Le Premier ministre pressenti, le socialiste francophone Elio Di Rupo, a semble-t-il gagné un pari risqué. Le 14 septembre au matin, il avait claqué la porte des négociations et fait état dans un communiqué amer du "blocage total" des discussion en vue de former un gouvernement de plein exercice, 458 jours après les législatives du 13 juin 2010.
La tension était encore montée d'un cran lorsque le roi Albert II est rentré à Bruxelles, interrompant précipitamment ses vacances en France pour suivre d'au plus près l'évolution de la situation politique dans son pays.
Les présidents des huit partis flamands et francophones associés aux discussions se sont donc remis autour de la table en début d'après-midi dans une ambiance très lourde. Mais en début de soirée, des signes de détente sont apparus, Flamands et francophones faisant des pas les uns vers les autres. Et, peu avant minuit, les huit négociateurs ont annoncé avoir franchi une "première étape décisive" vers une sortie de crise. "Les 8 partis ont réussi à franchir ensemble les obstacles qui ont créé les difficultés de ces derniers jours. Ils ont pu dégager un consensus sur les divers aspects relatifs à +BHV+", l'arrondissement électoral bilingue de "Bruxelles-Hal-Vilvorde", le seul de Belgique, réunissant la capitale du pays et sa banlieue en Flandre, ont-ils indiqué dans un communiqué conjoint.
Cette question est au cœur du contentieux entre Flamands et francophones. Les premiers réclament depuis des années sa scission afin de mettre fin à des droits linguistiques, électoraux et judiciaires spéciaux dont bénéficient les seconds dans la périphérie flamande de Bruxelles.
Les quelque 130.000 francophones installés dans le pourtour de Bruxelles sont ainsi autorisés jusqu'ici à voter pour des partis francophones de la ville lors des élections législatives. "Même si le travail est encore loin d'être terminé et que de nombreux débats doivent être menés, l'étape franchie ce jour sur +BHV+, la réforme du Sénat et le vote des Belges à l'étranger constitue un pas important", ont ajouté les négociateurs.
Le communiqué ne donne aucune précision sur le contenu de cet accord. Selon des éléments du compromis dévoilés par les médias belges, les Flamands obtiendraient la scission de l'arrondissement bilingue, en échange de fonds supplémentaires pour Bruxelles, ville francophone dont les finances sont exsangues.
Seuls les francophones vivant dans six communes jouxtant directement Bruxelles pourront encore à l'avenir voter pour des candidats francophones de la capitale aux législatives. Mais une "communauté urbaine" englobant Bruxelles et sa périphérie serait créée, ce qui n'isolerait pas totalement en Flandre les francophones qui y résident.
Selon le communiqué, les travaux reprendront le 15 septembre dans l’après-midi sur d'autres points importants à régler : le transfert de nouvelles compétences vers les régions, réclamée par la Flandre, et une refonte du système de financement des régions et de l'État fédéral.
Si tous ces obstacles sont franchis, il faudra encore définir le programme socio-économique de la future coalition pour qu'un gouvernement de plein exercice voit enfin le jour.
Depuis avril le pays est dirigé par un gouvernement chargé de gérer seulement les affaires courantes. Une situation extrêmement inconfortable en pleine crise de la dette de la zone euro.
AFP/VNA/CVN