Grande distribution en France
Peu de ruissellement pour les "héros" de la première vague

"Service public de l'alimentation", "travailleurs essentiels", "héros" : encensés pour leur rôle depuis le début de la crise sanitaire, les salariés de la grande distribution pensaient toucher les dividendes de leur investissement mais doivent se contenter de "cacahuètes" malgré les annonces de résultats positifs.

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Une caissière dans un supermarché à Givors le 15 avril 2020.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Les gens se disent : ma rémunération est basse, je ne suis pas sûr de garder mon emploi, j'ai fait des efforts pour continuer à nourrir la France. Au final, la contrepartie ne me parait pas équilibrée", résume Pierre Marco, dirigeant du cabinet Secafi de conseil aux représentants du personnel. "Le point de départ de la contestation, ce sont les bons résultats des distributeurs alors que les négociations salariales sont parties sur des niveaux bas, appuie Olivier Dauvers, expert de la distribution française. Un rapport de force se met en place et donne du grain à moudre aux organisations syndicales".

Les publications récentes de certains résultats annuels, les "meilleurs depuis 20 ans" chez Carrefour, conjuguées à des négociations annuelles obligatoires sur les salaires (NAO) qui se sont traduites par des hausses le plus souvent indexées sur l'inflation et comprises entre 0,5% et 1% pour les plus chanceux laissent en effet un goût amer aux salariés. "Il y a des tensions, des débrayages un peu épars, c'est la cocotte minute", note Sylvain Macé, délégué syndical groupe (CFDT) chez Carrefour. .

Son groupe, dont les ventes ont progressé de 7,8% en 2020, a proposé 0,5% d'augmentation de salaire avant d'accepter de revoir sa copie alors que des magasins et des centres logistiques ont été perturbés ces dernières semaines et que la CGT appelle à une manifestation le 8 avril devant le Medef. Des tensions sporadiques sont également apparues chez Système U ou Casino. Les salariés exposés au risque ont bénéficié d'une prime COVID de 1.000 euros, plus ou moins généreusement attribuée toutefois.

Chez Auchan, Guy Laplatine (CFDT), qui déplore les "cacahuètes" jetées aux salariés malgré le retour des bénéfices en 2020, indique que 60% des salariés l'ont finalement touchée. Carole Dosiano, secrétaire fédérale Grande Distribution chez FO, alerte surtout sur la situation chez les indépendants et franchisés. "Les retours que j'ai là-bas ne sont pas glorieux. La prime a été très peu distribuée ou pas du tout à la hauteur du maximum prévu".

Une employée d'un magasin METRO nettoie le tapis roulant d'une caisse le 27 mars 2020 à Nanterre

M. Marco met lui en avant la politique de Lidl qui vient d'annoncer "1% d'augmentation et une prime exceptionnelle de 400 euros" tandis que les distributeurs accordent aussi généralement à leurs salariés de l'intéressement, qualifié de "pas mal" chez Auchan par M. Laplatine.

Sortie de crise délicate ?

"Cette année il n'y aura pas de prime COVID, pourtant les salariés continuent d'être exposés, poursuit M. Macé. Le mécanisme a disparu mais il y avait des possibilités, des mécanismes avantageux à mettre en place". "La grande distribution est aujourd'hui un secteur menacé comme il ne l'a jamais été, rappelle M. Dauvers. Il est inimaginable qu'une boîte de distribution mette aujourd'hui 2 ou 3% d'augmentation (des salaires), elle exploserait en vol l'année suivante."

Dans un contexte sanitaire qui ne favorise pas la mobilisation syndicale, et alors que le gouvernement ouvre lundi 15 mars une nouvelle conférence sociale, la sortie de crise pourrait s'avérer délicate pour un secteur obligé de renouveler son organisation du travail. "La fin de la pandémie peut être la porte ouverte à des mouvements, prévient Mme Dosiano. J'espère que les entreprises y mettront autant d'énergie qu'elles en ont mis à organiser le travail d'entrée dans la crise".

"Ce qui est manifesté par les représentants du personnel, c'est cette inquiétude sur les transformations de long terme et la façon dont on va pouvoir prévoir des dispositifs pour ne laisser personne sur le bord de la route", poursuit M. Marco qui rappelle qu'Intermarché a laissé trois ans pour fermer aux magasins dont il souhaitait se séparer. "Soit les directions, qui ont les moyens de le faire aujourd'hui, vont prendre le temps de gérer les transitions. Soit on est dans une forme d'urgence raccordée à des enjeux boursiers. Là, je pense que ça se passera très mal", prédit-il.


AFP/VNA/CVN

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