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Le Vietnam est l’un des pays au vieillissement démographique le plus rapide au monde. |
Obstacles à surmonter
Nguyên Doan Tu, directeur du Département général de la démographie et du planning familial
La stratégie nationale démographique jusqu’en 2030 est mise en œuvre dans un contexte où le Vietnam ambitionne de devenir un pays industrialisé et de se positionner en tête des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici 2030. Toutefois, l’évolution démographique actuelle de notre pays présente encore de nombreux défis et limites.
Le taux de fécondité varie considérablement entre villes et provinces, entre régions, et entre zones rurales et urbaines. Dans les zones socio-économiques confrontées à des difficultés, on observe une fécondité élevée. Par exemple, dans les régions médianes et montagneuses du Nord et les hauts plateaux du Centre, ce taux est de 2,43 enfants, voire 2,74 enfants par femme dans les provinces de Yên Bai et Kon Tum. Tandis que dans les zones urbaines, le taux de fécondité diminue considérablement : 1,56 enfant par femme dans le Sud-Est du Vietnam, avec seulement 1,39 enfant par femme à Hô Chi Minh-Ville.
Malgré les politiques d’ajustements pour équilibrer ces taux entre les régions Nord et Sud, la situation n’est pas encore satisfaisante. Le déséquilibre de sexe-ratio à la naissance s’aggrave, tant en milieu urbain qu’en milieu rural. La tendance de la masculinisation des naissances est de plus en plus marquée. De plus, le Vietnam est l’un des pays au vieillissement démographique le plus rapide au monde, alors que les conditions socio-économiques ne permettent pas encore de s’adapter à cet état.
À propos des caractéristiques de la population, dans le but d’atteindre “un âge d’or” démographique, nous avons certes rempli des critères quantitatifs mais la qualité de notre main-d’œuvre ainsi que notre productivité restent encore limitées. Nous n’avons pas effectué de recherches suffisamment approfondies pour proposer des solutions et mettre en place des politiques synchronisées afin de tirer avantage de cet "l’âge d’or" démographique.
L’indice actuel de développement humain (IDH) est faible et s’améliore lentement. L’espérance de vie moyenne est élevée mais le nombre moyen d’années de vie en bonne santé reste faible. En outre, les taux de mortalité maternelle, infantile et de malnutrition chez les enfants de moins de 5 ans sont encore élevés, avec des disparités importantes entre régions.
La stature et la force physique des Vietnamiens s’améliorent lentement. Chez certaines mino-rités ethniques, les mariages précoces et endogamiques sont encore courants. La protection et le développement de la population des minorités ethniques de moins de 10.000 personnes restent difficiles. Nous faisons également face à la question de la répartition de la population et de la migration. De 1989 à nos jours, le Vietnam connait un fort exode rural. Selon les prévisions, les migrations continueront de s’intensifier dans les temps à venir.
Nous rencontrons aussi des difficultés dans la sensibilisation aux questions démographies car la plupart des politiques se concentrent trop sur le planning familial. L’insertion de la démographie aux programmes de développement socio-économiques n’est pas encore efficace. En tant qu’organisme clé dans la mise en œuvre de la stratégie démographique nationale jusqu’en 2030, le Département général de la démographie et du planning familial dirigera et soutiendra les villes et provinces dans l’élaboration des plans d’action pour la période 2020-2025 afin de la mettre en œuvre efficacement.
Nous proposons également la réorganisation du personnel en charge du Département de la démographie à tous les niveaux en vue de le rendre plus adapté et efficace. La politique démographique a aussi besoin de ressources financières suffisantes, c’est la raison pour laquelle je pense qu’il faut insérer les projets liés à la démographie dans les programmes d’investissement public à moyen terme.
Le pays a besoin de politiques adéquates pour tirer avantage de "l’âge d’or" démographique. |
Qualité ou quantité ?
Vu Thi Thu Thanh, experte de l’Institut des sciences sociales du Sud
Au cours des dix dernières années, de 2010 à 2020, la population du Vietnam a augmenté de plus de 9,37 millions de personnes. Cette augmentation est considérable par rapport au Japon où la population décroît constamment, ou à d’autres pays et territoires comme Hong Kong, Taïwan (Chine), la République de Corée, Singapour qui recensent une hausse de moins de 2 millions d’individus au cours des dix dernières années.
Nous entrons dans une nouvelle ère de développement et nous devons nous poser une question sur la démographie : voulons-nous la qualité ou la quantité ? Pour répondre à cela, il faut faire face à la réalité : le revenu par habitant du Vietnam n’est actuellement que de 3.151 USD par an. De plus, le pays connait actuellement un déséquilibre dans l’offre et la demande de main-d’œuvre. Pour améliorer la situation, le Premier ministre Nguyên Xuân Phuc a adopté la décision No522 sur "la formation et les orientations professionnelles dès l’enseignement secondaire pour la période 2018-2025" afin d’augmenter l’effectif de travailleurs et d’ouvriers qualifiés capables de satisfaire la demande réelle.
Dans l’ère de la technologie numérique, nous avons constaté une tendance de forte baisse des emplois manuels en raison de l’utilisation de l’intelligence artificielle et de l’automatisation, c’est pourquoi le problème de la création d’emplois est extrêmement difficile à résoudre.
Concernant la tendance à la baisse du taux de natalité dans plusieurs régions urbaines, je pense qu’il y a deux raisons amenant au mariage plus tardif des couples et à la baisse du nombre d’enfants par ménage dans des villes comme Hô Chi Minh-Ville. Selon moi, la situation économique des ménages (revenu, niveau de vie, temps et coûts matériels pour élever des enfants, pression du travail…) ainsi que la généralisation des libertés individuelles, les libertés féminines grandissantes et le changement des conceptions familiales ont un impact sur le taux de natalité en zone urbaine.
Ainsi, pour adopter les politiques adéquates, il faut évaluer intégralement ces questions socio-économiques et parvenir à surmonter correctement les obstacles. J’ai par exemple eu l’occasion de proposer l’exemption des frais de scolarité de la maternelle au lycée, en vue de réduire les dépenses familiales liées à l’éducation des enfants...
Linh Thao/CVN