>>Retraites : l'Assemblée entame péniblement l'examen des milliers d'amendements
>>Retraites : ambiance chahutée à l'Assemblée pour le début d'une longue bataille
Richard Ferrand à l'Assemblée nationale, le 19 février à Paris. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Dès l'ouverture de la séance de l'Assemblée nationale à 15h00, le ton a été donné avec des rappels au règlement de LR réclamant des éclairages sur le financement de la réforme, et de la gauche dénonçant les règles en vigueur pour l'examen des 41.000 amendements.
Dans une atmosphère houleuse, les trois groupes de gauche (PS, PCF et LFI) ont contesté les mesures prises la veille en conférence des présidents de l'Assemblée pour quadriller le débat, prévoyant notamment un seul orateur sur les amendements identiques.
Pour la gauche, il est en particulier inacceptable que des amendements placés à différents endroits du texte tombent au motif qu'ils auraient le même objet.
"C'est grave ce qui se passe", a lancé Sébastien Jumel (PCF), en accusant le président de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM) "d'autoritarisme".
Au perchoir, Richard Ferrand a défendu l'application d'une "règle constante" et exclu toute nouvelle conférence des présidents au motif que "les humeurs changeraient".
Le patron de LR Christian Jacob est lui aussi intervenu, affirmant qu'avec une telle règle "on arrive à quelque chose de ridicule".
Plusieurs suspensions de séance ont suivi, entrecoupées de l'examen d'une poignée d'amendements, rappelant la paralysie de juillet 2018 lors de l'examen du projet de révision constitutionnelle, victime collatérale de l'affaire Benalla.
Les communistes, qui ont demandé comme la veille une vérification du quorum, ont vite épuisé leur quota de suspensions et ont donc demandé... un vote pour interrompre momentanément les travaux.
Et lors d'une des multiples pauses, à la veille d'une nouvelle journée interprofessionnelle de mobilisation, plusieurs insoumis et communistes ont entonné le chant des gilets jaunes "on est là".
"Cirque"
Laurent Pietraszewski à l'Assemblée nationale, le 19 février à Paris. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Quelle image donnons-nous de nos travaux ? C'est de l'antiparlementarisme de base", s'est offusqué le co-rapporteur Nicolas Turquois (MoDem), applaudi par la majorité, debout, tandis que le secrétaire d'Etat Laurent Pietraszewski plaidait pour en revenir au débat.
Sur Twitter, des élus disaient leur "honte" que l'Assemblée "se transforme en cirque" ou déploraient "un concours Lépine de l'obstruction désolant".
"Attention, vous jouez avec le feu", a aussi lancé le chef de file des députés LREM Gilles Le Gendre à l'opposition.
"La question n'est plus celle du débat sur les retraites mais celle de la défense des institutions", s'est-il égosillé, dans une intervention conclue par une standing ovation des "marcheurs" et une énième suspension de séance.
Christian Hutin (app. PS) s'est pris le bec avec le "marcheur" Mickaël Nogal. "Je viens de me faire injurier publiquement", a affirmé l'élu de gauche.
Depuis lundi 17 février, les débats patinent sur cette réforme visant à créer un système "universel" de retraites par points. Après de longues discussions sur le titre même du projet de loi, les députés n'ont entamé qu'en début de soirée l'examen de l'article 1er, consacré aux "principes généraux" et qui fait l'objet à lui seul de plus de 1.700 amendements.
Dans l'espoir que le calendrier puisse tenir, les députés siègeront au moins jusqu'au 6 mars, avec des travaux ce week-end.
Le spectre de l'utilisation du "49-3", arme de la Constitution qui permet au gouvernement d'abréger les débats et de faire adopter un projet de loi sans vote, plane.
"On va vers l'inconnu total", admet une source gouvernementale, qui dit assister "à ce triste spectacle bras ballants". "On ne va pas supporter ça trois semaines (...) Est-ce que l'atterrissage inéluctable ne sera pas le 49-3 ?".
Le recours au "49-3", serait-il une défaite ? "Pas du tout", a répondu le député LREM Florian Bachelier devant l'Association des journalistes parlementaires. "Il ne faut pas que la majorité s'enferme dans le piège tendu par l'extrême gauche" et "chacun prendra ses responsabilités".
Lundi soir 17 février, un "marcheur" prédisait : "soit c'est pénible mais on y arrive (...), soit ils font du Benalla et ça bloque complètement..."
AFP/VNA/CVN