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Le secrétaire d'État américain John Kerry (gauche) et son homologue russe Sergei Lavrov, le 9 septembre |
Cette réunion, qui doit commmencer à la mi-journée à Lausanne, se tient dans une atmosphère particulièrement tendue entre la Russie et les Occidentaux. Ces derniers accusent Moscou de "crimes de guerre" à Alep (Nord de la Syrie), dont les quartiers Est, tenus par les rebelles, sont soumis à un déluge de feu depuis le 22 septembre. Elle intervient aussi à un moment où de nombreux diplomates et experts jugent possible une reprise de la deuxième ville syrienne par le régime du président syrien Bachar al-Assad, ce qui constituerait un tournant majeur depuis le déclenchement du conflit en 2011.
La rencontre ne vise pas à un résultat immédiat mais à étudier des idées pour parvenir à une fin des hostilités, a expliqué dans la nuit un responsable américain accompagnant le secrétaire d'État John Kerry.
Les États-Unis, qui ne veulent plus traiter la question syrienne en tête à tête avec Moscou, désirent avoir à la table des discussions les pays régionaux "qui ont le plus d'influence sur les événements sur le terrain", a expliqué ce responsable sous couvert d'anonymat. "Je ne m'attends pas à une annonce majeure à la fin de cette rencontre. Cela va être un processus très difficile", a-t-il toutefois ajouté.
"Je n'attends rien de spécial" de cette réunion, avait lancé pour sa part vendredi le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov. Même s'ils n'ont jamais rompu les contacts téléphoniques, c'est la première fois depuis fin septembre que MM. Kerry et Lavrov se retrouvent pour négocier.
La Turquie, l'Arabie saoudite et le Qatar, qui soutiennent la rébellion, seront présents.
Autre grand protagoniste du conflit, l'Iran, engagé militairement auprès de Damas, a annoncé vendredi soir 14 octobre sa participation.
L'envoyé spécial de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, sera également à Lausanne, tout comme des représentants de l'Égypte, l'Irak et la Jordanie. Mais les pays européens, particulièrement la France et la Grande-Bretagne qui ont dernièrement adopté une ligne dure envers Moscou, n'ont pas été conviés.
Des civils blessés dans les bombardements, le 13 octobre 2016 dans un hôpital d'un quartier d'Alep tenu par les forces pro-régime. |
Prendre Alep-Est à tout prix Que peut-il sortir de ces nouvelles négociations, alors que Moscou et Washington discutent depuis un an, ont organisé des dizaines de réunions et conclu deux cessez-le-feu qui n'ont jamais tenu plus de quelques jours ?
"On peut imaginer que les deux grandes puissances vont faire pression sur leurs alliés régionaux respectifs pour tenter d'arracher un accord de cessez-le-feu", estime Karim Bitar, de l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).
Mais selon lui, "les Russes sont en train de chercher à maximiser leur avantage avant qu'arrive le successeur de Barack Obama, probablement Hillary Clinton, qui aura sans doute la main plus ferme sur la Syrie" que l'actuelprésident américain.
"La violence des raids démontre qu'il y a une décision russe pour prendre Alep-Est à n'importe quel prix", juge de son côté Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Depuis le début de l'offensive contre la partie rebelle de la ville, où vivent 250.000 habitants, plus de 370 personnes, essentiellement des civils, ont été tuées, selon l'OSDH. Parmi les victimes figurent plus de 130 enfants, d'après l'ONG Save the children.
Le régime de Damas et son allié russe affirment bombarder Alep pour éliminer les "terroristes". Dans un entretien au quotidien russe Komsomolskaya Pravda publiée vendredi, Bachar al-Assad a déclaré qu'il utiliserait une victoire à Alep comme "tremplin" pour capturer d'autres bastions rebelles. Évacuation forcée d'Alep ? Selon plusieurs sources, la réunion de Lausanne devrait examiner un plan, proposé récemment par Staffan de Mistura, visant à faire sortir de manière sécurisée les combattants de Fatah al-Cham (ex-Front Al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda) d'Alep.
"Le diable est dans le détail de ce plan", souligne une source diplomatique française. "Qui serait évacué? Est-ce que c'est juste les combattants d'Al-Nosra, ou est-ce que c'est une espèce d'évacuation forcée de toute la population d'Alep-Est ? ".
"Selon les estimations, admises par les Russes, le nombre de combattants d'Al-Nosra ne dépasse pas le millier. Donc les Russes sont en train de reconnaître qu'ils bombardent une population civile de 260.000 habitants pour 900 personnes", poursuit cette source.
Quatre ONG internationales, dont Save The Children, ont appelé les négociateurs de Lausanne à établir un cessez-le-feu d'"au moins 72 heures" à Alep, pour permettre l'évacuation des blessés et l'accès de l'aide humanitaire.
Depuis mars 2011, le conflit en Syrie s'est complexifié et internationalisé, provoquant la mort de plus de 300.000 personnes et dévastant le pays. Plus de 13,5 millions de Syriens, dont six millions d'enfants, ont besoin d'aide humanitaire, selon l'ONU.
AFP/VNA/CVN