Regain de violence en Équateur, la perspective d'un dialogue s'éloigne

La principale organisation indigène d'Équateur a rejeté vendredi 11 octobre l'offre de dialogue du président Lenin Moreno pour sortir de la crise provoquée par la hausse du prix de l'essence, à l'issue de nouvelles manifestations violentes à Quito.

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Photo : AFP/VNA/CVN

"Le dialogue qu'il promeut manque de crédibilité", a affirmé la Confédération des nationalités indigènes de l'Équateur (Conaie) dans un communiqué, ajoutant qu'elle n'y participerait qu'une fois "abrogé" le décret supprimant les subventions au carburant.

Plus tôt, le chef de l'État avait appelé, dans une allocution télévisée, les dirigeants de la Conaie à "dialoguer directement" afin de "trouver des solutions" à la crise déclenchée par sa décision d'augmenter de plus de 100% les tarifs de l'essence, en échange d'un prêt du FMI de 4,2 milliards de dollars.

"Il est indispensable de faire baisser la violence (...) Le pays doit savoir que nous avons la volonté de dialoguer", avait ajouté le président, un libéral élu sous l'étiquette socialiste.

L'organisation indigène lui a répondu que cette offre de dialogue "repose (...) sur l'un des pires massacres de l'histoire de l'Équateur".

En dix jours, les affrontements entre manifestants et forces de l'ordre ont fait cinq morts, dont un dirigeant indigène, et plus de 2.000 blessés, selon le bureau du Défenseur du peuple, entité publique de défense des droits.

Jeudi 10 octobre, les responsables indigènes, fer de lance de la contestation sociale, avaient mis fin aux contacts noués avec la gouvernement, sous la médiation de l'ONU et de l'Église catholique, et appelé à "radicaliser" les actions de protestation.

"Cela nous affecte tous"

Des manifestants contre le gouvernement.
Photo : AFP/VNA/CVN

Vendredi 11 octobre, de nouveaux heurts ont éclaté dans plusieurs endroits de la capitale, quadrillée par la police et l'armée.

Aux abords du Parlement, des hommes cagoulés, s'abritant derrière des planches, ont lancé des pierres et fusées artisanales en direction de la police aux cris de "assassins". La police a répliqué avec du gaz lacrymogène et des balles en caoutchouc, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Des blessés ont été évacués par les manifestants sur des civières de fortune.

Confronté à la pire crise de son mandat, le président Lenin Moreno, élu en 2017, a transféré lundi 7 octobre le siège du gouvernement à Guayaquil (Sud-Ouest). L'état d'urgence a été décrété pour 60 jours, ainsi qu'un couvre-feu autour des institutions du pouvoir, avec 74.000 militaires et policiers ont été déployés.

Les indigènes - qui représentent 25% des 17,3 millions d'habitants - rejettent la suppression des subventions au carburant, qui les affecte de plein fouet : représentant 68% des pauvres dans le pays, ils travaillent principalement dans l'agriculture et voient s'envoler les coûts de transport pour l'écoulement de leurs produits.

"Si nous n'étions pas là, ceux de la campagne, les gens de la ville, les riches, ne pourraient pas vivre", rappelle une manifestante indigène, Maria Escobar, 52 ans, exigeant le départ du président.

"On ne manifeste pas seulement pour l'essence, mais pour tout l'accord de Moreno avec le FMI (qui inclut des réformes économiques, ndlr), car cela nous affecte tous", confie aussi Diego de la Vega, un étudiant de 24 ans, qui s'est joint aux indigènes. Et "tous les pays qui ont signé des accords au FMI, ça ne leur a pas réussi, comme l'Argentine par exemple".

Soutien de Washington à Moreno

Vendredi 11 octobre, des blocages de routes étaient recensés dans 17 provinces sur 24, selon les autorités. Parallèlement, un millier d'Indiens d'Amazonie, armés de lances, sont arrivés à Quito pour rejoindre le mouvement. "Ici on viole les droits humains", a déclaré, en colère, Marlon Vargas, un dirigeant de ces communautés, dans une vidéo diffusée par l'organisation.

Ce mouvement social, marqué également par des grèves et des blocages de puits pétroliers en Amazonie, est inédit dans le petit pays andin depuis 2007.

Lenin Moreno accuse son prédécesseur Rafael Correa (2007-2017), ex-allié devenu adversaire politique, d'avoir "activé" un "plan de déstabilisation" avec l'aide du président vénézuélien Nicolas Maduro.

Depuis la Belgique, où il réside désormais, M. Correa a appelé les forces de sécurité à la désobéissance: "Elles ne peuvent pas continuer à réprimer leurs frères, en protégeant non pas la patrie, mais un gouvernement perdu par sa propre trahison, sa médiocrité et sa lâcheté".

En revanche, Washington a apporté son soutien aux "efforts du président Moreno et du gouvernement d'Équateur pour institutionnaliser les pratiques démocratiques et appliquer les réformes économiques nécessaires", selon un communiqué du secrétaire d'État Mike Pompeo.

AFP/VNA/CVN

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