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La violence à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Jusqu'à 3.500 effectifs de forces de l'ordre, au total, vont être déployés dans cet archipel français du Pacifique Sud engagé depuis 1998 dans un processus d'émancipation. Un projet de loi constitutionnelle a déclenché des émeutes et aucune sortie de crise politique ne se dessine pour l'heure, faute d'accord entre loyalistes et indépendantistes.
Dans le quartier populaire de Montravel à Nouméa, majoritairement peuplé par les communautés kanak et océanienne et qui a été à la pointe de la révolte, aucun barrage n'était dressé mardi. De la fumée s'échappe encore de hangars qui se consument depuis des jours, sous le regard de gendarmes mobiles postés un peu plus loin.
A Dumbéa-sur-Mer, en périphérie de Nouméa, un barrage a été réduit à un simple ralentisseur et les militants alentour se montrent détendus.
Des barricades restent dressées ailleurs mais le retour à la normale, même fragile, semble se ressentir également du côté des personnes qui les tiennent. "La nuit a été calme, oui. Ça se calme", concède l'une d'elles auprès de l'AFP.
À l'arrêt depuis le 14 mai, les taxis de Nouméa reprennent du service, a annoncé mardi 28 mai l'association des radio taxis, au lendemain de la reprise du trafic routier dans l'agglomération, ce qui a généré de longs embouteillages.
Le réseau de bus qui dessert Nouméa et le Grand Nouméa reste en revanche paralysé. Le Syndicat mixte des transports urbains avait indiqué lundi espérer une reprise "dès que possible mais de trop nombreuses routes sont encore impraticables".
Mais signe, là aussi, d'un timide retour à la normale, la mairie de Nouméa a organisé lundi 27 mai sa toute première tournée de ramassage depuis le déclenchement de la crise, mais pour "trois quartiers seulement", selon la municipalité. À Dumbéa aussi, un camion benne a pu circuler pour la première fois lundi, avec les mêmes contraintes.
Lundi 27 mai, le Haut-Commissariat de la République (représentant de l'État), qui a signalé 460 interpellations, a affirmé que les forces de l'ordre avaient repris le contrôle "dans les quartiers du Médipôle (où se trouve l'hôpital, ndlr), et de Boulari dans la commune du Mont-Dore", au Nord-Ouest de Nouméa.
L'aéroport international de Nouméa, La Tontouta, fermé aux vols commerciaux depuis le 14 mai, va le rester au moins jusqu'au 2 juin. Les écoles, elles, ne rouvriront pas avant mi-juin.
Macron et le référendum
Français et touristes étrangers coincés sur l'archipel doivent continuer à être évacués. Depuis le début de la crise, 1.200 personnes ont été évacuées par avion et 270 résidents calédoniens ont pu rentrer, selon le Haut-Commissariat.
Le président français Emmanuel Macron lors de la conférence avec les dirigeants calédoniens. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
L'état d'urgence, instauré le 15 mai, a été levé mardi à 05h00 du matin (20h00 lundi 27 mai à Paris).
La levée de ces mesures d'exception doit "permettre les réunions des différentes composantes du FLNKS (principal mouvement indépendantiste, ndlr) et les déplacements sur les barrages des élus ou responsables en mesure d'appeler à leur levée", avait précisé la présidence dans la nuit de dimanche 26 à lundi 27 mai.
Le couvre-feu reste en vigueur et la vente d'alcool reste interdite, tout comme le transport et port d'armes - estimées à environ 100.000 dans l'archipel peuplé de quelque 270.000 habitants.
Le détonateur des troubles a été le vote à Paris d'une réforme constitutionnelle prévoyant d'élargir le corps électoral local à environ 25.000 personnes établies depuis au moins dix ans en Nouvelle-Calédonie.
Les indépendantistes réclament le retrait de la réforme, qui a provoqué les pires violences en 40 ans et réveillé le spectre des "Événements" qui, de 1984 à 1988, avaient fait près de 80 morts et craindre la plongée de la Nouvelle-Calédonie dans la guerre civile.
Jeudi 23 mai, le président Emmanuel Macron, en déplacement sur l'archipel, a annoncé qu'il n'y aurait "pas de passage en force" mais "pas de retour en arrière". Il avait conditionné la fin de l'état d'urgence à une levée des barrages sur les routes, ce qui n'est pas encore le cas partout.
En déplacement à Berlin dimanche 26 mai, le chef de l'État a été amené à nuancer ses propos au quotidien Le Parisien publiés la veille sur la possibilité d'organiser un référendum national sur le dégel du corps électoral, qui ont suscité de nouvelles crispations dans l'île. Cette possibilité relève d'une simple "lecture de la Constitution" et n'est "pas une intention", a-t-il assuré.
Emmanuel Macron veut donner priorité à un "accord global", incluant notamment l'avenir de la filière nickel, essentielle pour l'économie de l'archipel. Il a donné jusqu'à fin juin aux indépendantistes et loyalistes pour esquisser le début d'une entente.
AFP/VNA/CVN