Mes respects, madame !

Mesdames, ça va être votre fête ! Les roses en frissonnent de plaisir et les hommes ont souligné en rouge cette journée pour mettre chapeau bas en votre honneur. Acceptez compliments et reconnaissance pour ce vous êtes et la lumière que vous apportez dans nos vies !

Les femmes viet-namiennes ont bien de la chance. Quand nous, pauvres hommes, n’avons aucun jour de fête dans l’année, elles ont trois journées pour entendre des éloges et être l’objet de toutes les attentions : le 14 Février, le 8 Mars et le 20 Octobre. Comme s’il fallait régulièrement rappeler que, à part une brève participation masculine, sans elles nous ne serions pas là...

Sous la grâce, une énergie à toute épreuve !


Alors, aujourd’hui, moi aussi, je participe à ce concert de louanges. Permettez-moi, cependant, de garder pour mon intimité les mots d’amour, et de ne me laisser aller avec vous qu’aux cris d’admiration ! Et justement, s’il est une chose qui est admirable chez la femme vietnamienne, c’est sa façon de tenir les finances domestiques d’une main de fer dans un gant de velours !
Femme de tête !
Il existe, ici, des règles que tout bon mari doit connaître et respecter impérativement sous peine que ce soit la femme qui lui fasse sa fête !
• Toujours de mon mari je connaîtrai les salaires, émoluments et autres revenus

«Combien as-tu gagné ? Combien on va te payer ?». Si cette question est toujours formulée de façon anodine, si le ton de la voix est toujours très cordial, la réponse qu’on fera sera capitale… pour la gestionnaire. En effet, curieusement, alors que l’on pourrait s’attendre à une réaction du type «C’est pas beaucoup !», ou alors «Ils se moquent de toi, tu n’es pas assez payé», ou encore «C’est magnifique ! Bravo, je suis fière de toi !».
Le plus souvent, la somme annoncée n’est sanctionnée que par un «C’est bien !» dit sur un ton neutre. Car cette question permet simplement d’établir les bases de la comptabilité domestique, en partant du principe économique suivant : «On dépensera en fonction de ce que l’on aura !». Donc, inutile de craindre des récriminations ou d’espérer des compliments à l’annonce de ce que le fruit de notre travail rapportera à la maison. Par contre, attention, en l’espèce, l’axiome «Ce qui est dit est dit !» se vérifie totalement.
En effet, inutile de se vanter en claironnant un chiffre faramineux pour revenir à la fin du mois avec un montant revu fortement à la baisse. Dans ce cas, vous auriez droit à un regard pour le moins soupçonneux, suivi d’un interrogatoire en bonne et due forme qui pourrait se prolonger fort tard, sans avoir le droit d’être assisté par un représentant syndical ou un avocat ! Épreuve au cours de laquelle, il faudra justifier de la différence entre le prévu et le réalisé ! On ne rigole pas avec les prévisions budgétaires !
• Au restaurant, la note toujours ma femme scrutera
Cela fait bien longtemps que je ne me préoccupe plus de vérifier les notes au restaurant, ni partout ailleurs. Je ne me risquerais même pas à tenter de la récupérer pour envisager de payer ! Il est extraordinaire d’observer les fins de repas dans les restaurants au moment de l’addition. C’est presque toujours à la femme que l’on présente la note, et avec elle commence un rituel incontournable : la vérification.
Imaginez la scène ! La personne avec qui vous devisiez gaiement jusqu’à présent se transforme en une calculette mentale. Le visage se ferme, les yeux s’étrécissent, les lèvres bougent à peine en une lecture muette pour déchiffrer consommations et tarifs. Soudain, un éclair dans la pupille, un doigt souverain souligne un chiffre, un mot, et la sentence tombe, impitoyable : «On a seulement consommé deux bouteilles d’eau, pas trois !» Foudroyé, le serveur ou la tenancière (selon que l’on dîne dans un grand ou petit restaurant) acquiesce et d’un trait rageur corrige le résultat. Et de nouveau les sourcils se froncent, une moue dubitative déforme la bouche, et un second verdict est rendu : «Il y a 8.000 dôngs de trop!». Vous vous dites que tout de même, pour 8.000 dôngs on peut le laisser tranquille, maintenant le serveur qui pantelant ne peut que reconnaître son erreur. Après tout, 8.000 dôngs qu’est-ce que c’est ? Mais non, un dông c’est un dông, et puis c’est pour le principe! On ne trompe pas la comptable domestique ! On pourrait encore penser qu’au moment de payer, on pourra toujours rajouter discrètement les 8.000 dôngs dans le pourboire. Erreur !
Femme d’honneur !
• Dans les magasins, c’est toujours mon épouse qui règlera
Car la comptable des deniers du ménage compte et règle. Ici, pas de séparation des pouvoirs entre l’ordonnateur et le payeur ! Sauf si l’on invite expressément sa conjointe pour lui faire un cadeau, c’est toujours l’épouse qui paye, même si l’argent est dans la poche du mari, qui ne joue que le rôle de transporteur de fonds. Un jour que je m’étonnais de cette pratique, alors qu’en Occident, c’est plutôt l’inverse, la femme d’un ami m’a rétorqué que payer à la place de sa femme donnerait l’impression qu’elle est une femme entretenue, alors qu’en la laissant payer, elle montre son statut de femme mariée. Ben tiens, il fallait le savoir ça, hein ! De toute façon, c’est plutôt mieux comme ça, parce que régler des achats va de pair avec les commandements suivants.
• Les billets vingt fois elle comptera et habilement rangera
Le billet vietnamien est un billet extraordinaire, qui peut passer à la machine à laver sans être abîmé, qui est indéchirable et infroissable, mais qui présente un défaut de taille : il a tendance à rester solidaire de ses compagnons de fortune. Autrement dit, les billets collent l’un à l’autre, et si on n’y prête pas attention, on peut donner le double de la somme demandée sans s’en rendre compte. D’où l’habitude des Vietnamiens de compter et recompter plusieurs fois le nombre de billets quand ils payent. Et à ce jeu-là, la femme vietnamienne est d’une habileté redoutable ! Il faut voir avec quelle dextérité la liasse est dépliée, les billets triés par valeur, séparés, puis ensuite comme la liasse est reconstituée, repliée, et rangée au fond du sac… ou remise au transporteur de fonds s’il est présent.
Sur ces mots, je vous quitte parce que j’ai réussi à détourner subrepticement quelques milliers de dôngs pour acheter la rose qui me permettra d’être pardonné lorsque je serais découvert...

Gérard BONNAFONT/CVN


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