>>La BCE sur le qui-vive face à la remontée des taux obligataires
Siège de la Banque centrale européenne à Francfort (Allemagne). |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Depuis plusieurs semaines, la remontée des taux obligataires à dix ans aux États-Unis traduit le risque d'une surchauffe des prix, lié à l'imminence de la reprise, qui pourrait inciter les banques centrales à resserrer leur politique monétaire accommodante.
La BCE avait fait savoir qu'elle ne resterait pas les bras croisés et agirait pour empêcher une contagion "pas souhaitable" de ces tensions aux taux de la zone euro, selon sa présidente Christine Lagarde.
L'institut a fait un pas dans ce sens jeudi 11 mars en annonçant que le rythme des achats au titre de son Programme d'urgence contre la pandémie (PEPP) sera "nettement augmenté au cours du trimestre à venir par rapport aux premiers mois de l’année" afin d'assurer que les acteurs économiques puissent continuer à se financer dans de bonnes conditions.
Les gardiens de l'euro ont de la marge car l'enveloppe de départ compte 1.850 milliards d'euros à engager d'ici mars 2022 et plus de la moitié de cette somme n'a pas encore été dépensée.
Ces rachats permettent notamment aux États d'emprunter à bas coût pour stimuler l'investissement et l'emploi fragilisés par la pandémie de COVID-19.
Hausse des prix temporaire
Cette politique monétaire accommodante ne doit pas être remise en question, a souligné Mme Lagarde, car "les perspectives économiques à court terme restent incertaines", compte-tenu de la dynamique de l'épidémie et du déploiement de la vaccination plus lent que prévu.
"Le PIB devrait à nouveau se contracter au cours du premier trimestre de l'année", a prédit Mme Lagarde mais l'Institution de Francfort continue de tabler sur un net rebond de l'activité en zone euro sur le reste de l'année pour laisser ses prévisions de croissance quasi-inchangées : 4% en 2021, 4,1% en 2022 et 2,1% en 2023.
"L'évolution économique reste inégale selon les pays et les secteurs, le secteur des services étant plus durement touché par les restrictions que le secteur industriel, qui se redresse plus rapidement", a-t-elle encore noté.
Pour Marcel Fratzscher, président de l'institut économique allemand DIW, "la BCE n'a pas cédé aux pressions des Allemands qui critiquent sa position expansionniste" et "ses nouvelles prévisions montrent que personne ne doit s'inquiéter d'une inflation élevée".
La présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, s'exprime lors d'un événement à Francfort (Allemagne). |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le taux d'inflation a grimpé à 0,9% en janvier et février en zone euro, dépassant les attentes et alimentant les craintes d'une surchauffe des prix en zone euro. Dans la foulée, les rendements obligataires avaient légèrement augmenté.
Cette anticipation n'est pas justifiée, a assuré jeudi 11 mars la BCE, qui n'a que très légèrement relevé ses prévisions d'inflation pour 2021 (1,5%) et 2022 (1,2%), toujours loin de l'objectif proche de 2% visé par l'institution.
Si la hausse des prix s'accélère, c'est "principalement en raison de certains facteurs transitoires et d'une hausse des cours de l'énergie", a relevé Mme Lagarde, selon laquelle "ces facteurs devraient s'estomper (...) au début de l'année prochaine".
Dans le même temps, la faiblesse de la demande et "la forte atonie" sur le marché du travail constituent de puissants freins à un dérapage des prix.
Pas de contrôle des taux longs
Pour le reste, la BCE a maintenu son cap monétaire, sans renforcer son arsenal anti-crise, "ne souhaitant pas donner l'impression que les décisions de politique monétaire sont guidées par les sentiment de court terme des marchés", selon Daniel Lenz, stratégiste chez DZ Bank.
Christine Lagarde a ainsi prévenu que la BCE n'avait pas vocation à pratiquer une politique de contrôle des taux longs, comme le fait par exemple la Banque centrale du Japon avec des objectifs clairement communiqués sur certaines durées d'emprunts.
L'institut monétaire va plutôt surveiller toute une batterie d'indicateurs pour juger si les conditions financières restent favorables.
Elle va par ailleurs poursuivre l'ancien programme de rachat de dettes, le "QE", à raison de 20 milliards d'euros par mois sans horizon de temps.
Les banques qui en ont besoin vont continuer à bénéficier des vagues de prêts géants et bon marché. Enfin les trois taux directeurs ont été maintenus à leur plus bas historique, notamment celui négatif de 0,50% frappant les liquidités en excès des banques qui ne sont pas injectées dans l'économie.
AFP/VNA/CVN