>>Retraites : ambiance chahutée à l'Assemblée pour le début d'une longue bataille
>>Retraites : la réforme dans le chaudron des députés
L'Assemblée nationale, le 17 février à Paris. |
Après des premiers échanges parfois chahutés la veille sur ce projet visant à créer un système "universel" de retraites par points, la tension est montée d'emblée avant même d'étudier le premier amendement.
Le numéro un du parti communiste Fabien Roussel s'en est pris vertement aux "marcheurs", à qui il reproche "d'insulter la mémoire" des communistes en se réclamant d'Ambroise Croizat - l'un des pères fondateurs de la Sécurité sociale en 1945 - ou de l'ancien secrétaire général du parti Maurice Thorez. "Vous êtes +en même temps+, vous auriez été beau dans la Résistance, vous auriez été +en même temps quoi ?+", a enchaîné M. Roussel, suscitant l'indignation de la majorité.
Les rappels au règlement, suspensions ou demandes de vote électronique se sont enchaînés, sans atteindre - à ce stade - la paralysie de juillet 2018 lors de l'examen du projet de révision constitutionnelle, victime collatérale de l'affaire Benalla.
Les oppositions de droite comme de gauche ont jugé "vain et inutile" (Eric Wœrth, LR) de débattre, en raison de la tenue au même moment de la "conférence de financement" des partenaires sociaux, chargés de trouver d'ici à avril des solutions pour ramener à l'équilibre le système de retraite d'ici à 2027. Mais sans avancées notables mardi 18 février.
Fabien Roussel a évoqué un "front républicain" : "oui il nous arrive d'être d'accord avec les gaullistes", pour dire "que cet hémicycle est cadenassé, que cet hémicycle est martyrisé et nous voulons le libérer".
"Vous êtes incroyablement prévisibles" et il y a un "désir que ce débat n'ait pas lieu", a rétorqué le chef de file des députés LREM Gilles Le Gendre, sa collègue Catherine Fabre déplorant un "feu d'artifice avant l'heure".
"Comme dans un saloon"
Les députés n'ont étudié en deux heures qu'une quarantaine d'amendements sur les 41.000 déposés, tous étant rejetés. Les principes généraux de la réforme sont jugés "mensongers" par les oppositions, qui veulent rebaptiser le système "universel" en système "individuel".
Pour que le calendrier puisse tenir, les députés siègeront jusqu'au 6 mars avec des travaux ce week-end.
Le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand (LREM) a posé des règles pour l'organisation des débats, avec notamment un seul orateur par groupe sur les amendements identiques, ce contre quoi s'est élevée en particulier la gauche de la gauche.
Il ne pourra y avoir qu'un gros millier de prises de parole sur les quelque 23.000 amendements LFI, a calculé un responsable d'opposition.
"Ca peut tenir en trois semaines. Tout dépend du comportement des uns et des autres", estime un ténor de la majorité, qui craint tout de même que les débats ne s'"enlisent".
La question de l'utilisation du "49-3", arme de la Constitution qui permet au gouvernement d'abréger les débats et de faire adopter un projet de loi sans vote, reste posée, même si le secrétaire d'État Laurent Pietraszewski a encore insisté mardi sur une volonté de "débattre, enrichir le texte" et "aboutir".
La majorité table toujours sur une adoption en première lecture avant les municipales des 15 et 22 mars, et sur un feu vert définitif "d'ici l'été".
Le chef de file des insoumis Jean-Luc Mélenchon vilipende "la plus terrible régression sociale de toute la Ve République". Droite comme gauche dénoncent en outre un projet "nébuleux" et "à trous", avec notamment la trentaine d'ordonnances programmées, et également un "mépris" du Parlement.
Les trois groupes de gauche - PS, PCF et LFI - tablent sur une motion de censure, après l'échec d'une motion référendaire lundi 17 février. Mais les socialistes, dont les signatures sont nécessaires, disent : "le débat d'abord", a fait valoir leur présidente Valérie Rabault auprès de l'AFP.
Pour mettre en exergue les contradictions des oppositions, LREM a fait une "vidéo florilège" des positions passées de responsables allant de Martine Aubry à Nicolas Sarkozy, avec le slogan "ils en rêvaient, on le fait".
"On ne rentrera pas dans la surenchère, mais on ne se laissera pas faire", a prévenu M. Le Gendre. Les oppositions "ne rentreront pas dans la majorité comme dans un saloon !".
AFP/VNA/CVN