>>Les Croates aux urnes pour une présidentielle où tout est possible
>>Croatie : la conservatrice Grabar Kitarovic nouvelle présidente
Kolinda Grabar-Kitarovic candidate à sa réélection dépose un bulletin dans l'urne, dans un bureau de vote de Zagreb pour l'élection présidentielle, le 5 janvier. |
Le second tour de l'élection est survenu quelques jours après l'accession de la Croatie à la présidence tournante d'une Union européenne qui devra gérer l'après-Brexit.
Le scrutin a révélé la montée en puissance de la droite dure dans un pays qui fait face à la pression de migrants à ses frontières et est confronté comme ses voisins balkaniques à une corruption endémique ainsi qu'à l'exode massif de ses habitants.
Mais les électeurs ont préféré la "Croatie normale" promise par le social-démocrate Zoran Milanovic à la "Croatie authentique", que la sortante Kolinda Grabar-Kitarovic affirmait être la seule à représenter avec le HDZ conservateur.
D'après les résultats quasi définitifs de la Commission électorale, Zoran Milanovic a obtenu 52,7% des voix contre 47,3% à sa rivale.
Le nouveau président, un ancien diplomate de 53 ans, a promis pendant la campagne de faire de la Croatie une "République pour tous".
"Soyons unis dans nos différences", a-t-il lancé après la victoire. Les quatre millions de Croates "cherchent (leur) place en Europe, qui est malgré tous les problèmes le meilleur endroit où vivre, le projet le plus pacifique au sein duquel la Croatie doit trouver sa place".
Kolinda Grabar-Kitarovic, 51 ans, qui était devenue en 2015 la première cheffe de l'Etat croate, avait perdu au fil de la campagne sa confortable avance sur ses rivaux.
La "guerre est finie"
Malgré ses appels du pied à la droite nationaliste, ses références répétées à son patriotisme et à la guerre d'indépendance de 1991-1995, elle n'a pas su convaincre les nombreux électeurs ayant voté au premier tour pour un chanteur populiste de revenir dans le giron conservateur.
Zoran Milanovic n'a eu de cesse, quant à lui, de rappeler que "la guerre était finie".
En Croatie, les fonctions de chef de l'État sont largement honorifiques.
Mais la défaite de la sortante va singulièrement compliquer la tâche du HDZ présidé par le Premier ministre modéré Andrej Plenkovic aux législatives prévues pour l'automne.
La formation de centre droit, qui domine la vie politique depuis l'indépendance, avait engagé tout son poids derrière la candidature de Mme Grabar-Kitarovic.
Cet échec "affaiblit" le HDZ avant les législatives et "nuit à la réputation" de son président, relève l'analyste Tihomir Cipek. Andrej Plenkovic est contesté par l'aile dure du parti qui tiendra au printemps des élections internes.
Gaffeuse contre élitiste
Promettant à son successeur "un transfert civilisé de l'autorité", la perdante a appelé à "rester unis pour la Croatie".
Elle s'était dépeinte sous les traits d'une mère de famille comme les autres, mettant en avant ses origines modestes.
Mais ses contempteurs lui reprochaient notamment de nombreuses gaffes, en particulier d'avoir chanté à l'anniversaire du maire de Zagreb, mêlé à plusieurs affaires de corruption. Elle avait ainsi promis de lui apporter "des gâteaux" s'il finissait "en prison".
Mme Grabar-Kitarovic a également été critiquée pour avoir minimisé les crimes du régime oustachi collaborateur de l'Allemagne nazie pendant la Deuxième Guerre mondiale, qui suscite une nostalgie croissante en Croatie.
De leur côté, les fans du vainqueur voient en lui un homme intelligent et ambitieux même s'il est considéré comme un snob par ses opposants.
Ses partisans avaient salué en 2011 l'arrivée à la tête du gouvernement d'un homme exempt des accusations de corruption entachant la réputation de bon nombre de membres du HDZ. Mais son cabinet avait déçu, incapable de combattre le clientélisme ambiant ou de développer l'économie.
Zoran Milanovic arrive à la présidence dans un pays qui a pris le 1er janvier la tête de l'UE pour six mois. Quatre sujets principaux sont à l'ordre du jour : les relations entre l'UE et Londres après le Brexit, le désir d'adhésion de pays des Balkans occidentaux, le changement climatique et le prochain budget pluriannuel de l'UE.
La Croatie est le dernier pays a être entré dans l'UE, en 2013. Mais son économie, fortement dépendante du tourisme, figure parmi les plus faibles des Etats membres. L'adhésion a accéléré l'exode de Croates qui vont chercher une vie meilleure ailleurs en Europe mais qui fuient aussi le clientélisme ou la piètre qualité des services publics.
AFP/VNA/CVN