Sommet sur le budget de l'UE : le grand marchandage commence

Les dirigeants européens ont affiché jeudi 20 février leurs divergences dès leur arrivée pour un sommet spécial consacré au budget de l'UE des sept prochaines années, faisant peser une lourde incertitude quant à la possibilité de parvenir à un accord au cours de cette réunion extraordinaire.

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Le président du Conseil Charles Michel (gauche), la chancelière Angela Merkel (2e droite), le président Macron (droite), en marge d'un sommet de l'UE le 20 février à Bruxelles.

"Il y a un chemin pour trouver un accord durant ce sommet si tout le monde montre une volonté de compromis et d'ambition. Ce chemin peut prendre quelques heures, quelques nuits, quelques jours. J'y suis prêt", a assuré le président français Emmanuel Macron.

"Il est certain que des divergences majeures vont devoir être surmontées. Nous ne sommes pas satisfaits de la situation actuelle. Parce que l'équilibre entre les contributeurs nets (qui payent plus qu'ils ne reçoivent) n'a pas encore été correctement négocié", a pour sa part expliqué la chancelière allemande Angela Merkel.

Il y a sept ans, il avait fallu deux sommets pour arriver à une conclusion sur le budget pluriannuel.

Les 27 chefs d'État ou de gouvernement s'attendent à de longues discussions.

"Les positions des États membres sont toujours très éloignées les unes des autres. Nous verrons si nous finissons cette semaine ou s'il faudra continuer plus tard", a prudemment commenté la Première ministre finlandaise Sanna Marin.

"J'ai bien dormi, je suis prêt", a déclaré en souriant le président lituanien Gitanas Nauseda.

Le Brexit a compliqué la donne. Pour cause de divorce, le budget 2021-2027 devra se passer de la contribution de Londres (entre 60 et 75 milliards d'euros sur sept ans) qui en était le deuxième contributeur derrière l'Allemagne.

Frugaux contre "amis de la cohésion"

Les 27 cherchent un compromis sur le niveau global du budget, un peu plus de 1.000 milliards d'euros, et sur sa répartition entre les différentes politiques de l'UE : agriculture, aides aux régions les plus défavorisées, lutte contre le changement climatique, numérique, etc.

"Il serait inacceptable d'avoir une Europe qui compense le départ des Britanniques en réduisant ses moyens", a déclaré Emmanuel Macron, qui appelle à "un accord ambitieux".

Les rabais, une pratique qui bénéficie aujourd'hui à cinq pays - Allemagne, Danemark, Pays-Bas, Autriche et Suède - vont peser dans la négociation. Les autres, France en tête, voudraient y mettre fin à la faveur du départ du Royaume-Uni, pays qui l'a imposé au milieu des années 1980.

Sur le premier front, le groupe des "frugaux" (Autriche, Pays-Bas, Danemark, Suède) ne veut pas que le niveau total du budget dépasse 1% du revenu national brut (RNB) de l'UE. Certains y associent l'Allemagne dont la position est un peu moins dure.

La proposition de compromis soumise par le président du Conseil Charles Michel de 1,074% du RNB, soit 1.094 milliards d'euros, représente 74 milliards de trop pour eux et ils sont partisans de davantage de coupes.

Les quatre dirigeants de ces États membres se sont retrouvés juste avant le sommet, affichant leur fermeté. "Nous ne pouvons pas accepter une hausse aussi importante de nos contributions", a lancé le Suédois Stefan Löfven. Pour son pays, cette hausse serait de 40% a-t-il affirmé.

La Commission, qui veut être plus ambitieuse dans la lutte contre le changement climatique et le numérique, voudrait 1,114% (1.134,6 milliards d'euros), soit 40 milliards de plus.

Plusieurs pays, dont l'Allemagne, souhaiteraient une répartition des ressources plus favorables aux nouvelles priorités (recherche, défense, protection des frontières extérieures, etc.).

"Les derniers pas à faire pour atteindre un compromis sont toujours les plus difficiles mais je pense que tout est sur la table afin que l'on puisse prendre une décision", a soutenu Charles Michel avant l'ouverture du sommet.

Agriculture et cohésion

La question se pose aussi de la part accordée à l'agriculture et à la politique de cohésion (l'aide aux régions les moins développées), qui mobilisent environ 60% du budget. Ces deux enveloppes accusent dans la dernière proposition sur la table une baisse globale de près de 100 milliards d'euros par rapport au précédent budget.

Très inquiets, des agriculteurs ont fait le déplacement à Bruxelles pour une manifestation en marge du sommet. Plus de cent tracteurs se sont retrouvés dans le quartier européen, principalement en provenance du sud de la Belgique. Environ 200 producteurs de lait des pays baltes ont aussi fait le déplacement.

La France, poids lourd de l'agriculture européenne, veut "se battre pour" la Politique agricole commune (PAC), notamment soutenue par l'Espagne, où les manifestations d'agriculteurs se multiplient. "Nous n'y sommes pas", a jugé Emmanuel Macron qui doit inaugurer samedi le Salon de l'Agriculture à Paris.

Quant à la quinzaine de pays de l'Est et du Sud, dont l'Espagne, la Pologne et la Grèce, réunis au sein des "amis de la cohésion", ils veulent que cette politique soit maintenue au même niveau.

AFP/VNA/CVN

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