«Mes enfants rêvent d’un métier stable en ville»

Le village de Hà Thanh (Nord) a tout pour plaire. En partageant un thé avec une famille Tày, on ressent pourtant une inquiétude vis-à-vis des jeunes qui rêvent de quitter le village pour travailler en ville.

«J’aime beaucoup ma vie ici. Je me sens bien à Hà Thanh», me confie Duân. L’homme de 43 ans fait partie de l’ethnie Tày. Il vit de la culture de riz, de manioc et de maïs, ainsi que de l’élevage de buffles, de poules et de poissons. À ses heures perdues, il travaille en tant que maçon dans la ville de Hà Giang pour payer les études de ses enfants.

 

La famille vit en partie de l’élevage de buffles.

Duân habite une maison sur pilotis avec sa famille. Son arrière grand-mère, Nhu, est assise à côté des pousses de bambous qui sèchent accrochées au dessus du feu. La vieille dame brode un filet de pêche. Au fond de la pièce se trouve un tính, l’instrument de musique traditionnel à trois cordes de l’ethnie Tày. Contrastant avec le décor, les photos affichées sur le mur montrent plusieurs jeunes revêtant les derniers habits à la mode et prenant la pose avec leurs doigts en signe de V.

Direction la ville

Duân me ressert une tasse de thé amer et poursuit : «Je suis paysan. Qu’est-ce que j’irais faire en ville ?». L’homme ne s’imagine pas une seule seconde quitter les paysages de rizières en escaliers, de forêts et de cours d’eau de son village natal. Ses enfants ne conçoivent pas les choses de la même façon. «Mes enfants rêvent d’un métier stable en ville. Ils ne veulent plus travailler dans les champs», dit-il avec une pointe de regrets dans la voix.

Sa femme entre dans la maison, faisant grincer le plancher en bambous. Duân en profite pour changer de sujet : «Voilà ma femme ! Nous sommes mariés depuis 24 ans». Se resservant une tasse de thé, il ajoute : «J’aurais voulu épouser une autre femme, une femme de la ville... mais il en fut autrement». Sa femme laisse échapper un petit rire, avant de se diriger dehors et d’étendre un costume traditionnel de l’ethnie Tày fraîchement lavé. Quelques tasses de thé plus tard, le soleil se fait de plus en plus bas, laissant ses derniers rayons dessiner des reflets sur les montagnes de Tây Côn Linh.

 

Texte et photo : Jessica Raclot/CVN

 

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