchés étrangers. Selon lui, les marchés d'Europe occidentale et septentrionale ont beaucoup évolué depuis l'an dernier, les exportateurs devant désormais garantir la qualité et la satisfaction des normes pratiquées par les supermarchés s'ils veulent introduire leurs produits dans la grande distribution. "Les grands distributeurs exigent une sécurité et une qualité alimentaires absolues pour un prix raisonnable... Ils coopèrent avec des ONG afin d'étudier les aspects d'hygiène alimentaire et d'environnement... Nous avons beaucoup discuté non seulement avec des ONG, mais aussi avec des organisations gouvernementales ainsi que des médias de ces pays, car la plupart d'entre eux ne connaissent que peu de choses du poisson tra, d'où de fâcheuses informations sur la transformation du poisson tra au Vietnam, notamment sur les produits chimiques employés, ce qui entraîne inquiétudes et perte de confiance du consommateur envers le poisson tra...", a expliqué Peter Hamaker.
Vers un développement durable
Ces dernières années, le secteur aquicole et plus particulièrement celui du poisson tra n'ont cessé de s'améliorer. Aujourd'hui, le pays possède environ 520 usines de transformation de produits aquatiques d'une échelle industrielle, dont 500 sont conformes à des normes de sécurité alimentaire telles que HACCP, GMP, SSOP. Et parmi les plus de 400 usines de congélation dont la capacité de production quotidienne cumulée est de 7.500 tonnes, 383 répondent aux nomes d'exportation en Europe, au lieu de 17 usines en 1999.
Quant à la stratégie de développement durable du poisson tra, le Docteur Pham Anh Tuân, un responsable du Département général des produits aquatiques du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, a souligné qu'une meilleure qualité est prioritaire, et ce de l'élevage à la transformation. "Il faut d'abord privilégier le développement des alevins qui actuellement répondent déjà aux demandes des éleveurs, mais il convient d'en améliorer encore la qualité", a-t-il affirmé. À cela, les administrations et organismes compétents en ce domaine doivent gérer plus strictement la qualité comme les prix des aliments pour poissons, ainsi que la propreté de l'eau des bassins d'élevage, de tels contrôles contribuant à limiter la pollution. "Le pangasius vietnamien occupe 95% des parts du marché mondial. Il faut donc faire en sorte qu'il réponde exactement aux demandes du marché, que ce soit en quantité comme en qualité", a insisté le Docteur Pham Anh Tuân.
* Selon la VASEP, le Vietnam a exporté 263.170 tonnes de pangasius lors des cinq premiers mois de 2011 pour un chiffre d'affaires de plus de 672 millions de dollars, soit une croissance en glissement annuel de 4,7% en volume et de 24,7% en montant. Selon les prévisions, son exportation devrait atteindre les 800 millions de dollars pour le premier semestre, soit le record des premiers semestres des précédentes années.
Le pangasius est un poisson de l'ordre des siluriformes. C'est un poisson d'élevage qui provient quasi-exclusivement du delta du Mékong. Vivant en eau douce mais aussi dans une eau faiblement saline, il ne peut survivre dans une eau dont le pH est inférieur à 4. La température idéale pour sa croissance est d'entre 25°C et 35°C.
Depuis le milieu des années 2000, le filet de pangasius hypophthalmus rencontre un vif succès sur les étals des poissonniers et des hypermarchés, notamment en raison de son prix compétitif, mais aussi de sa chair sans arêtes et au goût peu prononcé en faisant un poisson correspondant bien aux goûts du consommateur occidental. Avec la perche du Nil, ce poisson est l'un de ceux dont le prix d'achat est le plus abordable pour ce dernier.
Les Vietnamiens ont littéralement "lancé" cette nouvelle variété de poisson sur le marché mondial dans les années 1996-1997. Supportant une densité d'élevage record et grandissant très vite, toute une industrie est née lors des dix dernières années. Selon Nicolas Privet, spécialiste de l'élevage du pangasius, le bilan écologique est bon, principalement parce que son élevage nécessite un faible volume de farines de poissons pour la production de son aliment.
(Source : Wikipédia)
TRUONG GIANG/CVN