"Depuis 2001, nous devons toujours chercher des fournisseurs vietnamiens. Aucun fournisseur vietnamien ne cherche à établir des relations de partenariat avec notre compagnie", a déclaré Sachio Kagetama, directeur de Canon Vietnam. Une opinion exprimée lors d'un récent colloque sur le développement de l'industrie auxiliaire.
En réalité, le fait que les investisseurs japonais soient obligés de consulter l'annuaire téléphonique afin de trouver au Vietnam des fournisseurs d'accessoires est répandu. L'histoire que cet homme d'affaires japonais a révélé en dit long sur la difficulté de trouver des fournisseurs d'accessoires au Vietnam.
Ces 20 dernières années, l'industrie du Vietnam a connu un bon développement. Sa participation au PIB national est désormais de 40%, contre 23,5% en 1990. L'investissement direct étranger dans ce secteur atteint des centaines de milliards de dollars. Les entreprises nationales du textile et de l'habillement, des chaussures, de la mécanique, de l'électronique... ont exporté pour des centaines de milliards de dollars. Mais au regard d'un tel développement, le Vietnam ne dispose cependant que d'une industrie auxiliaire limitée qui ne parvient pas à jouer son rôle d'accélération de l'industrialisation nationale.
Jusqu'à maintenant, seule l'industrie auxiliaire de la construction de motos connaît un développement assez rapide et satisfait à 75% des accessoires nécessaires en ce domaine. La plus grande carence se constate dans le secteur de l'électronique. Selon l'Association des entreprises de l'électronique du Vietnam, l'année dernière, le pays a exporté pour 3,4 milliards de dollars de produits électroniques mais a dû importer pour 4,6 milliards de dollars. Sur ce dernier chiffre, plus de trois milliards de dollars correspondent aux accessoires. Pour ainsi dire, près de 100% des accessoires de l'électronique assemblés au Vietnam et destinés à l'exportation ou à la consommation domestique sont importés. Le pays n'est en mesure que de produire des accessoires "simples" comme le coque de carton, celui en plastique, manuels de guide.
Une modeste valeur ajoutée
La situation est identique dans le secteur du textile et de l'habillement. Durant ce premier semestre, le pays a exporté pour 6,16 milliards de dollars mais il a dû importer pour 5,76 milliards de dollars d'accessoires. Pour ainsi dire, les capacités de l'industrie auxiliaire ne sont pas à la hauteur des potentiels de ce secteur. Les compagnies de confection sont essentiellement des sous-traitantes de sociétés étrangères. D'autres secteurs comme la mécanique et la construction navale connaissent maintes difficultés en raison du manque d'industrie auxiliaire. Un navire commandé par un armateur étranger de 360 millions de dollars implique 330 millions de dollars d'importation pour son armement et équipement. De même dans l'industrie automobile où le taux d'accessoires fabriqués au Vietnam est également assez bas. Ces dix dernières années, seulement 5% à 10% de ces accessoires sont fabriqués au Vietnam, les autres devant être importés. Les entreprises au Vietnam ne peuvent fabriquer des pièces simples telles que garnitures de frein, antennes, pédales... Un ingénieur de la compagnie GM Vietnam a indiqué que dans le passé, sa société a tenté de trouver un fournisseur de boulons vietnamien pour l'assemblage de voitures Daewoo. Elle a testé une dizaine de compagnies vietnamiennes en leur donnant les caractéristiques des boulons nécessaires, mais aucune d'entre elles n'a pu satisfaire aux normes requises.
La Compagnie par actions d'éponge Hanel est un "producteur rare" qui est devenu le "fournisseur exclusif" au Vietnam de groupes de l'électronique de premier ordre tels Canon ou Fujitsu. Chaque année, Hanel réalise un chiffre d'affaires d'environ 10-15 millions de dollars. Pourtant, elle ne fournit que les boîtes en carton et les spongieux de protection pour les produits électroniques.
Difficultés pour développer l'industrie auxiliaire
Comme l'on a déjà dit, la faiblesse de l'industrie auxiliaire vietnamienne est claire. Il s'agit aussi d'un terrain "vide" dans lequel les entreprises puissent se pénétrer. Mais en réalité, plusieurs entreprises ne sont pas enthousiastes d'investir dans ce secteur. Selon le professeur Trân Van Tho, de l'Université de Waseda (Japon), l'industrie auxiliaire (supporting industries en anglais) est un concept concernant la totalité des éléments nécessaires à la fabrication de produits finis : pièces, emballages, etc. En général, ces produits sont fabriqués par les PME. Au Vietnam, ces entreprises qui ont besoin de financements sur le moyen comme le long termes ainsi que de terrains rencontrent maintes difficultés. Elles ne disposent pas suffisamment de biens à donner en hypothèque, ce qui exclut tout crédit bancaire. Les redevances d'occupation de terrains industriels sont élevées. Idem pour l'acquisition de technologies et la formation de ressources humaines. Tout cela les conduit à ne pas investir notablement dans l'industrie auxiliaire.
Compte tenu de ce que l'industrie auxiliaire est indispensable pour une percée de l'économie nationale, le Premier ministre Nguyên Tân Dung vient d'adopter la liste des produits auxiliaires bénéficiant des assistances pour renforcer leur production dans les secteurs du textile et de l'habillement, de l'électronique et de l'informatique, de l'automobile, de la mécanique et de l'industrie des hautes technologies.
Phuong Mai/CVN