Un siècle après la naissance de leur créatrice Tove Jansson, décédée en 2001, les neuf bandes dessinées des Moumines sont encore traduites dans près de 50 langues : du tchèque au chinois en passant par le norvégien ou le grec.
Hemulen, l’un des personnages de la bande dessinée les Moumines, dans un parc à thème de Naantali, dans le Sud de la Finlande. Photo : AFP/VNA/CVN |
«Les Moumines, c’est une échappatoire à l’agitation qui envahit la vie des Japonais, [leur] monde animé permet de se détendre», confie une fan, Tamami Yamaguchi, assistante des ventes dans la ville de Yokohama, qui se rend tous les ans en Finlande pour un véritable pèlerinage.
Comme tant d’autres de ses compatriotes, elle collectionne les objets à l’effigie des Moumines et est fière d’être l’heureuse propriétaire de pyjamas, de taies d’oreillers ou de vaisselle où apparaissent ses héros.
Équivalent des emblématiques gaulois Astérix et Obélix, les Moumines ont 70 ans de notoriété internationale derrière eux : le premier ouvrage, Les Moumines et la grande inondation, a été publié en 1945.
Née sous le Tsar
C’est dans une maison ronde et bleue que vit la famille Moumine -Papa Moumine, Maman Moumine et Moumine le troll - au cœur d’une vallée idyllique et paisible. Dépeints par leur auteure comme les militants d’un monde où l’ouverture d’esprit et le respect de la nature font la loi, les loisirs, les amis et la découverte d’autres mondes font partie intégrante de leur quotidien.
«Perdez votre soif de curiosité et vous vous laissez mourir», avait écrit Tove Jansson dans sa nouvelle autobiographique «Fair-play» publiée en 1989.
Si la renommée mondiale de Tove Jansson doit beaucoup au départ à la publication de ses histoires sous forme de feuilleton dans le quotidien anglais Evening news, de 1954 à 1974, le destin des Moumines n’était pas tout tracé.
Les Moumines, ou Moomins sont des personnages créés par la Finlandaise Tove Jansson. Il s’agit d’une famille de gentils trolls ressemblant à des vaches. |
Photo : CTV/CVN |
Tove Jansson est née dans une famille d’artistes de la minorité suédoise de Finlande le 9 août 1914, alors que le pays nordique était encore dirigé par le tsar de Russie, Nicolas II. La jeune fille, qui a étudié à Stockholm, Helsinki et Paris, s’orientait vers une carrière de peintre.
Mais sans la Seconde Guerre Mondiale, épisode traumatisant pour la Finlande qui a perdu près de 100.000 vies et plusieurs parties de son territoire au profit de l’Union soviétique, elle n’aurait peut-être jamais développé une telle imagination.
«Tove Jansson a créé la famille Moumines parce qu’elle voulait penser à autre chose», souligne la conservatrice du Musée des Beaux-arts l’Ateneum à Helsinki, Tuula Karjalainen.
L’auteure a façonné ses personnages en se calquant sur son entourage : la Maman Moumine, patiente et intelligente, pour qui tout problème a une solution, serait inspirée de sa propre mère.
Les gens aiment leur «approche philosophique de la vie», estime le rédacteur en chef de Parnasso, le principal magazine de littérature finlandais, Karo Hämäläinen.
Le Japon, accélérateur du succès
L’apogée a été atteinte dans les années 90, lorsqu’une série télévisée au Japon a captivé le grand public. Autre clé du succès: les Moumines, dans leur version internationale, n’intègrent pas les bizarreries qui font la singularité de leur version finlandaise.
«La version japonaise est plus drôle (...) que l’originale», explique Mme Yamaguchi, qui fait partie des 200.000 visiteurs annuels du Monde des Moumines, le parc à thème situé dans le Sud de la Finlande. L’an prochain, elle n’aura pas à aller si loin pour s’amuser avec ses personnages préférés car le Japon accueillera son propre parc Moumines.
Ces petits personnages aux airs si innocents ont engendré un marché très lucratif, bien qu’éloigné de l’esprit original de l’auteure. En 2013, l’industrie des Moumines a représenté un chiffre d’affaires de près de 8 millions d’euros.
«Elle était assez critique envers la commercialisation des personnages, confie Mme Karjalainen. Mais elle était ravie de donner de la joie aux enfants».
«Tove Jansson a écrit des histoires pour elle et pour les adultes, mais le Monde des Moumines est fait pour les enfants, c’est la plus grosse différence», explique le directeur du Monde des Moumines en Finlande, Tomi Lohikoski.
Son centième anniversaire est célébré aux quatre coins du globe, notamment à travers la sortie du film animé Les Moumines sur la Côte d’Azur en octobre, la pièce tirée de La folie de l’été des Moumines, jouée au théâtre Polka de Londres, ou encore de nombreuses expositions.
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