Anti-terrorisme
Valls dit non à l'extension de la déchéance de nationalité à tous les Français

Face à une exaspération croissante à gauche sur le "feuilleton" de la déchéance de nationalité, le Premier ministre Manuel Valls s'est employé le 6 janvier à clarifier le débat en fermant la porte à la déchéance pour tous, alors que l’ex-président Nicolas Sarkozy a fixé les conditions du vote de la droite.

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"Il y a une condition qui doit être très claire : la France ne peut pas créer des apatrides, c'est-à-dire des personnes sans nationalité", a déclaré le Premier ministre lors d'un entretien à BFMTV depuis Matignon.

"Cela, ça n'est pas possible. Ça ne serait pas conforme à l'image, ni aux valeurs, ni surtout aux engagements internationaux de la France (...), je veux être là-dessus extrêmement clair", a-t-il poursuivi.

Le Premier ministre français Manuel Valls à l'Assemblée nationale le 16 décembre 2015.

L'exécutif, conformément à une annonce du président François Hollande trois jours après les attentats du 13 novembre qui ont fait 130 morts, entend constitutionnaliser l'état d'urgence et inscrire dans le texte la possibilité de déchoir de leur nationalité les Français binationaux définitivement condamnés pour actes de terrorisme.

Face à une critique dénonçant une discrimination entre les Français avec une seule nationalité et les autres, l'idée était née chez certains d'étendre la possibilité de déchoir tous les Français pour terrorisme, quitte à contrevenir à des conventions internationales. Le secrétaire d'État au parlement, Jean-Marie Le Guen, avait indiqué le 4 janvier que cette piste était "dans le débat".

Le 6 janvier, dans une tribune publiée par l'Observatoire, le Premier ministre avait déploré les "faux débats" sur ce sujet de la déchéance, en défendant une mesure d'"une grande portée symbolique" qui "ne porte pas atteinte au droit du sol, ni à la binationalité".

Dans la journée, Les Républicains, qui ont débattu du sujet en bureau politique, avaient aussi pris la majorité à revers en s'opposant à cette hypothèse d'une déchéance pour tous. Ils se sont prononcés en faveur de la révision constitutionnelle mais en y adjoignant des "demandes".

L'ancien chef de l'État, Nicolas Sarkozy, veut notamment que la déchéance puisse être prononcée, non seulement pour des crimes terroristes, mais également les délits liés au terrorisme. Et que la déchéance soit prononcée après la première condamnation, et non pas la condamnation définitive.

Manuel Valls a affiché le soir du 6 janvier une certaine ouverture sur ces demandes, rappelant que le texte initial de l'exécutif prévoyait la déchéance pour les crimes et les délits terroristes, mais que le Conseil d'État avait estimé qu'elle devait être réservée aux seuls crimes, pour ne pas rendre la sanction disproportionnée.

Quant à la déchéance dès la première condamnation, l'expulsion du territoire français ne pourra de toute façon avoir lieu qu'au terme de la peine, souvent très longue, a-t-il souligné.

"Très large majorité"

Le projet de révision constitutionnelle est attendu à l'Assemblée à compter du 4 février. Il devra ensuite être examiné au Sénat. Son adoption est soumise à une majorité qualifiée de 3/5e du parlement réuni en congrès.

Sur BFMTV, M. Valls, s'est dit convaincu que la révision de la Constitution serait adoptée "à une très large majorité", assurant aussi qu'il ne voulait en aucun cas "faire exploser la gauche".

Celle-ci s'est pourtant déchirée sur le sujet, poussant le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, à dire dans la matinée que "le feuilleton doit cesser".

"Faut-il l'union nationale contre le terrorisme? Réponse : oui. Faut-il mettre dans la Constitution l'état d'urgence? Réponse : oui. Faut-il dénier le droit d'être Français aux terroristes qui nous dénient le droit d'être Français? Réponse : oui. Faut-il qu'il y ait des discriminations entre Français? Réponse: non, pas de discrimination entre les Français. Faut-il qu'il y ait des apatrides? Non", a énuméré M. Cambadélis.

Il a appelé à faire "un texte de trois lignes" résumant ces cinq points pour "se débarrasser de cette question" qui occulte selon lui le volet essentiel de la réforme constitutionnelle, l'inscription de l'état d'urgence dans la Constitution, complètement évacué du débat politique.

AFP/VNA/CVN

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