Conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui s'est tenue du 3 au 6 décembre sur l'île indonésienne de Bali |
"Le jour va être long", a averti Keith Rockwell, le porte-parole du directeur de l'OMC, évoquant la possibilité que la ministérielle, qui devait originellement s'achever vers 15h00 (07h00 GMT), puisse être prolongée, peut-être même jusqu'à samedi matin 7 décembre. "Des progrès ont été faits dans la nuit", a-t-il ajouté, mais un accord sur un nouveau texte n'a pas été conclu.
Le ministre indien du Commerce, Anand Sharma, a ainsi répété que l'Inde "ne cèderait jamais sur le droit à la sécurité alimentaire", pomme de discorde. New Delhi veut faire abolir le plafond imposé par l'OMC aux subventions agricoles, dans le cas où ces dernières serviraient à la mise en œuvre de programmes alimentaires. L'Inde, disant parler au nom des 46 pays en développement du G33, veut offrir à prix artificiellement bas des denrées alimentaires de base à près de 800 millions de pauvres.
Les États-Unis, fervents opposants, ont proposé un compromis qui consisterait à offrir une "clause de paix" de quatre ans, selon laquelle aucune sanction ne serait recherchée contre les pays qui dépassent le plafond de subventions pour un programme de sécurité alimentaire. Mais l'Inde a rejeté ce compromis, qui aurait pu permettre un accord, même a minima, et ainsi sauver une OMC menacée d'obsolescence. New Delhi exige que la "clause de paix" soit en vigueur jusqu'à ce qu'une solution permanente soit convenue et non pour quatre ans seulement.
"Justice pour les pauvres et ceux qui ont faim"
L'Inde est parfois accusée de prendre en otage les négociations, mais le ministre Sharma a refusé de porter le blâme d'un possible échec. "Nous tentons simplement d'obtenir justice pour les pauvres et ceux qui ont faim dans le monde".
"Nous parlons", a-t-il ajouté en s'engouffrant dans une salle de réunions. Il a plus tard évoqué la possibilité qu'il repousse son départ, prévu à 08h00 GMT, confirmant la poursuite d'un intense ballet diplomatique afin de tenter d'obtenir un accord à l'arraché.
Le ministre indien du Commerce, Shri Anand Sharma (centre), à son arrivée à la conférence de l'OMC à Nusa Dua (Bali), le 6 décembre |
Les réunions se succédaient, en particulier en présence des États-Unis et de l'Inde, les deux pays qui détiennent la clef pour sortir de l'impasse.
Un diplomate engagé dans les négociations a indiqué qu'un accord avait été sur le point d'être conclu, mais que l'Inde avait finalement rejeté un nouveau compromis. "Il y a eu une possibilité d'accord dans la nuit (du 5 et 6 décembre) mais malheureusement, une partie a décidé de poursuivre les discussions", a-t-il dit sous couvert de l'anonymat, en référence à l'Inde.
La ministérielle, perçue comme une réunion de la dernière chance, tente d'arracher un accord sur le "paquet de Bali" qui doit être adopté à l'unanimité des 159 États membres. Cet ensemble de mesures a minima, surnommé un "Doha light", est présenté comme un moyen de relancer les négociations sur l'ouverture du commerce mondial, paralysées depuis leur lancement en 2001 à Doha, capitale du Qatar.
De nombreux responsables ont averti qu'un nouvel échec à Bali, après quatre réunions ministérielles vaines depuis le lancement du cycle de négociations de Doha, sonnerait le glas de l'OMC, au moins sous sa forme actuelle, voire du multilatéralisme en général.
Preuve que le régionalisme l'emporte de plus en plus sur le multilatéralisme, les ministres du Commerce des douze pays participant au projet de Partenariat transpacifique, soutenu par les États-Unis, devaient s'envoler ce vendredi 6 décembre pour Singapour, où doit se tenir une réunion visant à faire signer cet accord de libre-échange d'ici à la fin de l'année.
AFP/VNA/CVN