Non seulement le ca hô, mais aussi le cá vô co (pangasius sanitwongsei), le cá trach lâu (mastacembelus favus), le cá trà noc (probarbus jullieni sauvage), cá suu (boesemania microlepis bleeker), le cá bông lau (pangasius krempfi fang & chaux), le cá vô dem (pangasius larnaudii bocourt), le cá leo (wallogo attu bloch & schneider), le cá chiên bac (bagarius yarrelli sykes)…, qui peuplaient jadis le Mékong qui arrose 6 pays, sont condamnés à la disparition en raison de la pollution de l'eau, du changement du débit et du courant du Mékong, leur habitat naturel. Depuis 10 ans, on n'arrive plus, ou presque, à pêcher de cá hô. Le dernier à avoir été capturé par un pêcheur de Cho Moi, province d'An Giang, remonte en 2004. Il pesait 153 kg. Nombreux sont les riverains pratiquant cette pêche qui ont dû se reconvertir, le Mékong ne leur donnant presque plus de cá hô.
Les responsables sont la pollution des eaux du Mékong, les crues périodiques moins importantes, des ressources alimentaires moins abondantes… Les scientifiques vietnamiens ne restent cependant pas les bras croisés.
À quelque 130 km au sud-ouest de Hô Chi Minh-Ville, le Centre national des espèces aquatiques d'eau douce du Nam Bô vient au secours des ca hô en danger de disparition. C'est ici, dans le district de Cai Bè, dans des étangs artificiels, que vit un groupe de plus de 200 cá hô. Non seulement ce dernier, mais aussi et entre autres le cá vô co (pangasius sanitwongsei), le cá trach lâu (Mastacembelus favus)…, tous menacés d'extermination, se reproduisent ici.
"Nous avons commencé à élever des cá hô en 2003 et leur reproduction 2 ans après", fait savoir le Docteur Pham Van Khanh, directeur du Centre national des espèces aquatiques d'eau douce. Ce scientifique a mis plusieurs années à réaliser des projets internationaux et de recherches sur les habitats de plusieurs espèces locales de poissons avec l'aide du Comité national du Mékong. M. Khanh et ses disciples, se rendant compte que le cá hô est de plus en plus rare dans le Mékong, ont arrêté leur choix sur cette espèce de poisson à laquelle ils se sont familiarisés.
Collectionner les cá hô, les étudier, les croiser, les apprivoiser… M. Khanh et ses hommes sont prêts à tout pour les sauver de la disparition. Ils sillonnent les localités en amont pour persuader les pêcheurs chanceux de leur céder leurs belles prises.
Entre 2003-2005, une quarantaine de cá hô adultes, pères et mères, vivent en captivité dans ce centre, les scientifiques ayant mis 3 ans à créer une première génération. Selon Thi Thanh Vinh, chef de l'UER Espèces, il faut de 6 à 7 ans pour qu'un individu devienne majeur pour un poids de 10 kg. Dans son milieu naturel, un cá hô peut atteindre 200 à 300 kg. Ceux du centre pèsent de 20 à 30 kg pièce et le taux de reproduction artificielle réussie est de 39%.
En 2008, le centre a fourni aux pêcheurs et aux centres de promotion agricole à Dông Nai, Soc Trang, An Giang, Hâu Giang, Dông Thap (Sud), Hai Phong (Nord)… quelque 200.000 alevins de cá hô qu'ils élèvent en cages submergées en étang.
De la préservation d'une espèce de poisson rare menacée d'extinction à sa production industrielle, les scientifiques vietnamiens ont réussi le premier stade d'un parcours qui sera long. "La production commerciale de cá hô et leur exportation sont tout à fait faisables", affirme Thi Thanh Vinh.
Qu'est-ce qu'un cá hô ?
Le cá hô (catlocarpio siamensis) est le plus gros des cyprinidés vivant dans le Mae Klong, le Mékong et le Chao Phraya en Asie du Sud-Est. Il s'agit d'un poisson migrateur qui va périodiquement chercher sa nourriture ou frayer ailleurs. Les pêcheurs les voient apparaître dans le Mékong en octobre. Nichant dans les profonds trous des grands fleuves, le cá hô s'introduit parfois dans les petits cours d'eau ou les arroyos à la recherche de nourriture. Il mange des algues, des fruits et, plus rarement, de petits animaux. On fait état d'un cá hô long de 3 mètres pesant près de 300 kg. Cette espèce de poisson est aujourd'hui menacée d'extermination.
Trung Khanh-Hà Minh/CVN