De nombreux mathématiciens vietnamiens travaillent actuellement dans les universités et instituts de recherche de renom à l'étranger mais peu d'entre eux retourne s'installer dans leur pays natal, en raison de l'absence d'un mécanisme de compensation des talents digne de ce nom.
Selon le professeur Nguyên Tiên Dung, de l'Université de Toulouse (France), une centaine de mathématiciens d'origine vietnamienne vivent actuellement à l'étranger. Par rapport au nombre de mathématiciens dans le monde, ce chiffre ne représente qu'une goutte d'eau dans la mer. Mais il est en réalité très important pour le développement des mathématiques au Vietnam.
Les mathématiciens expatriés qui retournent travailler au Vietnam ne sont pas légion. Seule une poignée d'entre eux reviennent quelques mois chaque année comme les professeurs Ngô Bao Châu, Nguyên Tiên Dung ou Dinh Thê Cuong. Un retour qui n'est pas facilité puisque les frais de déplacement sont à leur charge.
Le professeur-docteur Hà Huy Khoai, vice-président de l'Association des mathématiciens du Vietnam et ancien chef de l'Institut des mathématiques, déplore que le pays ne dispose d'aucun mécanisme pour encourager les mathématiciens à retourner au pays. "Plusieurs jeunes poursuivant leurs études à l'étranger veulent retourner au Vietnam, mais ils choisissent finalement de rester sur place, en raison des écarts en termes de revenus et de conditions de travail qui ne cessent de se creuser ".
Profiter des ressources humaines à l'étranger
Le professeur Nguyên Tiên Dung fait également savoir que beaucoup de professeurs de mathématiques américains d'origine vietnamienne aident les stagiaires compatriotes, même si ces aides sont personnelles.
Selon le professeur-Docteur Lê Tuân Hoa, président de l'Association des mathématiciens du Vietnam, "le pays compte un millier de titulaires d'un doctorat en mathématiques mais seuls 150 participent activement aux recherches mathématiques. Ce chiffre est à des +années-lumière+ du nombre de chercheurs d'une université prestigieuse ou d'un grand groupe spécialisé dans les logiciels dans le monde tel Microsoft par exemple".
Ces dernières années, une dizaine de scientifiques de l'Institut des mathématiques sont partis travailler à l'étranger, attirés par de meilleures conditions de travail. C'est pourquoi, selon le professeur Hoa, le développement des mathématiques au Vietnam doit se baser non seulement sur les chercheurs scientifiques du pays, mais également sur la communauté des mathématiciens à l'étranger. De ce constat, il est nécessaire de renforcer la coopération et de profiter de la "matière grise" de la communauté des mathématiciens vietnamiens à l'étranger.
M. Hoa souligne aussi que le projet du programme national de pointe sur le développement des mathématiques pour la période 2010-2020 aborde l'assistance en faveur d'un mathématicien à l'étranger qui retourne travailler au Vietnam. Celui-ci pourrait alors bénéficier d'un salaire mensuel de 1.500 à 2.000 dollars, contre 15 millions de dôngs au maximum pour un mathématicien ayant toujours travaillé dans le pays.
Le professeur Hoàng Tuy estime que les scientifiques vietnamiens à l'étranger devraient créer un réseau pour aider le secteur mathématique du Vietnam, notamment dans la formation des stagiaires, la recherche de bourses pour les étudiants et la coopération.
Pour sa part, le professeur Nguyên Tiên Dung affirme qu'il est nécessaire de créer une organisation comme l'Association des mathématiciens vietnamiens d'outre-mer afin d'échanger les informations par le biais de l'internet, de s'entraider dans le travail comme dans la vie, ainsi que de coopérer avec le Vietnam dans l'organisation de conférences dans ce domaine.
Huong Linh/CVN