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"L'impact destructeur des conflits est ressenti par les enfants dans toute la région", résume Peter Salama, le directeur de l'UNICEF pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.
"Il ne s'agit pas seulement de dégâts matériels dans des écoles, mais aussi du désespoir ressenti par une génération d'écoliers qui voient leurs espoirs et leur avenir brisés", regrette-t-il en commentant un rapport publié le 3 septembre.
Ces enfants habitent les pays les plus troublés de la région, comme la Syrie, l'Irak, le Yémen, la Libye, les Territoires palestiniens et le Soudan, ou sont réfugiés au Liban, en Jordanie et en Turquie.
Des enfants irakiens déplacés, qui ont fui leurs maisons devant les attaques du groupe État islamique, jouent dans un camp de réfugiés d'Harcham, près d'Erbil, au Kurdistan irakien, le 22 juin. |
Au total, ce sont plus de 13 millions d'entre eux, soit quatre enfants sur dix dans les pays les plus touchés, qui ne sont pas scolarisés alors que la région semblait en passe, "il y a quelques années, d'atteindre l'objectif de l'éducation pour tous", souligne l'UNICEF.
Plus de 8.850 écoles en Syrie, Irak, Yémen et Libye ne peuvent plus accueillir d'élèves parce qu'elles ont été endommagées ou détruites, abritent des déplacés ou sont occupées par des belligérants, selon le rapport.
Ainsi au Yémen, certaines écoles ont été "transformées en casernes", notamment par les rebelles chiites Houthis, "privant les élèves du deuxième semestre de l'année scolaire", se plaint un instituteur de Sanaa.
"Des chars et des unités de la Défense aérienne ont été postés dans des écoles", s'insurge pour sa part Abdel Rab Hassan, directeur d'une école de la capitale interrogé par l'AFP.
De ce fait, écoles et lycées sont fermés au Yémen depuis le début, en mars, de la campagne aérienne lancée par la coalition arabe conduite par l'Arabie saoudite pour empêcher les Houthis de prendre l'ensemble du pays.
"Danger" à l'école
Dans la bande de Gaza, les enfants utilisent les établissements scolaires comme refuges parce que leurs maisons ont été détruites lors de la guerre de l'été 2014. De même en Irak où des écoles accueillent certains des trois millions de déplacés contraints de fuir leurs villes touchées par les violences, liées notamment au groupe État islamique (EI).
En Syrie, au Soudan et au Yémen ainsi que dans une grande partie de la Libye, les parents n'envoient plus leurs enfants à l'école, craignant pour leur sécurité, précise l'UNICEF.
Aller à l'école est "plein de danger" pour de nombreux enfants, souligne l'organisation qui a dénombré 214 attaques contre des écoles dans la région en 2014.
À Benghazi, la deuxième ville de Libye, seuls 65 des 239 établissements scolaires sont toujours ouverts.
"En Syrie, le conflit a détruit deux décennies de travail en faveur de l'élargissement de l'accès à l'éducation", déplore l'UNICEF, qui indique que plus de 52.000 enseignants ont quitté leur poste.
Dans les pays voisins, plus de 700.000 enfants syriens ne sont pas à l'école, en particulier en Turquie et au Liban où les écoles sont surpeuplés et manquent de moyens.
"Comme tous les enfants"
Les conflits ont par ailleurs considérablement réduit les moyens de subsistance des familles, poussant les enfants à quitter l'école pour travailler dans des conditions difficiles et pour des salaires dérisoires. Des jeunes filles peuvent être mariées dès l'âge de 13 ans pour alléger le fardeau de la famille.
Privés de scolarité, certains jeunes finissent par rejoindre, volontairement ou non, des groupes armés. Au Yémen, Haj Saïd se plaint que son fils de 16 ans, Anwar, "a fini par rejoindre la province de Dhaleh (Sud) où il a pris les armes aux côtés des Houthis".
L'absence d'éducation est l'une des raisons souvent mises en avant par les réfugiés syriens cherchant à se rendre en Europe. "Je veux que mes enfants puissent jouer et aller à l'école comme tous les enfants", expliquait Nisreen, une mère de famille de 34 ans arrivée cet été sur l'île grecque de Kos.
Pour éviter un gâchis total pour une génération entière, l'UNICEF appelle notamment à renforcer les méthodes d'enseignement individuel, notamment numériques, et à faire de l'éducation l'une des priorités de l'aide humanitaire, qui y consacre actuellement moins de 2% du total de ses fonds.