Le critique littéraire et poète Truong Dang Dung. |
Les critiques littéraires, après un moment de stupéfaction devant l’enfant spécial de leur confrère, se sont mis à analyser et à commenter l’ouvrage, non pas par politesse mais plutôt par soif de découverte. Dô Lai Thuy n’a pas hésité à écrire : «Truong Dang Dung est un poète philosophe. Chacun de ses poèmes, chacun de ses vers porte un message de vie, celui qu’il souhaite transmettre au lecteur. Ce qui diffère pourtant sa poésie de celle classique, c’est que ses messages ne sont pas des cadeaux bien emballés : ce sont des esquisses, du côté de l’horizon, qui invitent le lecteur à venir les décoder et les co-créer». Et il a raison, les poètes ont été les premiers à faire ce décodage et cette co-création. De l’encre a coulé dans la presse et sur le Net.
Le grand prix littéraire
Regroupant 25 poèmes que l’auteur a écrits pendant trois décennies - à commencer par ses années d’études en Hongri - ce livre est paru chez Thê Gioi (Monde) dans une édition originale bien illustrée. Le temps que Truong Dang Dung a mis pour accoucher de son recueil n’est pas des plus communs, mais la marière dont il a fait parler le temps dans tous ses états recueil s’avérera encore plus singulier. À ce propos, il serait dommage de ne pas avertir le lecteur que l’auteur de Les souvenirs imaginés est un partisan de Martin Heidegger dont Être et temps avait imprégné le docteur ès lettres vietnamien depuis sa jeunesse.
Malgré son faible volume, ce premier recueil de poésie a valu à Truong Dang Dung le grand prix littéraire de l’année de l’Association des écrivains de Hanoi. Mais il s’agissait là d’appréciations de compatriotes, qu’en seraient-elles pour vous, lecteurs francophones ? Ne faudrait-il pas tout d’abord vous donner envie de découvrir ces poèmes ? L’extrait suivant se veut une invitation…
Anh không thấy thời gian trôi
Anh không thấy thời gian trôi
chỉ thấy những đám mây di chuyển
và những chiếc lá vàng không muốn lìa cây
gió rung, lá rơi còn vẫy vẫy.
Anh không thấy thời gian trôi
chỉ thấy những lá thư ngày một bạc màu
những cơn mưa rơi vào đêm vắng
dấu chân ta - năm tháng có còn đâu.
Anh không thấy thời gian trôi
chỉ thấy mùa thu vừa lạ vừa quen
những gương mặt những nụ cười mới gặp
chưa kịp thân đã thấy khác đi rồi.
Anh không thấy thời gian trôi
chỉ thấy lòng ngày một tha thiết với trời xanh,
sợi tóc rụng bàn tay nào giữ được
mỗi ban mai khắc khoải việc chưa thành.
Anh không thấy thời gian trôi
thời gian ở trong máu, không lời
ẩn mình trong khoé mắt, làn môi
trong dáng em đi nghiêng nghiêng như đang viết lên mặt đất thành lời về kiếp người ngắn ngủi.
Truong Dang Dung (1997)/CVN
Je ne vois pas le temps passer
Je ne vois pas le temps passer,
seulement des écharpes de nuages couler,
et des feuilles jaunes si attachées à la branche
qu’elles frémissent encore en chutant, secouées par le vent.
Je ne vois pas le temps passer,
seulement des lettres de jour en jour se faner,
des pluies tomber en des nuits désertes,
les traces de nos pas disparaître au fil des années.
Je ne vois pas le temps passer,
seulement l’automne mi-familier mi-étranger,
des visages et des sourires à peine connus
se mettre à changer avant que l’on ne s’y habitue.
Je ne vois pas le temps passer,
seulement mon cœur de plus en plus tenir au ciel azur,
des cheveux tomber sans qu’une main ne puisse les retenir
des aurores teintées de soucis pour les travaux inachevés.
Je ne vois pas le temps passer
le temps réside dans nos veines et, muet,
se cache au coin de nos yeux, sur nos lèvres,
dans ton allure penchée comme pour tracer sur la terre des écrits sur la courte vie humaine.
Traduit par Minh Phuong/CVN