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Le prix des actions dans le rouge sur un écan à la Bourse de Sydney, le 9 mars |
Pour Christine Lagarde, qui a pris les rênes de l'Institut de Francfort début novembre, la phase d'observation est terminée : la voici confrontée à "un risque inconnu et sans précédent" pour la conjoncture, résume Carsten Brzeski, économiste chez ING. L'épidémie du COVID-19 a entraîné une telle panique sur les marchés que la Réserve fédérale américaine (Fed) a baissé ses taux de 0,50 point mardi 3 mars, sans même attendre sa réunion régulière, renouant avec son rôle de pompier pendant la crise financière de 2008-2009.
Loin de calmer les investisseurs, cette décision rapide les a plutôt confortés dans la crainte "d'un ralentissement économique ou même d'une récession", a constaté sur Twitter, Vitor Constancio, l'ex-vice-président de la BCE. Elle accroît néanmoins la pression sur la Banque centrale européenne, alors même que celle-ci dispose de marges de manœuvre réduites après avoir descendu ses taux au plus bas pour soutenir l'économie en zone euro.
Prêts ciblés
Christine Lagarde "poursuivra-t-elle la politique de Mario Draghi du +whatever it takes+ ?", s'interroge Carsten Brzeski, en référence à la promesse de l'ex-président de la BCE de sauvegarder l'euro "quoi qu'il en coûte" en 2012, face à la crise de la dette. Ou préférera-t-elle revenir à la prudence des premiers patrons de l'institut, MM. Duisenberg et Trichet, quand "l'option préférée de la BCE était d'attendre et de voir ?", ajoute l'économiste.
Pour l'heure, la BCE s'est bornée lundi dernier 2 mars à promettre des mesures "appropriées et ciblées" face à l'épidémie, sans préciser leur nature ni leur calendrier. Inhabituel dans le jargon des gardiens de l'euro, le terme "ciblé" laisse entendre "que l'aide en liquidités sera importante", estime Ken Wattret, Chief European Economist, IHS Markit.
Photo du logo d'un billet de 20 euros prise à Dortmund en Allemagne, le 27 janvier. |
Concrètement, une mesure inédite se dessine, précise Frederik Ducrozet, de Pictet Wealth Management : la BCE pourrait aider "les entreprises non-financières les plus touchées" par l'épidémie à boucler leurs fins de mois. Après les prêts géants bon marché accordés aux banques (TLTRO) depuis l'automne dernier, dont les conditions pourraient être encore assouplies, il pourrait s'agir de lancer un programme de prêts "pour les PME", indique une source proche de la BCE.
"Il existe des précédents de mesures de soutien régionales et ciblées dans des pays frappés par des catastrophes naturelles", observe M. Ducrozet, même si un tel instrument est complexe à mettre en œuvre en zone euro.
Appel aux États
Côté taux, les possibilités sont très limitées : le principal taux est à zéro, tandis que celui frappant les dépôts confiés par les banques est déjà négatif, à -0,50%, pénalisant depuis des années la rentabilité des établissements financiers. De nombreux économistes voient néanmoins la BCE abaisser le taux de dépôt à -0,60%, bien que l'institut fasse déjà l'objet de vives critiques, en particulier en Allemagne, où on l'accuse de spolier les épargnants.
Enfin, la BCE pourrait augmenter le rythme de ses rachats de dette sur le marché, réactivés depuis novembre 2019 à raison de 20 milliards d'euros par mois. Mais face à l'épidémie, Mme Lagarde devrait plus que jamais inviter les Etats à réagir, elle qui martèle que la politique monétaire ne peut pas tout faire. Le premier à réagir a été le gouvernement allemand, qui a annoncé lundi matin 9 mars un paquet de mesures afin d'éviter la récession à la première puissance européenne.
Recours facilité pour les entreprises en difficulté au chômage partiel ou déblocage d'une enveloppe supplémentaire de 12,8 milliards d'euros sur quatre ans pour des investissements d'infrastructure : ce paquet va toutefois moins loin que ce qu'espéraient les sociaux-démocrates du gouvernement. Ces derniers plaident en faveur d'un plan de relance en bonne et due forme.
AFP/VNA/CVN