Sur les toits des villas de luxe d'Europe, des roseaux du Danube

Un océan de roseaux ondule dans le vent jusqu'au bleu de la mer Noire. Ici, dans le delta du Danube, sont récoltés chaque hiver des roseaux utilisés pour les toits de chaume de luxueuses villas d'Europe du Nord.

Les roseaux de Roumanie ont aussi servi dans des décors de films, notamment pour reconstituer un théâtre dans un film sur Shakespeare tourné aux studios Babelsberg, près de Berlin.

Ce matériau autrefois utilisé pour les maisons des paysans pauvres, les chaumières, est aujourd'hui prisé dans les demeures cossues en quête d'authenticité. "Le roseau est un matériau naturel qui est aussi un très bon isolant thermique et phonique. Avec l'intérêt croissant pour les constructions écologiques, beaucoup de gens veulent aujourd'hui des toits en chaume", explique Octavian Popa, directeur de Delta Stuf Production.

Cette société privée est l'une des deux seules autorisées à récolter les tiges dorées dans le delta du Danube, au sud-est de la Roumanie, zone classée au patrimoine mondial de l'UNESCO pour sa faune et sa flore exceptionnelles et plus grande roselière compacte au monde.

La quasi-totalité de la récolte de la société, 20.000 tonnes, est exportée, principalement vers l'Allemagne et les Pays-Bas mais aussi au Danemark, en Grande-Bretagne et en France.

Le roseau du delta est connu pour sa solidité même s'il fait face depuis quelques années à la concurrence chinoise.

Avant d'arriver sur le toit des villas, fermes ou moulins d'Europe du Nord, le roseau est cueilli dans des conditions climatiques difficiles, au coeur de zones marécageuses coincées entre mer et fleuve et que l'on atteint parfois uniquement en bateau. "Ici, nous récoltons sur une île flottante", explique Dan Baltaneanu, 77 ans, dont 52 dédiés à la récolte des roseaux.

Le sol de l'île n'est profond que de quelques dizaines de centimètres.

Quand le tracteur aux larges roues avance, la terre ondule comme un matelas rempli d'eau.

À une demi-heure en bateau, le long de la mer Noire, la récolte se fait aussi mécaniquement. À l'avant de la machine, des mâchoires en fer coupent les tiges. Des hommes saisissent les fagots ainsi formés et les empilent à l'arrière.

Dans ces lieux reculés, les ouvriers dorment sur des hôtels flottants. "Les techniques ont beaucoup évolué pour protéger l'environnement", dit M. Baltaneanu qui a connu les ravages de la récolte intensive.

Près du lac Sinoe, la récolte se fait manuellement, à la serpe. "C'est un métier difficile car les gens récoltent parfois les jambes plongées dans l'eau glacée", reconnaît M. Popa. "Sans le roseau, on n'aurait pas de quoi manger. Il n'y a pas d'autre activité dans la zone", explique Maria Scarlat, qui extrait des bottes les mauvaises herbes et les roseaux de l'année dernière, "plus gris et moins solides". Cinq cents personnes travaillent à la récolte, 200 toute l'année. "Cette récolte est bénéfique pour l'environnement. Le roseau a besoin d'être coupé pour croître à nouveau sainement", explique Silviu Covaliov, biologiste à l'institut national du Delta du Danube, rappelant que les habitants cueillent le roseau depuis des siècles.

Chaque famille du delta à le droit de récolter jusqu'à deux tonnes pour se chauffer, construire étables et granges, donner à manger aux animaux ou refaire son toit. Mais curieusement, les toits de chaume prisés des familles fortunées en Europe du Nord sont signe de pauvreté dans le Delta, les habitants préférant souvent des matériaux jugés plus modernes.

AFP/VNA/CVN

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