>>Ouverture de nombreuses fêtes traditionnelles
Gióng est l’un des quatre Génies immortels du Vietnam. |
Depuis une dizaine d’années, le Génie Gióng (Thánh Gióng), baptisé son Altesse Royale céleste de Phù Dông (Phù Dông Thiên Vuong), est le Saint patron d’un vaste mouvement de gymnastique et de sport qui mobilise des millions d’élèves dans les écoles et les collèges du pays et qui aboutit tous les quatre ans aux Olympiades scolaires nationales Phù Dông (Hôi khoe Phù Dông). Cette manifestation, qui pourtant ne concerne que les enfants, est aussi populaire que le Sokol tchécoslovaque d’avant-guerre. Elle est organisée conjointement par le ministère de l’Éducation, le Département général de la gymnastique et des sports et l’Union de la jeunesse communiste Hô Chi Minh.
Son objectif est d’assurer aux jeunes générations une bonne santé physique et morale et de leur permettre de pratiquer des exercices véritablement culturels. De plus, les compétitions sportives (athlétisme, gymnastique artistique, volley-ball, ping-pong, natation, sports traditionnels : plumfoot, lutte libre…) et artistiques (mouvements d’ensemble, danses et chants collectifs…) permettent de déceler les futurs champions méritant un entraînement en vue d’épreuves nationales ou internationales.
Quatre fêtes dans quatre villages
Le succès des quatre premières Olympiades scolaires Phù Dông (Hanoï 1983, Hô Chi Minh-Ville 1987, Dà Nang 1992, Hai Phong 1996) ne signifie nullement que les fêtes traditionnelles de Gióng soient mises en veilleuse. Bien au contraire, elles connaissent un renouveau incontestable depuis une décennie, dans le sillage d’une renaissance religieuse et spirituelle, naturelle après les longues épreuves de la guerre.
Chaque année, quatre fêtes ont lieu dans quatre villages suburbains, retraçant la vie et le combat du guerrier Gióng chassant l’envahisseur : la fête du village de Phù Dông (naissance du héros, enfance, départ pour la guerre), la fête de Xuân Dinh (halte en cours de route pour se désaltérer), la fête de Sóc Son (après la victoire, envol vers le ciel avec son cheval de fer), et la fête de Chi Nam (le héros revient sur terre pour sauver le peuple d’un monstre marin).
Fête du Génie Gióng dans le village de Phù Dông, en banlieue de Hanoï. |
Photo : Danh Lam/VNA/CVN |
La plus grande fête est celle du village de Phù Dông, sur l’autel de la rive du fleuve Rouge, qui commence le 9e jour de la 4e lune. On fait appel à des centaines de gens pour la reconstitution de la bataille contre les ennemis Ân. Les participants, surtout les femmes travesties en guerriers Ân, et les commandants (hiêu) sont sélectionnés avec soin et astreints à de rigoureux interdits.
Le 6e jour du 4e mois, une procession porte l’eau du puits devant le Temple de la Déesse Mère (đên Mâu) au Temple du Génie. Le 9e jour, au cours de la cérémonie du sacrifice, ont lieu les chants et danses sacrés du quartier (phuong) d’Ai Lao. Ensuite, se déroule la danse des oriflammes qui évoque symboliquement l’évolution du combat. Les 10e, 11e et 12e jours sont organisées les cérémonies des drapeaux, de la victoire et du sacrifice au Ciel et à la Terre. Mentionnons encore de nombreuses réjouissances populaires (combats de coqs, échecs, balançoire, etc.)
Ainsi, les fêtes traditionnelles de Phù Dông, tout comme les nouvelles Olympiades scolaires homonymes, se réclament du Génie Gióng dont les exploits remontent à l’époque de la formation de l’identité nationale du Vietnam (1er millénaire av. J.-C., âge du bronze-fer).
La légende en deux mots
Sous le règne du 6e roi Hùng Vuong, une vieille fille du village de Gióng pose par hasard son pied sur la gigantesque empreinte d’un pied divin et donne naissance à un enfant. Pendant trois ans, le garçonnet ne parle pas, étendu sur son lit.
À cette époque, les envahisseurs venus du Nord, les Ân, ravagent le pays. Un jour, le héraut royal traverse le village pour mobiliser l’aide du peuple. À peine les porte-voix se sont-ils tus que le bambin se lève et déclare qu’il va combattre l’ennemi. Il mange comme quatre, grandit très rapidement et demande au roi une cuirasse, un chapeau et un cheval de fer. Il fonce sur l’ennemi et l’extermine. Son fouet de fer étant brisé, il arrache sur son passage des bambous pour s’en faire des armes. Après la victoire, il s’envole sur son coursier vers le ciel. Son culte est perpétué à Gióng et dans de nombreux autres endroits.
Cette légende est le premier écrit à exalter la lutte contre les envahisseurs étrangers, une constante dans l’histoire du Vietnam. Le Génie Gióng inaugure la lignée de ces héros défenseurs du pays, dont les noms (les sœurs Trung, la Dame Triêu, Lê Loi, Lý Thuong Kiêt, Trân Hung Dao, etc.) désignent aujourd’hui les rues principales de Hanoï et de bien d’autres villes.
Certains mythologues voient dans la légende de Gióng la cristallisation des joies et des peines, des peurs et des aspirations de la communauté primitive des Viêt, sans cesse harcelée par les aléas climatiques et les invasions venues du Nord. Les fêtes traditionnelles de Phù Dông seraient donc un amalgame du culte de la fertilité (quête de la pluie, indispensable au riz) et de celui du guerrier invincible.