Stadia ou l'impulsion tant attendue pour le jeu vidéo sur le cloud

Google n'est pas le premier grand groupe à se lancer dans le "cloud gaming", mais il est certainement le plus attendu, car son succès, ou son échec, déterminera le futur proche de ce marché balbutiant - celui des jeux vidéo libérés des contraintes matérielles.

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Des visiteurs jouent en ligne sur le stand de Google qui lance Stadia sa plateforme de jeux vidéos sur le cloud, lors d'un évènement à Cologne, le 21 août.

Stadia, la plateforme de jeux vidéo sur le "cloud" (à distance), prend du service mardi dans 14 pays (Amérique du Nord et Europe), avec un catalogue d'une trentaine de jeux. Sa promesse ? Pouvoir jouer sur n'importe quel écran (ordinateur, téléviseur connecté à internet, smartphone - seulement le Pixel de Google pour l'instant) sans avoir besoin d'une console ou d'un processeur avec carte graphique dernier cri.

Dans le "cloud gaming", la puissance informatique, qui assure la qualité de l'image et la fluidité de l'action, est délocalisée sur des serveurs. Les joueurs n'ont besoin que d'un écran compatible et d'une manette Stadia. D'autres offres similaires existent déjà, comme la PlayStation Now de Sony, qui a accumulé près de 700.000 abonnés en 5 ans. Mais la société japonaise ne propose qu'une partie de son catalogue sur cette plateforme.

Pour Stadia, la barre du succès est à 10 millions d'abonnés en un an, évalue Laurent Michaud, directeur d'études à l'Idate. Pour l'instant, le marché mondial du cloud gaming représente moins de 300 millions d'euros, d'après l'Idate, qui table sur 406 millions d'euros d'ici la fin 2020, et 1,2 milliard d'euros pour 2024. À titre de comparaison, l'industrie complète du jeu vidéo pesait 120 milliards de dollars en 2018, selon le cabinet SuperData.

Pari

"Il n'y a pas un acteur important de l'industrie qui ne travaille sur une solution de +cloud gaming+ : Intel, Microsoft avec xCloud... Même les éditeurs, comme Ubisoft, réflechissent à des solutions en interne", constate M. Michaud. Si Stadia marche, les autres suivront. "Mais si ça ne prend pas, il faudra peut-être 5 ou 10 ans avant que cette technologie ne soit relancée", remarque James O'Brien, professeur en sciences de l'informatique à l'université de Berkeley (Californie). Certains développeurs craignent que Stadia ne soit qu'un pari parmi d'autres.

Mais "Google a beaucoup investi", assure Chris Early, vice-président d'Ubisoft en charge des partenariats, comme celui avec Stadia. "Ils ont dû construire toute une infrastructure (...). En interne ils disent que c'est un pari du niveau de Gmail", poursuit-il. La réussite, ou pas, de la plateforme, va tenir à un mélange de facteurs.

Techniques, d'abord : le joueur ne doit pas sentir la latence - les quelques millisecondes entre la pression sur le bouton et le mouvement du personnage à l'écran - sachant que les images en 4K (très haute définition) pèsent très lourd, et que la 8K arrive à grands pas. Sur ce terrain, le moteur de recherche est très bien positionné, grâce à ses nombreux centres de données dans le monde.

"Réseau social"

"C'est une révolution technologique, mais leur défi, sur la durée, va consister à convaincre une large base d'utilisateurs", note Ted Pollak, spécialiste du marché des jeux vidéo chez Jon Peddie Research. L'analyste estime que Stadia devrait d'abord attirer les nouveaux-venus, tentés par les jeux, sans avoir envie d'investir dans du matériel trop coûteux.

"Ils vont peut-être aussi tenter quelques puristes du jeu sur ordinateur, grâce à la possibilité de jouer depuis leur canapé à quelque chose de plus décontracté, sur leur téléviseur", ajoute-t-il. Google va proposer différents abonnements, dont le "Stadia Pro" à 9,99 dollars par mois, mais les experts sont divisés sur la viabilité de ce modèle appliqué aux jeux vidéo.

La qualité et la variété du catalogue joueront aussi un rôle important, comme pour les plateformes de streaming, que les consommateurs peuvent choisir en fonction de leur série favorite. Sans oublier la dimension sociale. De très nombreux ados et jeunes s'abonnent à Xbox Live ou à PSN (Sony) parce que ces services de jeux connectés leur permettent aussi de retrouver leurs amis en ligne. Selon James O'Brien, "l'aptitude de Google à faire adopter Stadia va beaucoup dépendre de sa capacité à construire un réseau social dans le service de cloud gaming".


AFP/VNA/CVN

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