La laque vietnamienne moderne est un exemple de fidélité à l’identité culturelle nationale. |
Photo : VNP/CVN |
Le projet de conception et de promotion du label national d’“art de la laque poncée du Vietnam” a pour objectif de favoriser son développement, contribuant à l’essor du marché culturel, à la croissance économique, ainsi qu’à la valorisation de l’image du Vietnam et de sa population à travers des activités d’échanges artistiques. Il vise également à revitaliser et à affirmer la valeur de la laque vietnamienne sur les marchés nationaux et internationaux. Le projet encouragera aussi les entreprises, villages artisanaux et artisans à créer des produits laqués destinés à la consommation domestique et internationale. Il stimulera également l’investissement dans les régions de culture du laquier…
Le projet investira notamment dans des programmes de formation de peintres travaillant sur la laque poncée dans les écoles d’art, ainsi qu’encouragera les jeunes des villages de métier à maintenir la tradition de leurs ancêtres.
Pour un label national
Il comprendra plusieurs volets : la conception du label “Laque poncée du Vietnam” ; la publication des normes de fabrication et critères des oeuvres ; l’intensification des activités de promotion de l’art de la laque vietnamienne dans le pays et à l’étranger (investissement, promotion et développement de produits artisanaux de laques du village de Ha Thai, en banlieue de Hanoï, et de celui de Tuong Binh Hiêp dans la ville de Thu Dâu Môt, province méridionale de Binh Duong) ; et l’organisation du Festival international d’art de la laque au Vietnam.
Concernant la mise en œuvre du projet, le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme, ceux de l’Industrie et du Commerce, de l’Agriculture et du Développement rural, ainsi que le ministère des Affaires étrangères sont en charge des travaux de pilotage. Le Département des beaux-arts, l’Association des beaux-arts du Vietnam, l’Association nationale des villages de métiers artisanaux, les villages de fabrication de produits de laque poncée, en collaboration avec les autorités des villes et provinces de Hanoï, Phu Tho, Bac Ninh (Nord), Hô Chi Minh Ville et Binh Duong (Sud), sont également acteurs du projet.
Les Vietnamiens préparent la laque à partir de la sève du laquier qui pousse dans la moyenne région du Nord, en particulier dans la province de Phu Tho, berceau de la culture Viêt de Dông Son qui fleurit à l’âge du bronze. Le liquide obtenu par incision de l’arbre est transparent. Traité, il devient noir (son then) ou brun “aile de cancrelat” (cánh gián).
Évolution au fil du temps
Des fouilles archéologiques menées depuis 1961 ont révélé dans les cercueils en forme de barque, appartenant aux tombeaux anciens, des objets en bois ou en cuir laqués, et même des outils pour le travail de la laque. Elles prouvent ainsi l’existence de cette industrie primitive dès le IVe siècle av. J.-C. dans le delta du Nord. Les objets, peu nombreux et peu variés, étaient principalement enfouis avec les défunts.
Le projet de promotion du label national d’art de la laque poncée du Vietnam encouragera les jeunes des villages de métiers à maintenir la tradition de leurs ancêtres. |
Photo : VNA/CVN |
Pendant la longue période de domination chinoise (en particulier du Ier au Xe siècles), il n’existe aucun document sur la fabrication de la laque vietnamienne. Ce n’est qu’à partir du XIe siècle (jusqu’au XVe), sous les premières grandes dynasties royales du Vietnam (Ly et Trân), que cet artisanat laisse de nouveau des traces visibles, quoique peu nombreuses (à travers notamment les archives, objets de culte et autres objets enterrés avec les défunts).
C’est entre les XVIIe et XIXe siècles que la laque vietnamienne connaît son essor, essentiellement au service de la religion (décoration architecturale, statues, palanquins, colonnes et autres panneaux latéraux et verticaux...).
Héritant de l’industrie de Dông Son (Ier millénaire av. J.-C.), la laque vietnamienne de la période des XVIIe-XIXe siècles a assimilé l’influence chinoise. Elle a ainsi amélioré sa technique pour permettre aux objets laqués de résister au climat tropical et a élargi son éventail de supports (laque sur bois, cuir, terre, pierre, cuivre, rotin et bambou fumé, entre autres). Les articles d’usage quotidien sont assez restreints et le gros de la production est réservé aux religions et croyances.
Cet art traditionnel se perpétue avec les mêmes tendances sous la domination française dans les villages du delta du Nord. Dans la première moitié du XXe siècle, les bibelots et autres objets décoratifs laqués au service de la vie profane (boîtes, vases, paravents...) se multiplient dans les centres urbains.
La laque vietnamienne se renouvelle dans les années 1920-1930 au contact de l’art occidental introduit par les Français via l’École supérieure des beaux-arts de l’Indochine, créée en 1925. L’artisanat ancien, essentiellement décoratif, se mue en un art moderne, un art véritable, capable d’exprimer toutes les nuances des sentiments et pensées de l’homme. L’École des laqueurs de Hanoï a ainsi fait son apparition grâce aux efforts des étudiants vietnamiens de cet établissement. Ceux-ci ont découvert la technique de la laque poncée puis ont enrichi la matière, les couleurs, les sujets ainsi que le style.
La laque vietnamienne moderne, partie d’une tradition ancienne de plusieurs millénaires et fruit de plusieurs acculturations, est un exemple de fidélité à l’identité culturelle nationale. Fidélité que l’on pourrait qualifier de dynamique et évolutive, à l’image de notre société en somme.