Ce poète de l'enfance par excellence aime passionnément les lettres françaises, d'autant plus que son frère et mentor Pham Van Ky était poète et romancier de langue française, lauréat du Grand Prix de Francophonie de l'Académie française. Pham Hô m'a conté comment, grâce à un poète étranger vivant 100 ans avant lui, à une dizaine de milliers de kilomètres du Vietnam, il avait pu découvrir la mer et les gens de mer de son patelin Quy Nhon :
"Ma maison se trouvait à 300 mètres de la mer. De ma porte, je pouvais la voir, vaste miroir d'un bleu azure. Par les nuits calmes, je croyais pouvoir toucher le bruit des vagues.
J'avais 12 ans. En été, mes camarades et moi prenions un bain dans la mer avant de jouer au foot sur la plage. Le soir, nous nous amusions à attraper les crabes se cachant dans le sable.
Tard dans la nuit, nous dormions sur des nattes étendues sur la plage. Aux premières lueurs de l'aube nous nous levions pour voir les villageois pêcher au filet.
Parfois, assis devant ma maison, je regardais le disque solaire disparaître à l'horizon ou la lune se mirant dans l'eau. Telle avait été pour moi la mer jusqu'à ce qu'un jour...
Je me rappelle ce jour là comme si c'était hier. L'instituteur, M. Muc, nous expliquait Oceano nox de Victo Hugo à l'heure de lecture.
"O combien de marins, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines"
J'avais d'abord écouté ses explications comme d'ordinaire, attentif mais sans émotion particulière. Il parlait d'une voix douce et chaude :
Mais un instant après, je fus transporté dans un autre monde, inconnu et familier, lointain mais si proche serait-ce un rêve ?
Qui me parlait ? C'était la voix de mon maître, de Hugo, de l'océan, de la mer ou des gens de mer ? Rêve ou réalité, ici ou ailleurs ?
Couché sur le sable, je n'ai pu fermer l'œil cette nuit-là.
La voix de l'océan et du poète m'enivrait.
Dans le murmure des vagues, j'entendais des voix humaines. Soupirs d'une attente sans fin, sanglots du deuil des enfants, des mères, des fiancées, des vieux parents. Par la première fois de ma vie, je comprenais que là-bas, cet horizon n'était pas une simple ligne de démarcation entre le ciel et la mer, mais c'était l'immensité de l'espace et du temps. C'était aussi la démarcation entre la réunion et la séparation, la vie et la mort, c'était le reflet de la douleur et du courage de l'homme.
Assis sur ma petite natte, je rêvais ainsi face à la mer, bercé par les flots, quand vers l'horizon, clignotaient les faibles lumières des barques de pêcheurs de seiches.
Oceano nox de Hugo m'avait ouvert les secrets de la mer de Quy Nhon, ma province natale, m'aidant à comprendre et à aimer ses paysans pêcheurs auxquels la mer, mère et marâtre,
Đêm đại dương
Thương thay thủy thủ bao người
Giang hồ quen thói bể khơi vẫy vùng
Những đêm giông tố hãi hùng
Mịt mù mây phủ lạnh lùng sương sa
Liều thân lìa cửa lìa nhà,
Bỏ thân đáy bể xót xa một đời
Biết bao thủy thủ những người
Phong ba một phút dập vùi như không
Những đêm tăm tối mịt mùng
Ba đào cuốn xác cuồng phong dìm thuyền
Trầm luân trong cõi u huyền
Trùng dương thăm thẳm cửu tuyền đâu đây
Ai hay số kiếp đọa đầy
Nổi chìm theo nước đọa đầy nông sâu
Mênh mông bể thẳm một màu
Nắm xương lăn lóc biết đâu là bờ
Quê hương bác mẹ mong chờ
Xương tan thịt nát bao giờ gặp con
Tình xưa lâu cũng hao mòn
Kẻ ham ngư phủ người còn điền canh
Những đêm giông tố tung hoành
Bơ vơ quả phụ một mình ngóng trông
Đêm khuya nương bóng cô phòng
Mái đầu điểm tuyết tấm lòng thắm son
Mênh mông bể thẳm sóng cồn
Bốn phương tinh vệ nay hồn về đâu
Não người tựa cửa khấn cầu
Nước non bao chuyện thảm sầu mà kinh
Ngọn trào non bạc dập dình
Tiếng nghe ai oán thâm tình sóng ơi.
Huu Ngoc/CVN
25/12/2010