L'avionneur européen a enregistré 640 commandes nettes depuis le début de l'année, un chiffre qui a explosé le mois dernier avec une moisson de centaines de commandes au Bourget. Les compagnies ont applaudi le choix d'Airbus de lancer une version remotorisée de son moyen-courrier A320 : l'A320 Neo a accumulé plus de mille commandes depuis son lancement en décembre dernier.
Du coup, le constructeur dispose d'un carnet de commandes record, avec plus de 3.930 avions encore à livrer aux compagnies aériennes, soit sept ans de production au rythme actuel.
Une nouvelle toutefois accueillie sans triomphalisme au siège de Toulouse (Sud-Ouest de la France). "Il va falloir travailler, beaucoup travailler pour sortir ces avions", jugeait-on de source syndicale, à l'issue d'un comité central d'entreprise (CCE).
Le revers de la médaille est aussi que les compagnies doivent attendre des années pour recevoir leurs appareils. "Airbus a tellement de commandes que son problème est de savoir comment augmenter la cadence de production", souligne ainsi le directeur général d'Air France-KLM, Pierre-Henri Gourgeon, dans un entretien. "Une des difficultés d'Airbus est qu'ils ont tellement de succès qu'ils ne peuvent pas livrer des avions en réponse à notre demande avant 2018", se plaint ainsi le dirigeant, qui doit prochainement passer une commande pour des long-courriers.
Airbus se creuse la tête pour produire suffisamment sans risque de surchauffe. L'avionneur sortira 42 moyen-courriers par mois fin 2012 et songe sérieusement à passer à 44. Mais il s'interroge encore sur la capacité des sous-traitants à suivre ce rythme infernal.
Il faudra aussi réussir le lancement de l'A320 Neo, livré à partir de 2015, même si cet appareil demandera peu de modifications de structure par rapport à la version actuelle du moyen-courrier. Mais le programme qui cause vraiment des insomnies aux dirigeants du groupe toulousain est le futur long-courrier A350, dont la première livraison est prévue officiellement fin 2013. Cet appareil majoritairement construit en matériaux composites, destiné à concurrencer les Boeing 787 et 777, pose de "gros défis", selon les termes d'Airbus.
Le calendrier de deux versions ultérieures du long-courrier - l'A350-800 et l'A350-1000 - a d'ailleurs déjà glissé de près de deux ans.
Ces défis industriels coïncident aussi avec des changements à la tête de l'avionneur et de sa maison mère EADS l'an prochain.
Au printemps prochain, le président exécutif d'EADS, Louis Gallois, doit être remplacé par un Allemand -vraisemblablement l'actuel patron d'Airbus, Thomas Enders, qui doit lui-même laisser son siège à un Français. Fabrice Brégier, le numéro deux de l'avionneur, fait figure de candidat naturel pour prendre la tête d'Airbus.
Arnaud Lagardère a pour sa part indiqué vouloir prendre la présidence du conseil d'administration d'EADS l'an prochain, alors même que son groupe veut se désengager à terme du groupe d'aéronautique et de défense.
Chez EADS, on veut croire que ces chaises musicales ne créeront ni turbulences, ni retour des guerres de clans qui avaient déchiré le groupe il y a quelques années.
Louis Gallois assure ainsi qu'il n'y aura pas "de changement suffisamment profond pour avoir un effet déstabilisateur sur l'entreprise". "Je pense que la transition est bien préparée, bien organisée; elle ne devrait pas poser de problème particulier", poursuit-il. En ajoutant qu'il ne lui appartient pas de nommer son successeur.
AFP/VNA/CVN